« thecamp doit être une expérience qui transforme ceux qui la vivent »

Si l'ancien PDG de La Poste et de la RATP a embarqué pour le projet le plus disruptif du moment en devenant le président du comité d'orientation de thecamp, c'est parce qu'il estime que la transformation digitale, bien menée, doit être un vecteur d'opportunités pour les entreprises comme pour le citoyen.

LA TRIBUNE - Quel argument présenté par thecamp et son fondateur, Frédéric Chevalier, vous a convaincu de devenir le président du comité d'orientation ?

JEAN-PAUL BAILLY - Je ne connaissais pas Frédéric Chevalier. Un ami commun nous a mis en contact. C'est un personnage exceptionnel, inspirant parce qu'avec une vision, parce qu'il a montré dans sa carrière sa capacité à être un entrepreneur, et qu'il était prêt à s'engager pour cette vision en prenant des risques. De plus, avant que j'arrive, il avait déjà convaincu un certain nombre d'acteurs publics et privés. Ce qui m'a également plu, c'est que ce comité d'orientation que je préside et qui est en cours de constitution, vise à être transgénérationel, en réunissant des personnes venant d'horizons différents. Tous les aspects de thecamp m'ont convaincu, tant il répond aux enjeux de la période actuelle. Car la question est : « Pourquoi thecamp ? ».

C'est un lieu de partage, de création de connaissances en développement. C'est une transversalité qui est la seule façon de faire face aux enjeux actuels.

thecamp est-il un concept que vous auriez aimé imaginer ?

Oui, mais en même temps mon parcours professionnel fait que je n'aurais pas pu l'imaginer. Nous avons été disruptifs, mais dans le classique, dirais-je.

thecamp réunit partenaires publics et privés autour d'un projet qui n'existe pas encore et qui n'a pas de précédent. Faut-il y voir la capacité des parties prenantes à considérer que ce projet ouvre la voie à une nouvelle façon de rapprocher les compétences ?

C'est, en tout cas, l'ambition que nous avons. thecamp est un projet différent des autres, disruptif, et qui ne veut surtout pas se banaliser. Nous voulons autour de la table des personnes curieuses d'esprit, participatives, des partenaires capables d'accompagner ce projet, de le faire vivre dans la durée, afin qu'il demeure fidèle à lui-même, qu'il ne s'institutionnalise pas. Toutes les autres institutions qui pourraient se comparer à thecamp restent malgré tout dans des modèles plus traditionnels et ne sont pas fondées sur une expérience unique. thecamp doit être une expérience qui transforme ceux qui la vivent.

thecamp se veut un lieu transgénérationnel, transculturel et transdisciplinaire. Est-ce de cette façon que l'on doit penser le monde de demain ?

Oui, je crois. Dans le monde en général et dans l'entreprise en particulier, il existe un besoin de changement sur la façon de travailler et sur le sens du travail. Les attentes changent, sur les produits à consommer aussi bien que sur la façon de travailler. Cette prise de conscience existe, mais finalement on a l'impression que ça ne fait pas beaucoup bouger les lignes. On reste dans une logique top/down alors qu'il faudrait une logique «bottom up». Cela fait longtemps, que dans le monde du travail, l'autorité n'est plus acceptée. C'est une vision du monde qui doit changer. Avec davantage de transversalité. Les entreprises libérées, dont on parle beaucoup actuellement, attendent de travailler avec des acteurs comme thecamp.

thecamp veut aider à la transformation des entreprises, quelles qu'elles soient. Vous avez mené la transformation de La Poste. Le titre de votre livre, Demain est déjà là, sonne comme très actuel. Comment sait-on, sent-on, qu'il faut mener la transition ?

On le sent dès lors qu'il y a un décalage qui s'inscrit entre ce que fait l'entreprise et ce que nous, dirigeants, nous voudrions faire. Cette transformation est souvent vitale. Si elle n'est pas menée, l'entreprise meurt. J'ai toujours mené les transformations des entreprises que j'ai dirigées en consacrant beaucoup de temps à l'écosystème, aux équipes, au sens des choses, pour en faire une ambition stratégique. Si l'on n'arrive pas à faire partager sa vision de la transformation dans l'entreprise, alors on n'y parvient pas. La plupart des gens ne sont pas contre le changement, mais ils veulent comprendre le pourquoi et le comment. J'ai toujours pensé que ce travail de prospective était la condition pour mener le changement. Cette transformation ne doit pas être vue de manière mécanique. Une entreprise est un être vivant. Il faut créer les conditions du succès. Et cela colle bien à thecamp.

Le partage de connaissances, l'échange continuel de savoirs est l'un des socles de thecamp. L'économie de la connaissance est un véritable enjeu face à la mondialisation et la compétitivité ?

C'est la clé. On peut faire l'appréciation que la France n'a pas bien réussi son entrée dans la mondialisation. Le savoir et la connaissance sont les clés de demain. L'innovation est au croisement des savoirs. Les objets connectés, Occulus Rift, Hyperloop, sont le résultat du croisement des savoirs. Notre objectif est que les étudiants, les entrepreneurs, les startups, les leaders du privé et du public qui viendront à thecamp repartent en ayant vécu une expérience qui les transforme et qui en fasse des créateurs et des innovateurs.

Le projet est ancré à Aix-en-Provence, qui accueille chaque année les Rencontres économiques. Le thème de cette année pose la question « qu'attend-on d'un pays ? ». Dans le contexte actuel, que peut-on en attendre ?

D'un pays, on peut attendre le pire et le meilleur. Le pays ne doit pas être un facteur de protectionnisme, de nationalisme, de repli sur soi, mais au contraire être un facteur de différence et d'ouverture au monde et au futur. L'Europe doit se nourrir de chaque pays. thecamp est un outil fondamentalement européen, parce que multinational, multi-expérience, multisavoir. C'est à la fois un outil de connaissance, mais aussi de tolérance, avec une vision foncièrement humaniste.

Alors que le Brexit monopolise l'actualité et secoue l'Europe, thecamp

a justement vocation à créer un effet d'entraînement sur la région, la France et même l'Europe, en étant un catalyseur d'idées. L'Europe n'est-elle pas encore trop timide sur les sujets de transformation et de prise en considération de ce que le numérique, parce qu'il crée de nouveaux modèles, peut apporter comme valeur ajoutée ?

Un catalyseur d'idées, c'est vraiment cela qu'est thecamp. Il faut que tous les acteurs prennent conscience de la radicalité des changements qui ont cours, qu'ils comprennent ce monde et sa transformation. Il faut aussi, et c'est un sujet majeur dès qu'on parle de technologies, que ce projet soit au service de l'homme. La vision humaniste de thecamp est un héritage culturel typiquement européen auquel nous tenons beaucoup, nous voulons développer cette vision au sein de la culture technologique. Il doit y avoir une réponse culturelle au développement exponentiel des technologies, et nous, Européens, avons une vision à apporter et à diffuser. C'est l'un des enjeux de thecamp.

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Commentaires 5
à écrit le 01/09/2016 à 21:54
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Hahahahaha! Ou serait-ce "Au secours!"? Un tel laïus où on ne présente pas même le projet ou son contenu avant de partir dans la stratosphère du jargon qui va bien à la mode. Grotesque. Je critique souvent l'abus de l'excuse d'incompétence qu'on n...

à écrit le 17/08/2016 à 21:07
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MdR. A part une très belle collection de jargon à la mode: disrupmachin et transchose, concrètement, de quoi parle t'on?

à écrit le 08/07/2016 à 8:25
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the camp à aix en provence à coté de l'europole de l'arbois, ce sera la démonstration des limites de l'accompagnement du secteur public à l'innovation à coté d'un projet mené comme une entreprise, sans les lourdeurs inhérentes à l'emploi de fonds pub...

à écrit le 05/07/2016 à 11:24
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"the camp a justement vocation à créer un effet d'entraînement sur la région, lsur la région, la France et même l'Europe". J'ajouterais le système solaire, l'univers connu et inconnu, depuis le big bang jusqu'à la fin des temps. On aimerait avoir...

le 05/07/2016 à 13:00
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@Nathan : et on aimerait aussi avoir le sentiments des salariés et représentants du personnel de la Poste, "transformée" par ce monsieur !

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