Métiers du contenu Web (3/3) : la data

Pas de data, pas de contenu. Nous aurions donc dû débuter notre saga des métiers du contenu Web par les pros de la data ? Oui, non, ces métiers sont si liés entre eux qu’on peut faire l’économie d’un débat. Dans ce domaine, la rapidité des évolutions est telle que ce dernier épisode n’est qu’une fin provisoire.
(Crédits : Jerlaure)

Comprendre l'ampleur du phénomène big data en une phrase du président de Google Eric Schmidt : « Tous les deux jours, nous produisons autant d'informations que nous en avons généré depuis l'aube des civilisations jusqu'en 2003. » GoogleAppleFacebookAmazon ont bâti leur business model sur la récupération et la valorisation de données aujourd'hui astronomiques. La data produit de l'information, aussi ne crée-t-on pas de contenu sans avoir réfléchi à la question des données en amont. Le volume, la vitesse, la variété et la véracité des données sont les quatre V du big data qui complexifient le travail. D'ici à cinq ans, la filière pourrait créer 10 000 emplois directs selon l'Afdel (Association française des éditeurs de logiciels).

 

« La notion de contenu Web s'est extrapolée, ce n'est plus seulement du SEO et de l'éditorial, cela touche de très près le big data. Si l'on aime les chiffres, les nouvelles technos et que l'on est capable de s'intéresser au marketing, il y a dans ce domaine de très belles opportunités à prendre sur des métiers émergents qui seront encore rares demain », pointe Claire Romanet, fondatrice et dirigeante d'Elaee, cabinet de recrutement spécialisé dans les métiers de la communication, du marketing et du digital.

 

Big data, Web sémantique : s'intéresser à ces filières en développement

 

Le data scientist, ou data analyst, cet expert de la statistique qui croise et interprète les données, qui cumule une dimension scientifique, technique et marketing, vole aujourd'hui la vedette à de nombreux profils qui œuvrent autour des données - ils apparaîtront plus loin dans le générique. S'il défraye la chronique - aux États-Unis il affole les grilles de salaire : sa rémunération peut aller jusqu'à 100 000 dollars annuels - c'est que 1. Le marketing voit une opportunité formidable dans le big data, moins de 1% des données sont en effet actuellement utilisées à des fins d'analyse 2. Il y a une pénurie de profils et aucune formation n'existe pour l'heure.

« On a besoin de personnes capables de traduire les données en informations. Connaître le décisionnel, le BI (business intelligence), oui mais il faut aussi une connaissance du marketing, utiliser des termes qu'il va comprendre », explique Joël Rubino, CEO d'Apicube, société spécialisée dans la Data Marketing. Pour « ce travail d'interprète », comme il le décrit, on ira donc chercher des profils côté market researchmarket intelligence, études, car il est plus facile d'apprendre à un marketeur à regarder la data que d'apprendre à un scientifique de penser marketing.

 

Des postes moins glamour et moins accessibles

 

Le hic c'est que les jeunes positionnés en marketing ne sont pas très attirés par les IT.
« Ils veulent bien faire de la créa mais pas un métier analytique qui demande de passer du temps sur des tableurs. Et puis le big data, le big data, so what?! Pour les séduire, il faut leur parler de ce qu'on fait avec toutes ces données », ajoute-t-il.

Si l'on ne débarque pas junior dans ce métier (3 à 5 ans d'expérience en marketing B2C sont souhaitables), si l'on en est encore en France au stade de l'évangélisation, si la demande de ces profils est encore mesurée (des opportunités en agence comme OgilvyHavasPublicis ou chez les annonceurs), il faut néanmoins insister avec Claire Romanet « sur le fait que c'est une filière en développement, que les choses vont bouger et qu'il est pertinent de s'y intéresser aujourd'hui, comme au Web sémantique où l'on a en France de belles pépites ».

>> Pour aller plus loin, consultez notre espace emploi

Nous sommes tous des data miners
 

Une simple recherche sur Google et nous voilà data miner potentiel. Amateur, certes. Le profil en question, un vrai professionnel qui porte bien son nom, creuse la mine - la base de données - pour en extraire un minerais - la donnée - dont on fait du contenu, sous forme d'information, de pub... Il intervient partout où l'on doit stocker et exploiter de la donnée (sans exhaustivité : dans de grandes agences comme Clear Channel et celles citées précédemment, dans de plus petites comme Le Sphinx DéveloppementPHMC GPE LLC ou CyberCité, en consulting comme Accenture, chez l'annonceur notamment dans le secteur de la Banque Assurance et de la Grande Distribution).

Son métier a lui aussi évolué comme l'explique Philippe Maille, fondateur et dirigeant de PHMC GPE LLC : « Il ne s'agit pas que de profils purement informatiques, un data miner peut aussi être un marketeur. Actuellement, avec les bases de données SQL, il sait créer des bases de données sans informaticien. Il travaille en amont et en aval, analyse et requalifie les données. » Ce travail de fourmi exige une patiente infinie et une extrême précision. Aux jeunes qui visent le domaine, Philippe Maille conseille : « Formez-vous grâce à l'alternance, travaillez avec de petites et de grosses agences afin de voir les deux tableaux et allez écouter les grands gourous du data mining, comme, en France, Christophe Benavent. » Enfin, pour que les données soient correctement exploitées, il est essentiel que le data miner, l'architecte de base de données et l'expert CRM travaillent en symbiose.

 

BI & CRM : « On va vers une informatique où il n'y a plus de frontières entre les métiers »

 

Manipuler les données pour mettre en place des indicateurs clefs de performance (KPI) est un art que maîtrise l'expert BI (business intelligence, décisionnel) et CRM. C'est par exemple grâce à lui qu'un internaute avec un accès géo-localisé se voit proposer des produits et services dans sa région, sa ville, son quartier... Le gros du marché pour ces profils est en SSII mais des experts freelances interviennent aussi dans ces domaines. Lakhdar Kreir en est un et nous parle de ses spécialités : « Ces sujets demandent une très grande compréhension des métiers, avoir travaillé dans le décisionnel après des débuts côté technique en tant qu'informaticien m'a permis de l'acquérir. Si 60% des profils BI sont informaticiens, le sujet s'est popularisé et on a vu arriver pas mal de littéraires, au risque de casser le marché », note-t-il. Dans ce domaine aussi le métier évolue, « on parle de data et de social CRM, on va vers une informatique où il n'y a plus de frontières entre les métiers ». Le profil idéal a travaillé sur de nombreux projets de différents types et en suivi de projet.

 

Le SEO reste un métier de pointe

 

« Les algorithmes Google changent tout le temps, le SEO (Search Engine Optimization) reste donc un métier de pointe ; les opportunités se trouvent en agence spécialisée ou au sein des entreprises », note Claire Romanet. C'est avec lui que nous bouclons la boucle car, comme nous l'explique Simon Tripnaux, consultant indépendant en SEO et créateur de Swopera : « Tout est lié dans ce métier qui pousse le contenu. Certains profils viennent de la statistique, des mathématiques, d'autres des sciences du langage ou de l'organisation des données. » D'autres sont comme lui des littéraires (ils ont déjà eu la vedette dans l'épisode 1 de notre saga), des littéraires qui ont le goût des aspects techniques car le job suppose de savoir un peu coder.

En France, actuellement, seul l'IUT de Mulhouse prépare au métier de référenceur (le référencement est un pan du SEO auquel on peut ajouter la rédaction Web). Un jeune attiré par le domaine a tout intérêt à participer aux concours de référencement lancés par des agences spécialisées ou des indépendants : « Le juge, c'est Google, le but est d'arriver au bout de tant de semaines en première position dans ses résultats de recherche », explique Simon Tripnaux. Le travail du SEO consiste à faire en sorte d'intéresser et le moteur de recherche et l'internaute. Il a longtemps été une technique pointue en lien avec le développement informatique, « mais maintenant Google repère les subterfuges et, selon les enjeux, leur intérêt est discutable. Du coup, le métier évolue vers le rédactionnel et le social média car Google fait aujourd'hui le lien avec ce qui est dit sur les réseaux sociaux », conclut-il.

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