BCE : Le clan Merkel gagne la bataille de la petite phrase (mais pas la guerre)

L'Allemagne a obtenu la suppression dans le projet de communiqué final du sommet de la zone euro d'une phrase sonnant comme un appel à la BCE à poursuivre son aide à l'Italie et l'Espagne. Mais le prochain gouverneur de la BCE a fait savoir qu'il était prêt à poursuivre ces aides, compte tenu de la conjoncture.
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"Nous soutenons pleinement la BCE dans son action pour assurer la stabilité des prix en zone euro, y compris ses mesures non conventionnelles dans l'environnement de marché hors du commun actuel".

Voici la maudite phrase au coeur d'une petite bataille en coulisses entre les dirigeants de la zone euro. Cette phrase sonnerait comme un appel à l'aide des gouvernements auprès de la Banque centrale européenne, ce qui n'a pas plu à Angela Merkel. En effet, cette phrase a été perçue comme un appel du pied politique à la BCE sur la conduite à tenir, alors le respect de son indépendance est jugé primordial, en particulier par les allemands.

En langage feutré de banquier central, le terme de mesures "non conventionnelles" mentionné dans la phrase, renvoie en particulier à la politique menée par la BCE de rachat d'obligations des pays européens en difficulté. Depuis août, la BCE a réactivé ce programme de soutien, en l'étendant à l'Italie et à l'Espagne dans l'objectif de freiner la hausse des taux obligataires sur les marchés et leur permettre de continuer à emprunter à des conditions raisonnables.

Plusieurs pays, dont la France, mais aussi la Commission européenne, souhaitent que la BCE poursuive dans cette voie, lorsque l'Italien Mario Draghi remplacera Jean-Claude Trichet à la tête de la banque centrale début novembre. Toutefois, Angela Merkel avait besoin de ne pas froisser ses députés qui devaient voter aujourd'hui un mandat de négociations lors du sommet de la zone euro de ce soir. Le mandat a finalement été adopté par le Bundestag, mais exclut toute implication de la BCE dans le Fonds de secours pour les pays en difficulté, le FESF.

En revanche, selon l'une de sources diplomatiques, "ce n'est pas parce que la BCE ne participera pas au FESF, qu'elle ne pourra pas continuer à apporter son aide via des rachats d'obligations sur le marché".

Un coup d'épée dans l'eau ?

En dépit des réticences germaniques, Mario Draghi, le succésseur de Jean-Claude Trichet à la présidence de la BCE, s'est voulu rassurant. En conférence à Rome, l'ancien gouverneur de la Banque centrale d'italie a d'ores et déjà assuré qu'il se "tenait prêt" à poursuivre le Securities Market Program, le programme d'achat d'obligations souveraines de la BCE.

"L'Eurosystème est déterminé à prévenir les dysfonctionnements des marchés monétaires et financiers qui créent des obstacles aux mécanismes de transmission monétaires avec ses mesures non-conventionnelles" a déclaré Draghi. Ces mesures non-conventionnelles comprennent aussi la provision de liquidités illimités aux banques de la zone euro.

En d'autres termes, si la politique monétaire de la zone euro reste toujours indépendante du pouvoir politique sur le papier, elle n'en reste pas moins dictée par l'évolution des tensions des marchés et de la conjoncture économique.

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