Covid-19 : l'industrie en chute libre

La chute de l'activité du secteur manufacturier français s'est accélérée en avril pour atteindre son plus-bas historique selon le cabinet Markit. L'indice PMI des directeurs d'achat est tombé à 31,2 points en avril contre 43,2 en mars. Les difficultés pour mettre en oeuvre les mesures de déconfinement risquent encore d'assombrir les perspectives d'un rebond rapide de l'activité.
Grégoire Normand
Un niveau inférieur à 50 points signale un repli de l'activité, tandis qu'une valeur supérieure à cette limite traduit une expansion.
Un niveau inférieur à 50 points signale un repli de l'activité, tandis qu'une valeur supérieure à cette limite traduit une expansion. (Crédits : STEPHANE MAHE)

Les répercussions du coronavirus sur l'industrie sont catastrophiques. Selon le dernier indice PMI publié ce lundi 4 mai, le secteur manufacturier a enregistré au mois d'avril son plus fort recul depuis que l'enquête a été mise en place en 1998. L'annonce du confinement le 17 mars dernier par le président de la République Emmanuel Macron a provoqué une mise à l'arrêt brutale du moteur industriel français. Beaucoup de grands groupes avaient annoncé une suspension de leurs chaînes de production pour plusieurs semaines.

Près de deux mois après ces annonces, beaucoup d'industries ont repris le travail mais les conditions de sécurité sanitaire s'avèrent complexes à mettre en oeuvre. En outre, la pandémie a provoqué une désorganisation des chaînes d'approvisionnement mondiales, mettant en péril des milliers de fournisseurs et d'autres maillons des chaînes logistiques.

Du côté de la demande, les indicateurs sont également dans le rouge. Beaucoup d'entreprises ont réduit drastiquement leurs activités et les ménages français ont privilégié l'épargne de précaution. Dans un discours prononcé au Sénat ce lundi 4 mai, le Premier ministre Edouard Philippe a insisté sur l'urgence de la situation. "Les fleurons de notre industrie sont menacés : l'aéronautique, l'automobile, l'électronique. Les PME, les ETI, les starts-ups sont au bord de l'asphyxie".

Une contraction sans précédent

L'indice PMI qui prend en compte les nouvelles commandes, la production, l'emploi, les délais de livraison des fournisseurs et stocks des achats est passé de 43,2 en mars à 31 en avril. Cet instrument, qui constitue un indicateur avancé très observé par les milieux financiers et les économistes, illustre l'effondrement de la demande au mois d'avril, les nouvelles commandes reçues par les fabricants ayant enregistré de loin leur plus fort taux de contraction.

Une baisse des effectifs

La fermeture des usines et sites de fabrication a entraîné une chute massive des effectifs. "La contraction de l'emploi s'est en outre accélérée au cours du mois, son taux dépassant le sommet historique enregistré en janvier 2009 pour établir un nouveau record en avril" expliquent les économistes de Markit. Beaucoup d'industriels ont fait des demandes de chômage partiel au cours des mois de mars et avril, notamment chez de grands constructeurs automobiles comme Renault ou PSA. Des plans de restructuration et des licenciements pourraient être annoncés dans les semaines à venir.

Une chute historique au premier trimestre

Les derniers chiffres de l'institut national de statistiques (Insee) publiés le 30 avril dernier montrent l'ampleur du choc au premier trimestre. Selon cette première estimation, le produit intérieur brut (PIB) aurait reculé de 5,8% entre janvier et mars alors que le confinement a débuté à la mi-mars en France. La production de biens s'est ainsi repliée de 4,8% et celle de l'industrie manufacturière de 5,8%. Et le moral des directeurs d'achats pour le reste de l'année est loin d'être au beau fixe.

"Malgré l'annonce d'une levée progressive des mesures de confinement dans l'Hexagone à partir du 11 mai prochain, les entreprises interrogées se disent très pessimistes quant à une hausse de leur activité au cours de l'année à venir. La crainte d'une deuxième vague de contamination risque en effet de freiner le retour à la normale et devrait compromettre les chances d'une reprise prochaine de l'activité économique du pays" explique Eliot Kerr, économiste à IHS Markit.

Zone euro : l'industrie dans le rouge

La situation est également critique chez nos principaux voisins de la zone euro. L'industrie manufacturière a ainsi enregistré sa plus forte contraction depuis 1998 selon les dernières enquêtes de Markit. L'indice PMI s'est ainsi replié très violemment passant de 44,5 en mars à 33,4 en avril. La Grèce et l'Espagne sont les deux économies à avoir connu la plus forte contraction en zone euro. Elles sont suivies de l'Italie et la France.

"L'activité du secteur manufacturier s'est effondrée en avril, le taux de contraction surpassant de loin ceux enregistrés depuis le début du recueil des données PMI dans la zone euro, il y a près de vingt-trois ans. Cette dégradation considérable de la conjoncture industrielle résulte d'un ensemble de facteurs, notamment la fermeture de nombreuses entreprises, la chute sévère de la demande et des ruptures de stocks, tous liés à la pandémie de Covid-19" a déclaré Chris Williamson, chef économiste chez IHS Markit.

Des mesures suffisantes ?

Les différentes mesures de soutien annoncées par les différents Etats de la zone euro ont permis jusque-là de limiter la casse économique et sociale. Les dispositifs de chômage partiel ont éviter des licenciements massifs et les mesures de trésorerie et de prêts garantis par les Etats donnent aux entreprises quelques marges de manoeuvre. De son côté, la Banque centrale européenne (BCE) a largement assoupli sa politique monétaire pour faciliter les conditions de financement des entreprises et des ménages pendant cette récession historique.

Il reste que toute cette panoplie pourrait s'avérer insuffisante sans un réel plan de relance économique coordonné à l'échelle de la zone euro. Pour l'instant, les ministres des finances européens ont trouvé un accord sur un socle commun de règles mais aucun grand plan d'investissement n'a été réellement annoncé. La Commission européenne mise, elle, sur un Green deal à l'échelle de l'Europe mais les différents groupes de pression et grandes industries pourraient retarder la mise en oeuvre de cette politique publique malgré l'urgence écologique.

Lire aussi : Chômage en Europe : les écarts déjà vertigineux avant la crise pourraient empirer

Grégoire Normand
Commentaires 17
à écrit le 05/05/2020 à 22:02
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Avec cette crise, les carences françaises vont sauter aux yeux. Cela fait du longtemps que la France régresse...on ne produit quasiment plus rien sauf de la bouffe, du vin et du luxe. Pour le reste,....

le 06/05/2020 à 9:20
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Il restait un peu d'emploi dans la filière auto et la filière aéronautique, dans ce qui rapporte. Mais cela est compromis par la crise écologique et le choc actuel. Tout le reste est parti en Europe de l'Est voire en Asie. Notre patronat investit par...

à écrit le 05/05/2020 à 19:32
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On va vers 10 millions de chômeurs, malheureusement.La seule façon de s'en tirer c'est de créer des usines tous les jours et vite.

à écrit le 05/05/2020 à 15:59
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La clé c'est les carnets de commandes bien remplis, il faut redonner de la confiance et la visibilté à long therme. Et les discours politiques , les décisions éventuelles en cas de..... n'aide pas du tout à cette confiance . Les peurs sont largement...

le 06/05/2020 à 9:23
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Nous sommes au bord de l'effondrement définitif. Ce qui reste de notre industrie va encore se réduire voire carrément passer sous contrôle étranger, histoire de piller les derniers brevets valables. L'Allemagne nous a bien eus avec l'euro. Comme les ...

à écrit le 05/05/2020 à 15:35
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Normal que tout dégringole quand la France est dirigée par des gens qui ne connaissent rien à la vie des entreprises. Les 25000 morts du covid 19 vont coûter beaucoup plus cher que toutes les guerres pas toujours justifiées ( quand on relie l'histoir...

à écrit le 05/05/2020 à 15:22
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Et après ça on va s'apercevoir que le secteur du tourisme va s'écrouler aussi. Et on fera mine de s'étonner. Après avoir interdit les restos les bars les campings les hôtels les plages pendant les "vacances" on s'étonnera qu'ils n'aient pas fait de c...

à écrit le 05/05/2020 à 15:12
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Alors que la pandémie de coronavirus frappe de plein fouet l'emploi en Bourgogne France Comté, la présidente de la Région monte au créneau. Marie-Guite Dufay a exhorté le ministre de l'Economie Bruno Le Maire à intervenir auprès de General Electric (...

à écrit le 05/05/2020 à 12:34
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on ferme les usines, et on interdit aux gens de consommer, puis on constate que les chiffres ne sont pas bons..........

à écrit le 05/05/2020 à 11:59
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Heureusement sur les conseils d'A. Minc et de Maritie et Gilbert Carpentier (après tout pourquoi pas) la France n'a plus mis de billes dans ces usines qui fument (comme les diesels des gilets jaunes). Il a vu juste après tout le p'tit vieux.

le 05/05/2020 à 13:53
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Entre A Minc et Maritie et Gilbert Carpentier, j'ai bcp plus confiance envers les deuxièmes.

à écrit le 05/05/2020 à 10:33
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Une grosse taxe verte a l'entrée de l'Europe vite !

le 05/05/2020 à 11:26
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En plus d'une taxe verte,une taxe Covid pour tout ce qui vient de Chine!

le 05/05/2020 à 12:35
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la taxe verte a deja ete proposee par sarkozy, ca s'appelle ' tva sociale', vu le tolle et les manifs haineuses de la gauche francaise, ca a vite ete abandonne!

à écrit le 05/05/2020 à 9:35
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Fallait pas tout confiner. Il eût fallu un minimum de réflexion, de préparation. Il eût fallu éviter d'invoquer la guerre et avouer se retrouver "à poil" pour aller au combat ! Il eût fallu éviter de parler trop vite après avoir écouté des sons, d...

le 05/05/2020 à 14:53
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Encore un "yakafaukon". Présentez vous, on a hâte de vous voir a l'oeuvre.

à écrit le 05/05/2020 à 9:31
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Ne vous inquiétez, les chinois, Allemands (merci le traité d'Aix la Chapelle) et américains sont en embuscade.

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