L'harmonisation fiscale européenne n'est pas pour demain

Alors que la France et l'Allemagne réfléchissent au rapprochement de l'imposition des bénéfices de sociétés, l'harmonisation fiscale européenne n'en est qu'à ses balbutiements.
Copyright Reuters

Etant donné l'ampleur des chantiers, la fin de la construction européenne est bien loin d'être achevée. C'est particulièrement vrai dans le domaine de la fiscalité des entreprises, pierre angulaire de l'intégration économique des pays membres de l'Union européenne.

Si les premières pierres de la création d'une fiscalité indirecte commune, symbolisée par l'encadrement des taux de TVA, ont déjà été posées par Bruxelles pour faciliter la libre circulation des marchandises et des services, il en va tout autrement de la fiscalité directe.

Soulevées ce mardi par un rapport publié par le Cercle des Européens, les difficultés pour harmoniser par exemple l'assiette du taux d'impôt sur les sociétés sont nombreuses. Il y a pourtant urgence, pour le bien commun des entreprises du Vieux Continent. "Alors que le gouvernement essaie d'inciter les entreprises à conquérir les marchés étrangers, celles-ci doivent faire face à vingt-sept systèmes fiscaux au sein de l'Union européenne", se désole Mirko Hayat, professeur affilié à HEC Paris et rapporteur du rapport dévoilé par le "think tank".

"Résultat, pour remplir ses obligations fiscales déclaratives, le géant américain Unilever a dû créer douze directions fiscales dans douze pays différents et faire appel à quinze cabinets locauxe, explique Michel Aujean, avocat fiscaliste chez Taj. On comprend le découragement des dirigeants des petites PME, bien moins puissantes sur le plan financier, à passer les frontières.

"Ces divergences fiscales permettent les comportements non coopératifs au sein de l'Union européenne, en favorisant par exemple la concurrence entre les pays. Ce n'est pas tout. L'absence de régime de groupe dans neuf pays sur vingt-sept, la mise en place de règles d'application différentes des règles fiscales, la non prise en charge des pertes dans d'autres pays européens sont autant d'obstacles au bon fonctionnement du marché intérieur", ajoute Laurent Chappuis de la Direction générale Fiscalité et Union douanière (Taxud) de la Commission européenne.

L'exemple des prix de transferts entre les maisons mères et leurs filiales illustrent parfaitement l'absurdité des pratiques comptables que les entreprises sont obligées de mettre en place pour remplir leurs obligations fiscales. Artificiellement organisés par les entreprises, ces prix donnent la possibilité de minorer l'imposition des bénéfices en leur permettant de jouer sur la localisation de leurs profits. Elles peuvent tirer profit des différences de fiscalité d'une région ou d'un pays à un autre. "Concrètement, les prix de transfert réduisent l'efficacité de l'outil fiscal et créent une incertitude juridique qui pèse sur l'activité », poursuit Laurent Chappuis

Certes, des avancées notables ont déjà été faites. Le projet de Bruxelles d'assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés, la directive Accis, permettrait de simplifier la vie des entreprises. "Mais pour que le projet aboutisse, il faut une volonté politique forte de la part de tous les membres de l'Union", martèle Noëlle Lenoir, présidente du "think tank".

Une chose est sure estiment les experts : un rapprochement des fiscalités européennes pourrait d'ores et déjà être envisagé entre les Etats membres dont le système d'imposition est proche. La France et l'Allemagne planchent actuellement sur un rapprochement de l'imposition sur les bénéfices des sociétés. Les pays du Benelux devraient rejoindre l'initiative franco-allemande. C'est en tout cas le souhait formulé tout récemment par Didier Reynders, ministre des finances belge, dans une interview au quotidien Le Soir.

Commentaires 2
à écrit le 14/09/2011 à 13:45
Signaler
Le géant américain Unilever et des petites PME Comment croire à cet article quand on sait qu'UNILEVER n'est pas américain et que le sens de PME semble vous échapper.

à écrit le 14/09/2011 à 11:43
Signaler
Aaaah ! Les fameux prix de transfert ! Voilà un gisement de "fraude" fiscale auquel il faudrait s'attaquer ! Il y a des milliards à récupérer. Qui plus est ces recettes supplémentaires ne pèseraient ni sur les PME ni sur les salariés. En attendant, p...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.