LuxLeaks : Jean-Claude Juncker a-t-il menti aux députés européens ?

Selon l'hebdomadaire allemand Der Spiegel, Jean-Claude Juncker aurait eu connaissance d'une page supprimée d'un rapport de 1997 sur les "tax rulings." Or, le président de la Commission l'a nié devant les députés européens le 17 septembre.
Jean-Claude Juncker a-t-il dit la vérité aux Eurodéputés ?

Jean-Claude Juncker a-t-il menti devant les parlementaires européens ? La question est, en tout cas, posé ce lundi dans le magazine allemand Der Spiegel qui s'interroge sur les propos du président de la Commission devant la commission spéciale du parlement européen concernant les pratiques fiscales contestables du Luxembourg durant plusieurs années.

Un rapport auquel il manque une page...

Le nœud de cette affaire est un rapport datant de 1997, le « rapport Krecké » du nom d'un député social-chrétien, Jeannot Krecké, qui sera, de 2002 à 2012, ministre de l'Economie du premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker. Ce rapport portait sur la fraude fiscale au Luxembourg et avait été présenté au gouvernement du Grand-Duché, dirigé par Jean-Claude Juncker de 1995 à 2013. Selon Jeannot Krecké, le rapport publié et présenté comportait une page de moins par rapport à la version original. Cette page évoquait, affirme-t-il, les « tax rulings », autrement dit les accords secrets passés entre l'administration grand-ducale et les entreprises pour attirer ces dernières au Luxembourg, moyennant des avantages fiscaux. C'est la révélation de ces pratiques qui est à l'origine du scandale « Luxleaks » révélé l'an dernier.

Deux hommes, un menteur

Selon Jeannot Krecké, il n'existe que trois versions « originelles » du rapport. Il en détient une, le social-démocrate luxembourgeoise Lucien Lux en aurait une autre et la dernière aurait été en possession de Jean-Claude Juncker. Dans un mail envoyé au Spiegel, Jeannot Krecké réaffirme sa version : le président de la Commission européenne connaissait cette page ôtée du rapport. "Je peux confirmer qu'en avril 1997, j'ai transmis à Monsieur Juncker la version officielle ainsi qu'une version privée de mon rapport", écrit-il. Or, le 17 septembre, devant la Commission du parlement européen, Jean-Claude Juncker a affirmé qu'il n'avait jamais possédé la version originelle du rapport, mais aussi qu'il ignorait l'existence de cette page supprimée. Quelqu'un ment donc.

Pour ajouter encore à la confusion, Jeannot Krecké affirme avoir remis à Jean-Claude Juncker cette page lors de son audition du 17 septembre. Le problème, c'est qu'il a affirmé l'avoir remis avant l'audition dans une interview à Paperjam, un magazine luxembourgeois, alors qu'il a assuré l'avoir remis après au Spiegel. Finalement, il indique « ne pas très bien se souvenir » du moment de la remise. Mais il assure que, à présent, Jean-Claude Juncker est en possession du rapport complet.

On ignore toujours le contenu de cette fameuse page. Jeannot Krecké refuse d'en parler, estimant que ce n'est pas à lui de révéler ce contenu, mais à Jean-Claude Juncker. Une chose semble certaine : Jean-Claude Juncker n'a pas demandé la suppression de cette page, cette suppression ayant été à l'initiative de Jeannot Krecké lui-même. L'idée aurait pu être de ne pas dévoiler des pratiques qui ont duré jusqu'en 2010, alors qu'en 1997 déjà, le Grand-Duché tentait d'apparaître comme un adversaire de la concurrence fiscale dans l'UE.

Un mensonge pas si anodin

Cette affaire n'est pas sans conséquence. Si Jean-Claude Juncker a eu connaissance de cette page supprimée, il devait être pleinement conscient des pratiques de son pays sur le plan fiscal et, en tant que premier ministre, il les a couvertes par son silence et son inaction. Ceci serait donc contradictoire avec la défense de l'actuel président de la Commission qui a en quelque sorte, selon les propos d'un eurodéputé allemand, « rejeter la responsabilité sur l'administration fiscale. » Déjà, selon le Spiegel, plusieurs membres de la Commission parlementaire demandent à réentendre le président de la Commission. Ce doute se reporte également naturellement sur l'action actuelle de Jean-Claude Juncker. Le 17 septembre, le président de la Commission s'était présenté comme déterminé à lutter contre l'optimisation fiscale. Des propos qu'il avait déjà tenus en 1997 lorsqu'il était premier ministre luxembourgeois.

Jean-Claude Juncker, l'homme de la situation ?

Une nouvelle fois, cette affaire met en avant une évidence : l'ancien premier ministre du Luxembourg n'est sans doute pas l'homme le plus idoine pour lutter contre la concurrence fiscale au sein de l'UE. Sa bonne volonté et son action seront toujours entachées d'un doute. Or, cette question est un enjeu majeur : sans ces phénomènes de distorsions fiscales, la situation budgétaire des Etats membres - et donc leur politique économique - ne serait pas la même. Après ses sorties étranges lors d'un sommet cet été et son attitude contestable dans la crise grecque, le premier président de la Commission « élu » n'est pas actuellement au mieux de sa forme sur le plan politique.

Commentaires 14
à écrit le 04/10/2015 à 18:41
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Nous savions déjà que la zone est dirigé par celui qui a organisé, couvert et toléré un système maffieux de dissimulation des transactions financière - Clearstream - Jean Claude Junker est cette homme - comment le croire ?

à écrit le 30/09/2015 à 12:44
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Franchement qui peut sérieusement croire que Juncker n'était pas au courant? Pour moi il y a un mystère dans cette affaire: Pourquoi les autres pays Européens n'ont-ils pas tapé du poing sur la table alors que cette politique Luxembourgeoise leur fa...

à écrit le 29/09/2015 à 20:12
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Un banquier qui ment? ben c'est son métier non?

à écrit le 29/09/2015 à 16:51
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élu par qui?? cf l'upr, les gens de la commissions européenne ne sont élus par personne!!!

à écrit le 28/09/2015 à 18:45
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Romaric Godin a devancé Mediapart ? Bravo alors !

à écrit le 28/09/2015 à 18:15
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Qui peut sincèrement croire Juncker? Il suffit de regarder à qui profite le crime. Le rédacteur n'a aucun avantage à mentir. En tant que professionnel approché par le pouvoir pour rédiger des analyses et des synthèses, il a besoin d'être digne de c...

à écrit le 28/09/2015 à 17:16
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La Tribune pourrait-elle éviter de faire rédiger ses articles par des stagiaires ne maîtrisant pas encore l'orthographe ? Ca finit par porter atteinte à la qualité de ce journal...

à écrit le 28/09/2015 à 17:10
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Plutôt que de s'en apercevoir maintenant c'est au moment de sa désignation qu'il aurait fallu se poser la question. la Finance est tellement arrogante qu'elle fait fi de ce genre de considération et préfère avoir un fidèle serviteur à sa botte à la t...

à écrit le 28/09/2015 à 16:51
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Menteur ou incompétent juncker. il faut liquider cette Europe qui n'est qu'une escroquerie sur le dos des pauvres.

à écrit le 28/09/2015 à 15:24
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Qui peut croire une seconde que M. Junker et son gouvernement n'étaient pas au courant ? On est en train de parler d'arangements fiscaux entre plusieurs sociétés et l'état luxembourgeois. Page arrachée ou pas, Junker était au courant!

à écrit le 28/09/2015 à 14:29
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Juncker a t il menti ??? voilà une question qu'elle est bonne.....!! Franchement, qui connait un politicard qui ne ment pas ?? Dans ce monde ou tout est basé sur le mensonge, l'argent, la corruption, la triche, il serait très étonnant que ce Junck...

le 28/09/2015 à 15:30
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Je ne comprends pas votre fatalisme. Il ne faut pas abdiquer : ls tricheurs ne demandent que ça.

le 28/09/2015 à 21:14
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EXAT /JE N AURAIS PAS DIT MIEUX BRAVOS???

à écrit le 28/09/2015 à 14:24
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De cette classe politique plus proche des mafieux que des citoyens...

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