La Nouvelle Irlande à Paris

Cette île du Pacifique présente une grande diversité de pratiques rituelles. L'art y est partout. Une visite s'impose au Musée du Quai Branly.

D'emblée, le visiteur est séduit, car le cadre de cette remarquable exposition est bâti comme un pendant du musée du Quai Branly lui-même, avec un souci de complémentarité que l'on retrouve dans les tonalités, les aspérités, les boîtes, les treillages et la lumière.

Séduit également, le visiteur l'est par les 138 pièces mises en valeur selon une scénographie élégante, présentées selon un parcours géographique allant du Sud au Nord de la Nouvelle Irlande. Cette île, qui s'étire sur une bande de 470 kilomètres de long et à peine une dizaine de large au Nord-Est de la Nouvelle Guinée, dans le Pacifique au large de l'Australie, est forte d'une trentaine de groupes linguistes dont beaucoup de représentants sont de réels artistes.

Dans l'art de la Nouvelle Irlande, ce sont les signes, les images, les statues, les représentations qui relient les vivants aux morts, deux mondes qui se côtoient en permanence, notamment lors des innombrables cérémonies, en particulier funéraires. C'est l'occasion pour les artistes d'exprimer leurs talents, mais sans jamais représenter l'ancêtre vénéré: il s'agit de présenter le défunt - et ses manifestations - aux humains. Les sculptures "Malagan" sont les plus connues: elles ont constituées d'un lacis de formes colorées - rouge, noir, ocre, blanc - en une imbrication de signes et d'évocations. Celles exposées ici, surtout dans la deuxième partie, sont remarquables de finesse, d'ironie et d'intelligence: sculptures anthropomorphes, frises horizontales, immenses poteaux verticaux, masques puissants, objets de vannerie.

Le matériau est caractéristique de l'art mélanésien car il utilise les éléments naturels alentour, bois, plumes, feuilles, lichens, fougères, algues, coquillages qui donnent à l'ensemble un effet visuel toujours troublant, plein d'émotion. Une fois les cérémonies terminées, ces sculptures qui ont demandé temps et patience, n'ont plus d'efficacité: elles ont détruites... ou désormais vendues à des marchands d'art, à prix de plus en plus élevés. Les objets exposés ici datent d'avant la Grande guerre et proviennent tous de musées, principalement allemands, car la Nouvelle Irlande a longtemps été colonie germanique.

La première partie de l'exposition présente d'étonnants masques du Sud de l'île, Lorr et Kipong , des objets du rite secret Tubuan, des figures lapidaires, des portraits d'ancêtres et des masques en bois. Suivent venant du Nord, des Uli, rares figures à la fois masculines et féminines, des ornements de bouche et des crânes sur modelés. La société mélanésienne est marquée par la matrilinéarité, les hommes travaillant par exemple sur les terres qui appartiennent aux clans de leurs femmes. D'où nombre de rituels liés à l'importance de l'épouse et du mariage.
Cette exposition est donc un formidable voyage au coeur d'une civilisation riche en découvertes, artistiques, mais surtout humaines.

"Nouvelle Irlande, Arts du Pacifique sud", Musée du Quai Branly, jusqu'au 8 juillet, renseignements: 01 56 61 70 00 et www.quaibranly.fr

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