Le parti anti-euro allemand rêve encore de siéger au Bundestag

Alternative für Deutschland est très près des 5 % nécessaires à l'entrée au Bundestag. Et Bernd Lucke, son chef, veut encore y croire.

Dimanche soir, devant la porte de Brandebourg, à Berlin. Un homme est juché sur un camion de pompier vieux style. Il crie : « C'est le plus grand incendie monétaire depuis l'inflation de 1923 ! », puis il sort un (faux) billet de 500 euros et y met symboliquement le feu sous les hourras de 200 de ses partisans réunis devant le monument le plus célèbre de la capitale allemande. Cet homme, c'est Bernd Lucke, professeur de macro-économie à l'université de Hambourg et fondateur du parti anti-euro Alternative für Deutschland (AfD).

En deçà des 5 %

AfD aborde la dernière ligne droite de la campagne électorale allemande avec détermination. Mais aussi avec beaucoup de déception. Bernd Lucke voulait bousculer les partis traditionnels, s'imposer avec éclat au Bundestag. Il s'appuyait sur des sondages triomphants qui, au printemps, assuraient qu'un quart des électeurs pouvaient envisager de voter pour son parti. En réalité, il n'en a rien été. AfD n'a jamais été donné par les enquêtes d'opinion au-dessus des 5 % nécessaires à l'entrée au Bundestag. Il reste un parti de deuxième ordre dont la survie sera bien difficile sans députés dimanche prochain.

Pourquoi ce semi-échec ?

Les raisons de cette déception ne manquent pas. Dans une Allemagne qui redoute les aventures, la sortie du pays de l'euro ou du moins la création d'un « euro du nord » est un pari peut-être un peu trop risqué. D'autant que la majorité des électeurs pensent que la politique européenne d'Angela Merkel a réussi à défendre les intérêts de l'Allemagne, alors que la situation semble stabilisée. Et puis, il y a les incertitudes du programme d'AfD. « On comprend bien contre quoi et contre qui se bat le parti, mais on a plus de peine à saisir quelle alternative ils proposent », remarque ainsi Ursula Münch, directrice de l'Institut de Sciences Politique de Tutzing, en Bavière.

Programme flou et baroque

Difficile ainsi de comprendre comment AfD compte organiser la sortie de l'Allemagne de la zone euro, ou si ce parti ne veut en fait qu'exclure les pays périphériques de l'UEM (mais alors lesquels ?). Bref, au-delà des slogans, le parti manque de chair. Comme le remarquait l'hebdomadaire Wirtschaftswoche de la semaine dernière, « le programme de politique étrangère de l'AfD est comique et celui sur l'éducation ressemble au programme de la CDU en 1965. » AfD a également souffert d'une mauvaise image qui en a fait un parti proche de l'extrême-droite.

AfD a encore une chance d'entrer au Bundestag

Reste que rien n'est joué. Les sondages donnent AfD entre 3 % et 4 % des voix. Mais la tendance est plutôt haussière depuis le début du mois d'août. Et la possibilité d'une entrée de ce parti au Bundestag ne peut pas être exclue. Bernd Lucke y croit dur comme fer. Il a prétendu que les chiffres des instituts de sondages étaient « manipulés » dans l'intérêt des grands partis. « Plusieurs employés des instituts m'ont garanti que les chiffres bruts plaçaient AfD largement au-dessus des 5 % », a-t-il affirmé avant d'être contraint au silence sur le sujet par un tribunal de Cologne.

Vers une alliance avec la CDU ?

Si, dimanche soir, AfD réussit son pari, ce serait la première entrée d'une nouvelle formation au Bundestag depuis la réunification. Ce serait surtout une très mauvaise nouvelle pour Angela Merkel, car les électeurs du parti anti-euro sont, à n'en pas douter une grande partie des électeurs de sa formation ou de son allié libéral. Pourrait-elle envisager une alliance avec AfD ? La chancelière n'a pas cité ce nouveau venu de la politique au cours de la campagne, mais les principaux leaders de la CDU ont exclu toute coalition avec le parti de Bernd Lucke qui, de son côté, ne veut pas transiger sur son programme. Il est vrai que la devise de la chancelière : « sauver l'euro à tout prix » n'est pas très cohérent avec les prises de position d'AfD. Concrètement, la seule conséquence de l'entrée d'AfD au Bundestag sera d'accélérer l'alliance pro-euro de la CDU et de la SPD. Autrement dit, une grande coalition.

Commentaire 1
à écrit le 17/09/2013 à 18:20
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Lorsque les médias jouent les entremetteurs politiques, cela donne des sondages en masse tous aussi pipés les uns que les autres. Souvenez-vous du 21 avril 2002...

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