Sibylle Reichert : « Créer une institution paritaire paneuropéenne »

Directrice en charge des relations avec l'Union Européenne au sein de l'Association européenne des institutions paritaires de la protection sociale (AEIP), Sibylle Reichert explique l'importance du paritarisme pour l'Europe de la protection sociale. Un modèle qui selon elle, doit se développer pour protéger des travailleurs de plus en plus mobiles.

Quel est l?avantage pour l?Europe de développer un système paritaire ?

Cette gestion équilibrée, mise en pratique par les institutions membres de l?AEIP, comme les institutions de prévoyance françaises, garantit une efficacité économique et la promotion de la justice sociale et du bien-être. Les travailleurs et les employeurs négocient sur les sujets liés à la protection sociale afin de répondre aux besoins des uns et des autres. En Europe, le modèle paritaire est une véritable preuve de démocratie.

Seul 18 pays membres sur 27 font partis de l?AEIP. Cela signifie-t-il que le sujet n?intéresse pas ?

Non. Il faut savoir que le système paritaire a une valeur historique dans certains pays de l?Union. C?est le cas par exemple en France, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Italie, dans les pays Scandinaves. Le paritarisme est même présent au Royaume-Uni et en Irlande, sous un autre nom. En revanche, cela n?est pas une tradition dans les pays comme l?Espagne, le Portugal, les pays de l?Est et d?Europe centrale. Notre but est justement de promouvoir le modèle dans ces pays.

Y Parvenez-vous ?

Oui, de plus en plus. Dans beaucoup de pays, notamment en Europe centrale et de l?Est, les systèmes de protection sociale ont été influencés par le modèle de la Banque mondiale et sont gérés par des fonds. Mais avec la crise financière, les gouvernements se rendent compte que ce n?est pas un fonctionnement idéal... Ils s?intéressent donc de plus en plus au système paritaire et à d?autres formes de financement comme les régimes mixte de répartition et de capitalisation. L?an dernier, à l?issu d?une conférence à Varsovie, organisée par les partenaires sociaux du secteur de la construction, qui avait pour but de présenter les régimes paritaires en Pologne, République Tchèque, Slovaquie et Hongrie, les partenaires sociaux européens ont conclut une déclaration commune pour la promotion des institutions paritaires en Europe. Un autre exemple en Grèce, où nous avons vu la création d?un fonds paritaire, suite au travail de consultation de l?AEIP.

Quel intérêt accorde Bruxelles à la question ?

C?est pour la Commission européenne un sujet de grand intérêt car le dialogue social s?inscrit dans le traité qui institut la Communauté économique européenne et donc est un élément important du « modèle social européen ». Plusieurs directives ont été mises en place et en ce moment, la Commission travaille sur le dossier de la solvabilité des régimes d?assurances et de fond de pensions. De notre côté, nos expertises et nos propositions sont très écoutées. Nous sommes installés à Bruxelles depuis 1996, nous avons développé un réseau très large et donc, nous sommes associés aux discussions. Un bel exemple de notre succès est la directive service de 2006, dite « Directive Bolkestein » qui dans sa version de proposition incluait les services sociaux et des dispositions concernant le détachement des travailleurs. Ce dernier point est un sujet de grande importance pour nos membres actifs en matière de régimes de congé payé. Avec le concours de l?AEIP, les services sociaux et les dispositions sur le détachement des travailleurs ont été exclus de la directive dans sa version adoptée.

Quel est votre but à terme ?

Notre objectif à long terme est la reconnaissance d?une institution paritaire européenne, la seule structure à même d'assurer la négociation et la gestion paritaires d'accords collectifs de retraite et de prévoyance à travers les frontières. Une telle institution permettra de répondre aux besoins croissants des secteurs professionnels tels que le secteur de la construction, de la santé et des soins, le secteur de métallurgie et des groupes multinationaux où les travailleurs sont très mobiles. Le paritarisme a vocation à se développer en Europe mais aussi dans le monde. Nous venons d?entamer un partenariat avec les régimes paritaires américains afin d?échanger sur les défis en communs. D?après l?AEIP, le paritarisme est une valeur qu?il faut promouvoir non seulement en Europe, mais à l?échelle mondiale. L?AEIP continuera ses efforts dans ce sens.

 

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