Stockage de l'énergie : « Demain, on pourrait envisager de fonctionner en circuit fermé »

De quoi DEMAIN sera-t-il fait ? Bpifrance s'est lancé le défi de mener une réflexion sur les sujets d'innovation qui révolutionneront notre quotidien dans les années à venir, notamment du point de vue de l'énergie. Pour cela, Bpifrance anime une démarche collective en mode projet, pilotée par ses collaborateurs et associant les acteurs des écosystèmes concernés. L’un des sujets stratégiques récemment traité est le stockage de l'énergie. Bpifrance soutient les entreprises du secteur, particulièrement les petites structures innovantes en pleine croissance, à l'instar d'Entech. Son cofondateur, Laurent Meyer, évoque les grands défis actuels et à venir, notamment dans le champ du stockage stationnaire.
Laurent Meyer, cofondateur d'Entech
Laurent Meyer, cofondateur d'Entech (Crédits : DR)

À en croire les prévisions de Bank of America Merrill Lynch publiées en 2019, le marché mondial du stockage de l'énergie devrait bondir de près de 16 % par an pour atteindre 58 milliards de dollars à l'horizon 2040. À cette date, le stockage pourrait concerner 6 % de la production électrique planétaire !

Une réponse à l'intermittence des énergies renouvelables

« Le stockage d'électricité, ce sont deux combats distincts : d'un côté, la fabrication des cellules ; de l'autre, le développement de solutions de conversion et de pilotage des réseaux », rappelle Laurent Meyer, à la tête de la startup spécialisée en grande partie dans le stockage stationnaire (en opposition au stockage mobile, qui concerne notamment les véhicules électriques, ndlr). « Le combat du composant, indispensable pour fabriquer les batteries lithium-ion, est industriel et hautement capitalistique, mais il est largement dominé par les Chinois et les Sud-Coréens ».

 Reste donc le créneau de l'intelligence des réseaux, dans lequel orbite aujourd'hui, autour des géants industriels, une myriade de nouveaux acteurs, comme Entech. « Dans ce combat-là, l'Europe et la France en particulier, sont très bien positionnées », estime Laurent Meyer. Sa société, 48 employés, intervient « depuis la conception jusqu'à la production et l'exploitation du système de stockage ». Basée à Quimper, elle développe, entre autres, un système de stockage sous forme de conteneur « plug and play » : branché à la production d'un côté et au consommateur de l'autre.

 En France métropolitaine, la place prépondérante occupée par l'énergie nucléaire, les grandes capacités de stockage hydroélectrique et l'excellent maillage du réseau, rendent le recours au stockage stationnaire peu pertinent pour le moment. C'est donc avant tout dans les zones non-interconnectées, comme en Outre-mer ou en Corse, qu'il se développe, parallèlement à la montée en puissance des énergies renouvelables (EnR). « Dans ces régions isolées d'un point de vue énergétique, l'objectif est de parvenir à équilibrer le réseau et de trouver une réponse à l'intermittence des énergies renouvelables », explique Laurent Meyer. En d'autres termes, éviter de faire redémarrer les centrales thermiques, très polluantes et coûteuses, à la moindre chute de production. Entech s'apprête d'ailleurs à déployer en Guyane le plus important système de stockage jamais installé en France. Grâce à cinq conteneurs de 40 pieds (soit 12 mètres de long), il sera doté d'une puissance de près de 12 MW pour 13 MWh de quantité d'énergie embarquée.

 Rendement, durabilité, coûts : « les trois grands axes de R&D »

 En matière de stockage d'électricité, l'innovation est vitale. Elle vise à optimiser toujours plus le stockage, et donc les énergies renouvelables. « Le rendement, la durabilité et les coûts forment les trois grands axes de R&D afin de lever les infaisabilités sur des projets de stockage », note Laurent Meyer. « Aujourd'hui, nous sommes capables de monter à plus de 90 % de rendement aller-retour sur une batterie, contre 70 % il y a quelques années encore. Si on produit 100 d'EnR, on arrive donc à en injecter 90 % au consommateur ».

 D'un point de vue économique et politique cette fois, le grand défi consiste à faire naître en Europe une filière batterie capable de concurrencer l'Asie. Le projet d' « Airbus de la batterie » initié par la European Battery Alliance (EBA), répond à cet impératif. « Et ce combat est fondamental pour nous aussi, glisse Laurent Meyer. Car si la production de batterie devient plus locale, avec un mix énergétique plus favorable, le bilan carbone de nos produits en sortira grandement amélioré. Enfin, il s'agit d'un enjeu fondamental de souveraineté industrielle. Nous sommes tous concernés ».

 Cet « Airbus de la batterie » qui se profile aura aussi pour ambition d'accélérer la valorisation des batteries de véhicules électriques usagées. Une filière de seconde vie des batteries mobiles à destination du stockage stationnaire émerge. Une batterie de voiture électrique aux performances dégradées reste souvent utilisable dans un contexte stationnaire. « A terme, l'idée est de pouvoir réutiliser des millions de batteries en augmentant leur durée de vie de 7 ans, détaille Laurent Meyer. A côté de cela, améliorer la recyclabilité de la batterie est un autre enjeu d'avenir. Demain, on pourrait alors envisager de fonctionner en circuit fermé, avec des batteries démontables et recyclables, dont les matériaux seraient réinjectés dans des batteries neuves ».

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