Près d'un an après le vote du budget 2021, la pandémie continue de donner le tournis au président de la République Emmanuel Macron. Lors de son allocution mardi 9 novembre aux allures de discours de campagne présidentielle, le chef de l'Etat a fait une annonce passée relativement inaperçue mais qui aurait pu avoir des conséquences importantes en plein marathon budgétaire.
"Le chômage est au plus bas depuis près de quinze ans, et nous sommes l'un des seuls pays du monde où le pouvoir d'achat a continué à progresser, en moyenne, et où la pauvreté n'a pas augmenté. Nous avons réussi cela en maîtrisant nos dépenses publiques, puisque notre déficit sera inférieur à 5% de notre PIB dès cette année."
Dans le projet de loi de finances 2022 (PLF 2022), les comptables de Bercy ont indiqué que le déficit passerait de 9,1% du PIB en 2020 à 8,4% en 2021 et 4,8% en 2022. Même si la Banque de France et le FMI ont récemment révisé leurs prévisions de croissance du PIB Français à 6,75% en 2021, une réduction aussi rapide du déficit obligerait le gouvernement à faire des coupes budgétaires drastiques au risque de casser la reprise. C'est justement ce que veut absolument éviter l'exécutif à la veille d'une élection présidentielle déterminante pour Emmanuelle Macron. Surtout, une telle baisse serait en pleine contradiction avec toutes les dernières nouvelles dépenses annoncées par le gouvernement pour faire face à la flambée des prix (chèque inflation, chèque énergie, bouclier tarifaire).
"Un lapsus" du président de la République
Interrogés par La Tribune, l'entourage du ministre de l'Economie Bruno Le Maire et celui des comptes publics Olivier Dussopt confirment que le déficit devrait bien être inférieur à 5% en 2022 et non 2021. "C'est un petit lapsus", explique Bercy sans ajouter plus de précision. Dans une interview accordée à l'émission Ecorama mercredi 10 novembre, le ministre en charge du Budget avait immédiatement corrigé le tir.
"Le déficit sera bien inférieur à 5% en 2022. Le déficit a illustré la crise que nous avons traversée avec plus de 9% de déficit en 2020. En 2021, on sera autour de 8% et en 2022, on va revenir en dessous de 5%. Ce qui montre que nous sommes sur un chemin de normalisation en matière de finances publiques", a-t-il expliqué.
Un budget 2022 toujours dans le flou
Près de deux mois après la présentation du budget 2022 à Bercy, les magistrats du haut conseil des finances publiques (HCFP), en charge de vérifier la cohérence de la trajectoire du retour à l'équilibre des finances publiques, sont toujours plongés dans un épais brouillard.
Après un premier avis particulièrement critique rendu en septembre, l'institution a expliqué dans un second avis que pour 2022, "la dynamique de l'emploi et de la masse salariale laisse attendre des recettes publiques plus élevées, mais le degré d'incertitude qui entoure la prévision de dépenses est important compte tenu de mouvements d'ampleur affectant les nouvelles dépenses. Leur calendrier, leur rythme d'exécution et leurs montants demeurent à ce stade à préciser."
En effet, la traduction budgétaire du grand plan d'investissement France 2030 pour les prochaines années reste encore très floue pour de nombreux économistes et observateurs.
L'Assemblée nationale a voté lundi dernier en première lecture les crédits pour le plan d'investissement France 2030, en adoptant "l'amendement le plus cher de la Ve République", de 34 milliards d'euros, dont 3,5 milliards dès 2022, une méthode décriée par les oppositions. A cela s'ajoute, le contrat d'engagement jeunes annoncé au début du mois de novembre pour une enveloppe annuelle annoncée de 550 millions d'euros. L'avenir de ces crédits dépendra toutefois de la présidentielle et des futurs budgets.