PS et majorité s'affrontent autour des "classes moyennes"

Le Premier secrétaire du Parti Socialiste François Hollande et le ministre du Budget Jean-François Copé se crêpent le chignon sur le concept de classe moyenne. Pour ce dernier, les Français qui gagnent plus de 4.000 euros nets par mois visés par les hausses d'impôts proposées par le PS sont, "bien sûr", dans la classe moyenne.

Qui fait partie de la classe moyenne? François Hollande a involontairement relancé le débat en annonçant que si la gauche revenait au pouvoir, elle supprimerait les baisses d'impôt qui ont été accordées "aux plus privilégiés", c'est-à-dire, selon lui, les contribuables gagnant plus de 4.000 euros nets par mois. Mais pour Jean-François Copé, cela revient à s'attaquer aux "classes moyennes". Les Français qui gagnent plus de 4.000 euros nets par mois sont, "bien sûr", dans la classe moyenne, a-t-il lancé sur France Info.

"A gauche, on est spécialisé dans l'idée depuis 200 ans de penser que l'alpha et l'oméga d'un débat moderne consiste à pointer du doigt les soi-disant riches", s'est emporté Jean-François Copé. "Aujourd'hui en 2006, un professeur certifié en fin de carrière, ça gagne à peu près 4.100 euros par mois. Un informaticien après dix ans d'expérience, un conducteur de TGV en fin de carrière, un VRP, ça gagne aussi entre 4.000 et 4.200 euros par mois. Cela veut dire qu'on va demander à toute une frange de nos concitoyens qui gagnent effectivement quatre fois plus que le Smic et au-delà, de voir leurs impôts augmenter", a-t-il dit.

Fait on pour autant partie de la classe moyenne lorsqu'on gagne 4.000 euros net par mois? Il est beaucoup plus facile de poser la question que d'y répondre. Le concept de "classe moyenne est extrêmement flou", explique Maxime Parodi, sociologue à l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). "Le concept s'est développé en réaction à la conception marxiste et relativement figée de la société opposant les ouvriers qui n'ont que leur force de travail à offrir et la classe dirigeante et capitaliste. La classe moyenne se définissait alors comme la classe intermédiaire entre ces deux classes témoignant de l'existence d'une certaine mobilité sociale".

Le concept de classe moyenne se laisse difficilement cantonner dans une définition financière. Autant il existe un certain consensus sur le fait qu'un individu est pauvre dès lors que son revenu est inférieur de 40% au revenu médian, autant il n'existe pas de critère clair pour dire qui est un riche et qui ne l'est pas. Une chose est sûre en tout cas, Jean-François Copé à une vision extrêmement large de la classe moyenne. Si l'on retient que 4000 euros net par mois et par individu est le seuil maximum définissant l'appartenance à la classe moyenne cela revient à dire que tous les Français aisés font partie de la classe moyenne à l'exception des 1% les plus riches!

Explication: pour faire partie des 10% des foyers les mieux lotis de France (soit 3,2 millions de foyers sur 32 millions), il faut déclarer plus de 39.941 euros de revenus annuels, soit moins de 3.553 euros par mois, selon l'économiste Thomas Piketty (Les hauts revenus en France au XXème siècle, Inégalités et redistributions, Grasset, 2001). Et, pour accéder au cercle des 1% des foyers les mieux lotis (320.000 foyers) il est nécessaire de dépasser 89.792 euros de revenus annuels soit 7.470 euros nets par mois, soit un peu moins de deux salaires de 4.000 euros net.

"Personne ne s'est jamais risqué à établir une limite supérieure à la classe moyenne, mais aucun sociologue n'aurait osé la fixer à 4.000 euros net dans le cadre d'un colloque sur les classes moyennes", s'amuse Maxime Parodi.

Pour Thomas Piketty, "les classes moyennes se définissent d'abord par le fait qu'elles vivent principalement de leur travail, de la même façon que l'immense majorité de la population, par opposition aux +200 familles+ et aux détenteurs de gros patrimoine". Or, note l'économiste, la première moitié des foyers appartenant à au décile supérieur (les 10% les plus riches) perçoivent près de 90% de leur revenus sous forme de revenus du travail. De ce point de vue, ils ne se distinguent guère des 90% des Français gagnant moins qu'eux mais qui tirent l'essentiel de leurs revenus du travail.

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