Je suis la seule femme au comité de direction du groupe Chargeurs. Le textile est un monde essentiellement masculin. Les gens me connaissent. Être une femme ne m'a jamais gênée même si je reconnais que pour accéder à certaines fonctions, les femmes doivent pédaler trois fois plus vite et réfléchir beaucoup plus rapidement. Dans mon équipe, à la direction générale déléguée, il y a quatre femmes sur six experts. J'ai eu deux mentors, Jérôme Seydoux et Eduardo Malone.

Entrée chez Pricel en 1979, à l'âge de 25 ans, je suis devenue directeur du cabinet du président, Jérôme Seydoux, à 27 ans. J'ai vécu le rachat de Chargeurs par Jérôme Seydoux, en 1980, puis le lancement de la 5e chaîne de télévision avec Berlusconi, le rapprochement avec le producteur de films AMLF de Claude Berri et le lancement du premier satellite européen de télévision, BSkyB, avec Rupert Murdoch. En août 1990, Jérôme Seydoux a racheté Pathé. Je lui ai demandé de prendre en charge la communication car je suis une littéraire et j'ai un goût pour l'écrit. Il trouvait que j'avais plus d'affinité et d'empathie pour les RH. Il m'a nommée directrice des ressources humaines. Le groupe rassemblait 10.000 collaborateurs. J'avais 36 ans. Pendant trois ans, j'ai dormi avec le code du travail sur ma table de nuit. En 1996, à la scission entre Pathé, détenu à 100% par Jérôme Seydoux, et Chargeurs, devenu un groupe purement industriel et beaucoup moins important en terme de personnel, Jérôme Seydoux m'a confié la communication en lot de consolation.

Un peu citoyenne du monde

Chargeurs, présidé par Eduardo Malone, rassemble trois activités : la fabrication de films de protection de surface, la fabrication de textiles techniques - il est le numéro 1 mondial en technologie tissée - et le traitement de la laine matière première. En 2009, le chiffre d'affaires consolidé a atteint 451,6 millions d'euros, dont 94 % réalisés hors de France. Les usines sont implantées en Asie (700 personnes en Chine), les peignages en Uruguay, une unité d'entoilage se trouve en Afrique du Sud. Je me sens un peu citoyenne du monde. Pour élever mes deux enfants, une fille et un garçon, adoptés, le tandem mari/nounou a été essentiel. J'ai du caractère. Quand on me confie quelque chose, je n'imagine pas de baisser les bras. Je pourrais recommencer encore trente ans chez Chargeurs.

Jardins secrets

- Son objet fétiche : "Trois petits chevaux", oeuvre du peintre sino-américain Wallasse Ting.

- Sa devise : "Notre corps est notre jardin et notre volonté en est le jardinier" Shakespeare.

- Son plat favori : La crème de marron.

- Son refuge : Ma famille et la mer.