Polémique de plus en plus vive autour des indemnités de Noël Forgeard

Plus de 8 millions d'euros d'indemnités ont été versés à l'ancien co-président d'EADS lors de sa démission en 2006. Des sommes jugées "scandaleuses" et "injustifiées" par les syndicats et de nombreux candidats à l'élection présidentielle. Ségolène Royal demande l'annulation du plan de restructuration d'Airbus.

Polémique après l'annonce mardi du montant des indemnités de départ accordées à l'ancien co-président d'EADS, Noël Forgeard, pour plus de 8 millions d'euros. Alors que le groupe européen d'aéronautique s'apprête à lancer son plan de restructuration Power 8 qui prévoit la suppression de 10.000 emplois en Europe, le "parachute doré" dont a bénéficié l'ex-patron suscite ce mercredi des réactions indignées de la part des syndicats et de certains candidats à l'élection présidentielle.

Dans un document adressé mardi aux actionnaires par le conseil d'EADS en vue de l'Assemblée Générale du 4 mai, il est précisé que l'ancien président d'Airbus a perçu lors de son départ en juillet 2006 six mois de préavis, soit 1.223.317 euros et des indemnités de départ de 4.893.268 euros. A ces sommes s'ajoute, depuis le début de l'année, une indemnité de non-concurrence de deux ans qui représente un montant brut mensuel de 101.917 euros, soit un total de 2.444.008 euros.

Des sommes d'autant moins bien acceptées que Noël Forgeard avait dû démissionner un an après sa prise de fonction en raison des retards dans la livraison de l'Airbus A380. L'ancien dirigeant est aussi au coeur d'un scandale né de l'exercice de ses stocks options peu avant l'annonce des retards. Cette opération lui avait rapporté une plus-value de quelque 2,5 millions d'euros.

Au sein du groupe européen, les réactions sont vives. Les principaux syndicats d'Airbus estiment "scandaleux" et "choquant" le montant des indemnités versées à Noël Forgeard, alors même que les salariés de l'entreprise doivent affronter des suppressions de postes. "Alors qu'on fait un plan de restructuration, les actionnaires ont accepté les conditions négociées par Forgeard. J'ai du mal à comprendre que d'un côté on parle d'économies et que de l'autre côté on accepte ses conditions", a ainsi déclaré mercredi à l'AFP Jean-François Knepper, délégué syndical FO et vice-président du comité européen d'Airbus.

Bernard Van Craeynest, le président de la CFE-CGC, deuxième syndicat d'Airbus a quant à lui déploré le versement d'une "prime à l'incompétence", à l'origine d'un "fossé" croissant entre certains dirigeants et l'ensemble des salariés.

A moins de quinze jours de l'élection présidentielle, la polémique est également reprise par certains candidats à l'Elysée. Ségolène Royal a dénoncé ce mercredi un "scandale" et une "provocation", demandant "aux dirigeants d'Airbus de retirer la totalité du plan" Power 8 pour mettre à plat "la façon dont sont justifiées les suppressions d'emplois." La candidate socialiste à l'élection présidentielle a promis, si elle était élue, que "l'Etat mettra en place de vraies politiques industrielles et ne tolèrera pas que des dirigeants qui ont échoué partent avec la caisse tandis que des salariés, eux, paient les pots cassés".

François Bayrou, en campagne électorale à Tours, s'est lui prononcé sur l'adoption d'une "loi de moralisation de la vie économique", censée mettre fin à "des dérives difficilement acceptables". Selon le candidat de l'UDF, cette loi "obligera à ce que ces avantages soient décidés en assemblée générale de manière à ce que tout le monde en soit informé".

Un encadrement législatif également proposé par le candidat altermondialiste José Bové, qui préconise la création d'une "commission d'enquête parlementaire sur les patrons voyous".

Autre réaction politique: celle du candidat de la LCR à la présidentielle Olivier Besancenot qui a jugé le montant des indemnités versées à l'ex-PDG d'Airbus "stupéfiant" et "inadmissible", réclamant "une autre répartition des richesses", notamment pour augmenter les salaires.

Frédéric Nihous, candidat de Chasse Pêche Nature et Tradition a pour sa part jugé sur France Inter "particulièrement choquant" le montant des indemnités versées à Noël Forgeard, dénonçant des "grosses primes qui ne se justifient pas du tout".

Ces réactions font suite à celle de Marie-George Buffet, candidate PCF à l'Elysée, qui a fustigé mardi dans un communiqué la "prime au mauvais patron", se demandant "comment une société peut accorder une telle prime à un patron dont tout le monde s'accorde sur la désastreuse gestion, alors que dans le même temps, les salariés qui ont créé les richesses se voient contraints à un plan social".

Auparavant, le secrétaire général de Force Ouvrière, Jean-Claude Mailly, avait déclaré vendredi dans un entretien sur BFM TV que Noël Forgeard avait "une part de responsabilité" dans les difficultés actuelles d'EADS. Revenant plus généralement sur le cas des indemnités de départ accordées aux anciens PDG, il a déploré l'absence de contrôle moral et politique sur de tels niveaux de rémunération.


Serge Tchuruk a touché 8,2 millions d'euros en 2006
L'ancien président d'Alcatel, devenu président du conseil d'administration d'Alcatel-Lucent, a touché une indemnité de départ de ses fonctions exécutives de 5,7 millions d'euros en 2006, à laquelle il faut ajouter une rémunération de 1,4 million d'euros de salaire fixe et 1,1 million d'euros de part variable. Il dispose de plus de 236.000 actions Alcatel-Lucent d'une valeur de près de 2,1 millions d'euros. L'ex-patron bénéficie des termes du contrat signé avec Alcatel à son arrivée en 1995 à la tête de l'entreprise. En onze ans, l'action Alcatel a cependant perdu près 30% de sa valeur.

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