Hongkong : "La Chine n'a pas intérêt à utiliser la force"

La Tribune confronte deux points de vue d'experts, Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l'Iris, et Pierre-Picquard, docteur en géo-politique et conférencier, sur le mouvement pro-démocratie qui agite la région administrative spéciale de la République populaire de Chine depuis dix jours.
"On aurait pu s'attendre à un accueil positif par la population hongkongaise de l'instauration du suffrage universel en 2017, d'autant plus qu'en termes de libertés individuelles le territoire reste privilégié par rapport au reste du continent", indique Pierre Picquard, docteur en géo-politique.

Lancé le 22 septembre, le mouvement pro-démocratie mené par les étudiants à Hongkong, région administrative spéciale de la République populaire de Chine, ne s'est pas depuis éteint. Au contraire, la tension est brusquement montée jeudi 1er octobre au soir, rapporte l'AFP: aux leaders étudiants de la "révolution des parapluies" (dont ils se sont servi pour se protéger des gaz au poivre utilisés par la police pour les disperser) qui exigent la démission du chef de l'exécutif avant minuit, le gouvernement a répondu en lançant un appel ferme à la fin du mouvement, alors que la police transportait des caisses de balles en caoutchouc.

Entretemps, en France, l'interprétation de ce soulèvement n'est pas unanime. La Tribune confronte les points de vue de deux experts: Jean-Vincent Brisset, directeur de recherche à l'Iris, et Pierre Picquard, docteur en géo-politique et conférencier.

La Tribune: Comment en est-on arrivé là?

Jean-Vincent Brisset.  "Malgré les promesses formulées par Pékin lors de la rétrocession d'Hongkong par le Royaume-Uni à la Chine, en 1997, les Hongkongais ont subi depuis - dans les faits plus que dans les textes - une restriction progressive de leurs libertés. Ils éprouvent aujourd'hui un sentiment d'étouffement. Si, depuis l'époque de Deng Xiaoping (qui a dirigé le pays de 1978 à 1992: NDLR), la Chine reconnaît sans doute plus d'autonomie à ses diverses régions, on sait bien que la fiabilité de Pékin est relative. A cela s'ajoute, sur le plan socio-économique, la perte progressive de la part d'activité du port de Hongkong, de son rôle de pivot des exportations, le continent - où les biens sont fabriqués - ayant acquis la capacité technique de les exporter sans passer par lui".

Pierre Picquard.  "Même si, après la rétrocession à la Chine, la région administrative spéciale de Hongkong a conservé une monnaie et un système juridique spécifiques, hérités du protectorat britannique, jusqu'à présent la population hongkongaise n'a jamais élu directement son gouvernement. En approuvant l'instauration d'un suffrage universel à Hongkong en 2017, le Parlement chinois a ainsi réalisé une grande avancée, surtout si l'on considère qu'il n'était en rien lié, juridiquement, à d'éventuelles promesses formulées vis-à-vis des Britanniques, puisque Hongkong est aujourd'hui soumis à la souveraineté chinoise. Une seule limite a été posée par Pékin: que les candidats soient choisis par un comité local, qui existe depuis la domination britannique. On aurait donc pu plutôt s'attendre à un accueil positif de cette mesure par la population, d'autant plus qu'en termes de libertés individuelles le territoire reste privilégié par rapport au reste du continent. Or, on assiste au contraire à une protestation, dont le caractère très structuré laisse douter de sa spontanéité et oblige à s'interroger sur ses réelles sources. Ceci est d'autant plus surprenant que Hongkong, qui, sous le Royaume Uni, était déjà une place économique et financière puissante, tire aujourd'hui de nouveaux et importants profits de la croissance et de la dynamique chinoise".

LT. Que peut faire le gouvernement chinois pour enrayer le mouvement?

JVB. "10% de la population d'Hongkong est étrangère, provenant essentiellement des Philippines mais aussi dans une large proportion de l'Occident. Ceci constitue pour Pékin le principal obstacle à l'utilisation de la force. Mais les intimidations, la déconsidération, la désinformation restent des armes considérables dans les mains du gouvernement".

PP. "Engagée dans un processus de réformes, la Chine n'a aujourd'hui pas intérêt, en termes d'images, à utiliser la force: la dimension symbolique revêtue par Hongkong est trop puissante. Si elle pourrait certes intervenir en cas de dérives, elle semble préférer laisser les autorités locales gérer le conflit. Celles-ci, craignant une déstabilisation, ne laisseront toutefois pas perdurer l'anarchie."

LT. Que dire des réactions de la communauté internationale?

JVB. "Si certains pays tels que la Grande-Bretagne, le Royaume-Uni et le Japon ont déjà eu le courage de taper sur la table, ce ne sera sans doute pas le cas de la France".

P.P. "La montée en puissance de certaines prises de position en Occident risque seulement d'exacerber le nationalisme qui commence à se manifester en Chine. Le point de vue occidental n'est en effet pas forcément partagé par le grand public chinois qui, à  97%, soutient son gouvernement".

Commentaires 18
à écrit le 03/10/2014 à 13:13
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On en a un peu marre des "revolutions" suscitées par l'Occident dans le but de déstabiliser les pays émergeants ! J'espère que la Chine sera aussi ferme avec les nations ingérentes que l'Amérique Latine l'a été en appuyant unanimement le gouvernment ...

le 03/10/2014 à 13:58
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Oulà vous vous êtes resté coincé en 1962...Donc en faites pour vous les chinois sont trop bêtes pour demander de leur prore chef un peu plus de démocratie ? Merci pour eux.

le 04/10/2014 à 0:14
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Pour certaines officines et la communication US en effet les peuples doivent etre assister afin de se "libérer" de gouvernements oppresseurs. En ce qui concerne Hong Kong lorsque la presse parle des "Hong Kongais" "contre Pékin" pour parler des manif...

le 04/10/2014 à 17:20
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Non Chich c'est vous qui me paraît à côté de la plaque, la dernière "révolution colorée" perpetrée par les américains (avec l'aide de Barroso et de l'UE) c'était en Europe, en février 2014, à Kiev à la place Maïdan. Renseignez-vous d'abord.

à écrit le 03/10/2014 à 11:17
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La Chine a clairement annoncé ses projets de représenter une force qui compte ces dernières années. Et comme elle l'a déjà démontré, elle ne s'embarrasse pas spécialement de détails lorsqu'il y a quelques oppositions. Il est donc fort probable qu'apr...

à écrit le 03/10/2014 à 11:17
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Saviez-vous qu'il y a plus de français à HK que d'anglais.... depuis cette année, et oui nos têtes bien remplies ont bien compris qu'ils n'ont pas d'avenir en France ! Et sur les ferries j'en croie pas mes oreilles. Bon la grosse affaire de ces mani...

le 03/10/2014 à 12:19
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250 000 Brits. moins de 20 000 frenchies. plus de 100 000 cerveaux quittent le UK par an. ils vont notamment à HK.

à écrit le 03/10/2014 à 10:43
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quand hong kong etait sous la domination anglaise quelle genre de democratie existait les chinois avaient ils le droit de vote? pouvaient ils choisir le gouverneur? il est à remarquer que les etats qui pretendent defendre la democratie sont ceux qui ...

à écrit le 03/10/2014 à 9:33
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Encore un "Maïdan" ? décidément la CIA ne chôme pas à ce moment, elle attaque sur tous les fronts (Kiev, Hong-Kong, Caracas, Brésil…). on se demande si une fois "réglées" toutes ces affaires dans le monde, la CIA ne viendra pas créer ses "révolutions...

à écrit le 03/10/2014 à 9:06
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Arretons de simulacra. Personne n'a les moyens de tenir tete a la chine. GB first, qui d'ailleurs l'a bien compris et ne fait rien. En clair, qd Pekin decider la fin des protestations elles s'arreteront. Esperons Simplement que les jeunes manifestant...

à écrit le 02/10/2014 à 19:03
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Il faut dire que beaucoup des journalistes occidentaux et surtout français ne parlent que des manifestants pro démocratiques alors qu' ils restent silencieux vis-à-vis des chinois qui ne sont pas d'accord de copier la démocratie occidentale. Et moi e...

le 03/10/2014 à 6:14
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Tiens? L'ambassade de Chine Pop est encore ouverte a 19:03? Et apparemment elle a des conférenciers français dans sa poche aussi...

le 03/10/2014 à 9:34
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il s'agit de l'agence de presse Xinhua a priori, étant donné le pseudo.

le 03/10/2014 à 10:58
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"Les chinois n'ont jamais imposé leurs valeurs aux autres" Les habitants du reste de l'Asie apprécieront cette remarque... "Et moi et mes amis chinois" Sept cent millions de chinois Et moi, et moi, et moi Avec ma vie, mon petit chez-moi Mon ...

le 03/10/2014 à 12:39
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Aux commentateurs d'afp : vous feriez mieux de lire l'histoire et la guerre de l'Opium, vous comprendriez pourquoi les chinois ont une dents contre les occidentaux et que ça va mal se passer pour nous dans très peu de temps.

le 03/10/2014 à 12:42
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Nos amis chinois « afp » seraient inspirés de prendre connaissances des répressions massives qui se passent au Xinjiang et au Tibet, des révoltes dans le campagnes Chinoises. Le gouvernement Chinois a complètement muselé l’information et Internet est...

le 03/10/2014 à 15:03
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Vous donnez des leçons aux chinois sur le Tibet chinois et Xinjiang chinois comme des hypocrites et des pompiers pyromans. Vous oubliez des génocides des peuples indiens, des aborigenes, des noirs, des Kanaks, des polynésiens et vous volez leurs terr...

le 03/10/2014 à 16:56
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Personne n'a dit que la France était exempte de défaut… Il y a beaucoup d'aspects à améliorer en France également. Mais c'est justement parce que nous sommes en capacité de l'exprimer que nous pouvons améliorer les choses et éviter que cela se repro...

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