Comment MicroEJ veut s’incruster dans un milliard d’objets électroniques d’ici 2026

Sur un marché des objets connectés estimé à 100 milliards d’appareils, la nantaise MicroEJ, spécialisée dans la conception de conteneurs d’applications logicielles, a développé une solution ultra standardisée et sécurisée pour faire communiquer les appareils électroniques connectés ou non. Une révolution qui permet aux fabricants de réduire de moitié les temps de conception et de mise sur le marché de leur produit. L’objectif est clair : équiper 1 montre connectée sur 2 dans le monde.
L'intégration de la technologie MicroEJ VEE dans les badgeuses Kelio Xtrem a permis à la société Bodet Software de diviser par deux ses temps de conception et de fabrication, d'accroitre ses capacités de maintenance  et sécuriser ses matériels.
L'intégration de la technologie MicroEJ VEE dans les badgeuses Kelio Xtrem a permis à la société Bodet Software de diviser par deux ses temps de conception et de fabrication, d'accroitre ses capacités de maintenance et sécuriser ses matériels. (Crédits : Biografik)

Les aspirateurs Rowenta, les modems 3 et 4G de Thales, les robots cuiseurs Cookeo Touch de Moulinex, la domotique de Leroy Merlin, les pompes à chaleur d'Atlantic... En quatre ans, la solution technologique de l'entreprise nantaise Micro EJ a équipé plus de cent millions de produits électroniques et objets connectés à travers le monde. Sa proposition de valeur ? Développer des "conteneurs" permettant de loger au même endroit le code d'une application, sans que celui-ci soit implémenté sur l'infrastructure. Cette méthode - aussi appelée virtualisation - permet aux industriels de réduire par deux le temps de R&D, d'abaisser leurs coûts de production et d'accélérer les mises sur le marché.

« Notre objectif premier était de prendre pied dans dix verticales métiers ; petit et gros électroménagers, imprimantes, thermostat... avec au moins une ou deux références chez un grand compte. Il s'agit maintenant de devenir majoritaire dans chacune de ces verticales, et déjà, sur un marché où les plus grands acteurs détiennent 10% à 15% de parts de marché, on peut dire qu'en 2024, une montre connectée sur deux sera équipée de notre technologie », assure Fred Rivard, Président de MicroEJ,

Voyage au cœur du bas-niveau

Il aura fallu huit ans et près de quarante millions d'euros d'investissement à MicroEJ pour être aujourd'hui considéré comme le « petit frère » d'Android Things. Ce système d'exploitation, repris par Google en 2015 a finalement été abandonné le 5 janvier dernier, face à une vive concurrence d'Ubuntu Core, RIOT, l'Azure Sphere OS et Windows 10 IoT chez Microsoft, et... de MicroEJ.

« L'idée des conteneurs logiciels n'est pas nouvelle. Tous les serveurs, tous les PC, tous les smartphones ont de la virtualisation, mais seul l'univers des objets connectés en était dépourvu. Tout simplement parce qu'ils étaient trop volumineux et consommaient beaucoup de mémoire», rappelle Fred Rivard, docteur et expert en sémantique informatique, passé chez IBM, où le développement des systèmes embarqués ne semblait pas la priorité.

De ce constat est né MicroEJ il y a une dizaine d'années. Elle a été soutenue par le fonds d'investissement Innovacom, pionnier du capital-innovation en France et entré au capital de la startup, pour accompagner la R&D.

« En supprimant des volumes de codes, on a réduit la consommation d'électricité. Ce qui coûte, c'est la mémoire, alors on s'est spécialisé sur de petits et moyens conteneurs hors des champs économiques de nos concurrents et l'on a mis au point une solution standardisée, inexistantes sur le marché dans les langages bas niveaux. Jusque-là, les fabricants s'orientaient vers des solutions maisons dont ce n'était pas le métier», dit-il.

Diviser par deux les temps de développement et de mise sur le marché

A Cholet, Bodet Software, éditeur et fabriquant de solutions de gestion RH et de badgeage, qui, depuis vingt ans, a développé sa propre « usine à logiciels » a, finalement, intégré la technologie de MicroEJ (Microej VEE) pour le logiciel de son terminal Kelio Xtrem, un nouveau lecteur de contrôle d'accès connecté.

 « Jusqu'ici, nous faisions tous en interne. Nous avions deux équipes, l'une travaillant sur les produits sophistiqués, l'autre sur les produits embarqués dont les langages bas niveau étaient adaptés à l'usage. Selon le processeur, on s'appuyait sur les plateformes Linux, Android ou l'on développait notre propre solution dans notre bureau d'études. La difficulté était de les faire communiquer entre eux. Désormais, nous avons une solution moins couteuse, standardisée, plus maniable pour la maintenance, capable de communiquer entre les langages haut et bas niveau de nos gammes et finalement plus sécurisée sans que l'on ait besoin de réinventer la roue », indique Julien Maury, Chef de produit Hard et sécurité de Bodet Software.

Grâce au concept de virtualisation permettant de paralléliser les phases de conception de l'électronique et du logiciel, Bodet Software estime pourvoir diviser par deux les temps de développement et de mise sur le marché de ses nouveaux produits.

« C'est une nouvelle façon de travailler », reconnait Julien Maury. C'est là-dessus que capitalise MicroEJ qui a abandonné le salon Embeded World de Nuremberg, dédié aux écosystèmes, il y a cinq ans, pour venir cette année, pour la quatrième fois, au CES de Las Vegas, avec l'objectif d'accélérer. « Dans le petit électroménager, 80% de la production est assurée par dix acteurs », justifie Fred Rivard.

Au cours des quatre dernières années, MicroEJ dit avoir quadruplé de taille et, sans dévoiler son chiffre d'affaires et des résultats déclarés « positifs », ambitionne de passer de 60 à 120 personnes d'ici 2026.

Plonger directement au cœur des multicœurs

Pour garder le même rythme jusqu'en 2026, Micro EJ entend renforcer ses équipes commerciales et techniques avec le recrutement d'ingénieurs. Et pas seulement en France. Présente à travers des succursales au Brésil, aux USA, en Allemagne, en Roumanie, en Chine, en Corée et au Japon pour coller aux spécificités locales et couvrir l'ensemble des fuseaux horaires, Micro EJ cherche à s'implanter au Mexique en 2022.

Cette croissance, devrait, selon Fred Rivard, inévitablement passer par une levée de fonds, une entrée en bourse ou un exit partiel. « Nous sommes en train de calibrer nos besoins, mais nous n'avons pas de tabou, pas de crainte de la dilution tant que l'on reste indépendant dans la réalisation », lance-t-il.

Si le socle de la technologie mise au point par MicroEJ devrait peu varier à l'exception de déclinaisons adaptées à chaque partenaire, avec des nouveaux protocoles et outillages pour satisfaire aux exigences d'un nouveau fond, d'écrans ronds plutôt que carré... C'est en misant sur le hard que Fred Rivard entend se différencier.

A l'instar du processeur virtuel MEJ32 que l'entreprise vient de lancer à destination des fabricants de puces électroniques. « Avec l'implémentation « 100% matérielle » de MEJ32, nous pouvons viser des conceptions de plus en plus exigeantes, dotées de fonctions plus denses. Outre l'augmentation de la sécurité, l'accélération matérielle de MEJ32 permet d'abaisser la consommation d'énergie de 80% et d'améliorer d'un facteur 10 la performance globale », souligne Fred Rivard. Avec, à l'avenir, l'intégration de conteneurs logiciels dans des processeurs multicœurs et la création de nouveaux langages, le fondateur de MicroEJ vise le changement d'échelle.

«Les besoins s'accroissent et nous sommes plutôt du bon côté de la barrière... » estime-t-il.

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Commentaire 1
à écrit le 04/02/2022 à 8:37
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Ce qui est bien avec l'internet des objets et que plus personne ne doute de la surveillance de masse qu'ils vont occasionner, certainement pour cela que ça n'avance pas, il faut encore une fois qu'ils nous l'imposent. Comme le disait Nietzsche on ne ...

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