"Les infiltrés", faux bons et vrais méchants

"Les infiltrés", un excellent polar de Martin Scorsese situé dans la mafia irlandaise de Boston. Servi par un trio d'acteurs de très grande classe: Jack Nicholson en parrain, Matt Damon et Leonardo Di Caprio en jeunes flics servant de taupes.

Martin Scorsese revient très en forme avec ce polar sur la mafia irlandaise de Boston où personne, ni flics ni voyous, ne joue franc jeu. Et où le bon garçon s'avère un malfrat et vice-versa. Mené à un rythme d'enfer, sur une musique trépidante, le film prouve que le réalisateur italo-américain n'a pas perdu la main et qu'il manie avec maestria son cocktail de violence, de corruption, de drame intime et d'humour.

Délaissant sa ville New York et la maffia italienne, il retrouve la veine des grands films de gangsters qui jalonnent sa carrière, de "Mean Streets" aux "Affranchis" (1990). En fait, le film est inspiré d'un thriller hong-kongais, "Infernal affairs", phénoménal succès en Asie en 2002. Mais beaucoup plus fouillé qu'un simple remake, "Les infiltrés" - co-produit par Brad Pitt - met l'accent sur la psychologie des personnages et creuse la question de la perte d'identité pour des "taupes" en mission dans un milieu étranger.

Deux générations de stars d'Hollywood composent un trio d'acteurs exceptionnels, dans des registres très différents. Au centre du film et de la mafia irlandaise de Boston, il y a le parrain, Frank Costello, joué par un Jack Nicholson vibrionnant. Cet individu cynique, sadique et ultra-violent règne sans partage sur les bas-fonds de Boston. Incontesté, jamais inquiété par la police qui ne parvient pas à le coincer, Costello exige de ses hommes de main et de ses maîtresses une soumission d'esclaves. Entre autres businesses, il vend à des mafieux chinois des microprocesseurs de missiles hypersophistiqués, "capables de rentrer dans le cul d'un chameau" , dit-il pour vanter la marchandise!

Sans enfants ni attache, le parrain a pris sous son aile Colin Sullivan, joué par l'impeccable Matt Damon. Il a assuré l'éducation de ce gamin irlandais orphelin, non par pure charité mais pour l'envoyer faire le sous-marin dans l'unité des Enquêtes spéciales de la police chargée de le traquer. Brillant élève officier, Collin voit ses rêves d'ascension sociale se réaliser en grimpant quatre à quatre les échelons de la hiérarchie dans la police. Mais la success story s'arrête là et le gendre idéal a ses failles. C'est ce que révèle sa petite amie, la psy de service (Vera Farmiga, seule femme dans ce film d'hommes). Beau gosse et beau parleur, il l'a conquise facilement mais, selon elle, au lit, il est beaucoup moins brillant. Tendance gay ou impuissance sexuelle passagère? Mystère! Mais le personnage prend soudain une épaisseur qu'il n'avait pas au début.

C'est tout l'inverse pour l'infiltré symétrique qu'est Billy Costigan, incarné par Leonardo di Caprio, bouleversant en fils de malfrat qui veut à tout prix s'extirper de son milieu. Issu de la même école de police que Collin, Billy a beaucoup de mal à gérer le boulot particulièrement dangereux que ses supérieurs lui ont confié pour faire ses preuves: faire la taupe dans le gang de Costello. Lequel se doute de quelque chose et surveille comme le lait sur le feu cette recrue qu'il soupçonne d'être un "rat". S'il n'a pas de problèmes sexuels et s'il est très performant, lui, avec la même psy (décidément très vorace), Billy n'en a pas moins de graves difficultés et carbure au valium. Il sera d'ailleurs le premier perdant dans ce jeu de rôles hyper-dangereux.

Mais, comme dans tout film noir qui se respecte, il n'y aura aucun gagnant dans ce film où les cadavres se ramassent à la pelle au terme de courses poursuites haletantes qui débouchent toutes sur la mort.

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