Les scénarios noirs de la crise grecque

Si le FMI et les Etats suspendaient leur aide à la Grèce, on voit mal la BCE continuer à financer ses banques. Des décisions qui aboutiraient à la sortie du pays de la zone euro.
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Et si le FMI, lassé des faibles résultats du plan d'ajustement grec, décidait de suspendre son aide financière à Athènes ? Et si la très juridique Cour constitutionnelle de Karlsruhe, qui doit se prononcer ce mercredi sur la constitutionnalité du premier plan d'aide à la Grèce, bloquait le plan ou même venait à l'assortir de conditions telles qu'elles seraient refusées par le gouvernement grec ? Patrick Artus, chez Natixis, n'y croit pas car, dit-il, « plus aucun investisseur privé ne prêtant à la Grèce, elle n'aurait d'autre choix que de sortir de l'euro, avec des effets en chaîne incontrôlables. »

Pourtant, de moins en moins théorique, cette double hypothèse exige aujourd'hui que l'on s'y arrête : « La stratégie suivie depuis deux ans, et qui consiste à traiter un pays insolvable comme un pays pris dans une simple crise de liquidité pour gagner du temps, finit par coûter cher à tout le monde sans être d'aucun effet ni sur la Grèce, ni même sur les pays de la zone pris par la contagion, comme l'Italie », dit l'économiste Bruno Cavalier chez Oddo. Qui poursuit : « Tôt ou tard, il va nous falloir reconnaître publiquement son insolvabilité, et admettre une restructuration pleine et entière de sa dette publique, par une réduction du capital jusqu'à peut-être la moitié de sa valeur. » Ce changement de stratégie, qui coûterait près de 200 milliards d'euros à l'ensemble des créanciers publics (États et BCE) et privés (banques et compagnies d'assurance) de l'Etat grec, sur les 450 milliards de dettes (bonds et bills) en circulation qu'il compte aujourd'hui, contraindrait les Etats européens à s'accorder sur un partage des pertes. Mais ce défaut permettrait-il seulement d'éviter la sortie de la Grèce de l'euro, et par voie de contagion, l'éclatement de la monnaie unique ? Théoriquement, oui. Mais à y regarder de plus près, ce n'est pas si sûr, car la mécanique des enchaînements est redoutable.

« Les banques grecques sont trop fragiles pour résister à une restructuration massive de la dette publique, remarque Maurice de Boisséson chez Octo Finances. Leur refinancement dépend aujourd'hui intégralement de la BCE par le biais de l'escompte de dettes publiques ou privées. » Toute la question est de savoir jusqu'où, si le FMI et les États de la zone s'arrêtaient de prêter à la Grèce, la BCE accepterait de financer les banques grecques qui n'auraient plus de papiers à apporter à l'escompte ?

La directrice du Cepii, Agnès Benassy-Quéré, ne voit pas la BCE prendre le risque de faire éclater l'euro en coupant le refinancement des banques grecques. Mais aura-t-elle seulement le choix ? « À regarder de près le système de flux intra-eurosystème, dit Target 2 qui traite les transactions entre banques centrales nationales, on comprend qu'avec la crise, le financement de la BCE dépend désormais principalement de la Bundesbank, explique Maurice de Boisséson : à la fin 2010, 11 pays sur les 16 de la zone euro étaient endettés vis-à-vis de la BCE, à commencer par l'Irlande (145 milliards), la Grèce (90), le Portugal (60), l'Espagne (50) et même la France (28). Pour financer les banques centrales de ces Etats, la BCE s'est donc mécaniquement endettée à hauteur de 325 milliards d'euros auprès de la Bundesbank à fin 2010 (et sans doute plus aujourd'hui encore), soit quatre fois plus qu'en 2007...

C'est dire si l'ultime robinet qui alimenterait les banques grecques, donc l'Etat grec, est dans les mains des Allemands. « Je vois mal la Bundesbank continuer à financer indirectement la Banque centrale de Grèce si la Cour Constitutionnelle ou le parlement venaient un jour à bloquer le plan d'aide, dit Maurice de Boisséson. Tôt ou tard, elle finira par interdire à la BCE d'escompter le moindre papier en provenance des banques grecques.» Entraînant alors un enchaînement diabolique: «Les banques grecques qui ont besoin de plus en plus d'argent feraient instantanément faillite, et l'Etat ne parviendrait plus du tout à se financer. » Le prix à payer pour rester dans la zone euro... ?

La solution : le fédéralisme ?

Voilà qui reste à voir. Car, ajoute Maurice de Boisséson, « comment un leader politique peut-il soutenir devant son peuple le maintien de son pays dans une zone monétaire forte, si cela doit se payer d'une situation où l'État et les banques auraient sauté... » Reste alors, pour éviter la faillite des banques et de l'État, à sortir de l'euro, malgré tous les dégâts que cela occasionnerait : Athènes imposerait fissa à la Banque de Grèce de financer les banques commerciales pour maintenir leurs guichets et l'administration ouverts. Et la banque centrale grecque devrait émettre de la monnaie sans autorisation de la BCE, qui n'accepterait plus ses découverts et ne reconnaîtrait plus sa monnaie... Laquelle s'échangerait alors à sa valeur réelle, c'est-à-dire à une fraction de sa valeur actuelle. Peut-être un bon stimulant pour son économie. Mais ensuite, à qui le tour au sein de la zone euro ? On comprend que le scénario de la nouvelle saison de la crise grecque fasse dire à certains, dont Patrick Artus et Agnès Benassy-Quéré, que le fédéralisme budgétaire européen est bel et bien la seule vraie solution à la crise européenne. Et qu'il ira peut-être beaucoup plus vite que ce que l'on imagine aujourd'hui.

Commentaires 40
à écrit le 11/09/2011 à 23:28
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Pourquoi les pays europeens s'echinent-t-ils a vouloir aider la Grece qui a trafique ses chiffres pour joindre l'Europe ? Pourquoi en faire payer le prix a tous les autres pays ? Des taxes supplementaires sur les armateurs grecs ? pourquoi sur les fr...

à écrit le 11/09/2011 à 17:09
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la GRECE vient d'annoncer le prèlèvement d'une nouvelle taxe sur les propriétés immobilières . Difficile à croire, l'annoncer, c'est facile mais prélever l'impôt est ardu , d'autant plus que ce pays est en rupture avec toute fiscalité . Jamais l'Etat...

à écrit le 11/09/2011 à 16:02
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Tout ces mauvais chiffres ne laissent planer plus aucun doute. La Grèce sortira de l'euro et l'Euro chutera en entraînant tous les pays de l'Euroland vers la sortie.

à écrit le 08/09/2011 à 20:43
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jeudi 09 2011: Si on consulte les taux à 1 an, 2 ans et 10 ans (sce Bloomberg), on peut constater que les rendement suivants: Taux 1 ans : 95% ! soit un cours estimatif de 51%; Taux 2 ans : 55% ! soit un cours estimatif de 41%; Taux 10 ans: 20% soi...

à écrit le 07/09/2011 à 22:03
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Si nous voulons aider la Grèce et les autres pays en difficulté il faut leur permettre d'augmenter leur productivité et les y aider. L'austérité freine l'économie et par conséquent les rentées fiscales diminuent. La convergence des économies de la zo...

à écrit le 07/09/2011 à 20:08
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Si on consulte les taux à 1 an, 2 ans et 10 ans, on peut constater que les cours des obligations se rapprochent du '0.00%': Taux 1 ans : 96% Taux 2 ans : 55% Taux 10 ans: 20%

à écrit le 07/09/2011 à 15:43
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Les islandais intentent un procès à leurs dirigeants qui ont amené la faillite. Les citoyens européens sont dans la même situation que les islandais vis-à-vis de la dette résultant des négligences des dirigeants politiques. Nous devrions, comme les i...

le 11/09/2011 à 23:04
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et qui les a élu ???? les islandais, chacun a les hommes politiques qu'il mérite...... en version allemande, islandaise ou grecque à réfléchir au moment de mettre un bulletin dans l'urne

à écrit le 07/09/2011 à 15:05
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L?Europe se trouve devant la Grèce dans la situation d'un créancier contraint de continuer à financer son débiteur sous peine de tomber avec lui; c'est dire que c'est la Grèce qui nous tient, et non l'inverse. Dans ces conditions , on peut se demande...

à écrit le 07/09/2011 à 14:50
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"Le fédéralisme budgétaire européen"! Admirable euphémisme permettant à la Grèce de sortir de l'Euro tout en affectant y demeurer. Cette litote est-elle une invention de diplomate ou d'économiste ? Elle rejoint les "pronostics vitaux engagés" et autr...

à écrit le 07/09/2011 à 12:51
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viii c est tout simplement de l arnaque et les pigeons c est nous,,,,,,,,,,,

à écrit le 07/09/2011 à 12:02
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Ces questions ne devraient pas apparaître... Tout est de la faute à la démagogie politique qui préfère, comme le dit l'auteur, faire passer le pays comme étant en manque de cashflows plutôt qu'en défaut de paiement. Pluralisme au pouvoir, alternance ...

à écrit le 07/09/2011 à 11:44
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Excellent article, qui pose parfaitement la problématique. Nombre de nos politiques feraient bien de s'en inspirer ...

le 07/09/2011 à 15:53
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Nos politiques sont ailleurs... comment faire pour garder mon siège et les avantages qui vont avec, pour le reste ils s'en tapent apparemment. Tous debout ils disent en choeur "vive le prêt supplémentaire à la Grèce, vive la rigueur pour les cocho...

à écrit le 07/09/2011 à 11:11
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Je suis peut-être naïf mais si la Grèce rendait l'armement que les généraux on acheté à l'Allemagne et l'Allemagne rendait l'argent aux Grecques, je pense que la situation de la Grèce serait beaucoup plus facile. Quelqu'un y a-t-il déjà pensé?

à écrit le 07/09/2011 à 10:55
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C'est la meilleure chose ,qui puisse arrivée ,l'exclusion de la Grèce (etant donné tous ses mensonges pour intégrer la zone euro)Et il faut que cela est lieu tres rapidement ;et puis d'autres pays tels la Roumanie devrait suivre

à écrit le 07/09/2011 à 10:39
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un pays où la fraude fiscale est un sport national et le passage obligé pour la réussite sociale, n'a rien à faire dans la zone euro ! et je crois que ça devrait être valable pour tous : il y a 38 milliards d'? de placement grecs fraudant leur fisc e...

à écrit le 07/09/2011 à 10:23
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Les scénarios échafaudés comme le "rêve" de fédéralisme budgétaire sont bien jolis mais ils ont n'ont aucune chance de voir le jour. La réalité est que la dette grecque est hors de contrôle et que, selon l'adage, il vaut mieux se couper la main que l...

à écrit le 07/09/2011 à 10:21
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On fait un federation comme pour la yougoslavie ! Hmm sauver l'euro peut transformer l'Europe en boucherie....

à écrit le 07/09/2011 à 8:47
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C'est une perte de temps de vouloir continuer à aider ce beau pays. Mieux donc se séparer de lui et qu'on continuera de vivre notre pays riche et prospère.

le 07/09/2011 à 9:57
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beau pays ??? vous y avez ete quand pour la derniere fois ... j'ai jamais vu un pays aussi sale!!!!

à écrit le 07/09/2011 à 8:41
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la france devrait etre mise sous tutelle de l'allemagne avant la faillitte nous allons regretter que le passé l'histoire entre les deux pays

à écrit le 07/09/2011 à 8:29
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L'Europe a voulu s'agrandir pour être compétitive vis a vis des autres continents en profitant des bas salaires des pays qu'elle intégré idem pour l'Euro! Mais cela ne marche pas comme "certain" le voudrai!

le 07/09/2011 à 9:58
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on ne peut pas baisser les salaires et augementer le cout de la vie indefiniment ! a un moment qurelconque, il y aura cassure

à écrit le 07/09/2011 à 8:15
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C'est le fait que la Grèce ne soit pas sortie immédiatement de la zone Euro (dans laquelle elle n'aurait jamais dû pénétrer) qui va faire s'écrouler tout l'édifice. L'Europe a été construite comme un immeuble sans fondations. Les étages supérieurs s...

à écrit le 07/09/2011 à 8:02
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Avec la mondialisation nous sommes tous interdépendants ! MERKEL ne doit pas le savoir ?!.... Les grecs non plus ! La liste est longue !!!!

à écrit le 07/09/2011 à 7:51
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Le federalisme oui c'est une bonne idee...si c est bien fait, ca implique donc la fin de l unanimite pour la prise de decision.... et donc le vote a la majorite, en tenant compte du poid demographique et economique de chaque pays de la zone. Je m...

le 07/09/2011 à 8:43
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C'est un beau reve que vous faites ! J'en ai fait un similaire! Le réveil par contre .....

à écrit le 07/09/2011 à 7:25
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L'Allemagne pourrait annexer la Grèce pour faire partie de son territoire comme l'ex RDA, la Grèce serait un Land allemand.

le 07/09/2011 à 19:35
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les allemands ne seront pas d'accord mais on pourrait demander ça à la Turquie, ils ont l'expérience, puisque les grecs sont manifestement incapables de s'assumer.

à écrit le 07/09/2011 à 7:19
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« Reste alors, pour éviter la faillite des banques et de l'État, à sortir de l'euro, (...). Peut-être un bon stimulant pour son économie. » C'est ce que dit Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la République dit depuis le début de la crise gre...

à écrit le 07/09/2011 à 7:13
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je ne comprend pas pourquoi cela serait un drame que la grèce sorte de la zone euro! ça parait être la meilleur solution pour tout le monde y compris les grecs! quel effet de contagion? un pays ne peut plus respecter les critères de mastricht, il s'e...

le 07/09/2011 à 8:17
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Sauf que la grece, n'est pas le seul pays en difficulté ! Alors, par suite, le portugal, l'espagne, l'italie et MEME la FRANCE serait sans doute obligé de sortir !!!! Donc il y aurait un euro avec l'allemagne et les pays du nord! C'est a dire un De...

à écrit le 07/09/2011 à 7:01
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Fédéralisme budgétaire ? C'est encore une étape de la disparition des Etats Nations dans l'UE. Imaginez un peu on devrait tous devoir appliquer les règles budgétaires imposés par l'Etat fort financièrement c'est à dire l'Allemagne. Il faudrait de ce ...

le 07/09/2011 à 8:17
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C'est possible sous réserve de mettre des regle strictes suivies par tous sans exception culturelle!

à écrit le 07/09/2011 à 6:59
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Le fédéralisme ne ferait que de transférer le problème sans régler le problème d'un monde qui a pris l'habitude de vivre au dessus de ses moyens et qui manifestement n'a pas l'intention de changer. Pour ma part je n'ai pas de solutions sauf a imagin...

à écrit le 07/09/2011 à 6:39
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Il faut avaler la couleuvre: Irlande, Grèce et Portugal sont en défaut. L'Allemagne a déjà trop fait, et à l'impossible nul n'est tenu. Les politiques ont malheureusement confondu ce qui était souhaitable ou possible. On parle d'un scénario noir, mai...

à écrit le 07/09/2011 à 6:38
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Il serait interessant à la faveur de cette crise de la Grèce qui est indirectement celle de l'euro de retrouver toutes ces déclarations de la fin des années 90 et début 2000 qui annonçaient l'avènement de l'euro comme le début d'une période de prospé...

le 07/09/2011 à 7:28
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euh vous vous trompez ce n est pas la crise de l euro, l'euro etait et reste un merveilleux outil, mais on est pas allé assez loin et on est reste trop laxiste.... On aurait du exiger plus des pays, on oublie trop souvent certains aspects de la cr...

le 07/09/2011 à 13:29
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Dans l'europe d'origine il y avait l'Italie

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