Déficit structurel : l'avertissement du Haut Conseil des finances publiques

Si l'institution a jugé que les prévisions de croissance du gouvernement étaient réalistes pour 2019, les objectifs concernant le déficit structurel (hors effet de la conjoncture) s'éloignent des promesses affichées par le gouvernement.
Grégoire Normand
(Crédits : Benoit Tessier)

C'est une évaluation en demi-teinte pour le gouvernement. Dans un avis publié mardi 10 avril, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) a estimé que la prévision de croissance du gouvernement pour cette année est jugée "réaliste". Dans son programme de stabilité budgétaire, l'exécutif a révisé à la baisse ses projections pour le produit intérieur brut (PIB) de 1,4% contre 1,7% auparavant. Selon Bercy, qui attribue cette révision à la baisse au ralentissement de l'économie mondiale, la croissance devrait ensuite rester stable, à 1,4%, durant les trois dernières années du quinquennat.

L'organisme public, en charge du contrôle des prévisions macroéconomiques du gouvernement, estime que « les conditions de mise en oeuvre du Brexit » représentent une incertitude majeure sur les projections de croissance. Même si à ce jour de nombreux scénarios restent sur la table, le divorce sans accord du Royaume-Uni de l'Union européenne pourrait affecter quelques secteurs réalisant des échanges avec nos voisins. Selon de récentes estimations du service des douanes françaises, plus de 120.000 entreprises sont à l'origine des échanges avec le royaume.

« En cas de Brexit, l'ensemble de ces entreprises sera touché par la modification des modalités des flux de marchandises en provenance et / ou à destination du Royaume-Uni », précise l'administration.

Lire aussi : Commerce extérieur : 120.000 entreprises françaises exposées au Brexit

Un déficit structurel à l'horizon 2022

Outre 2019, les auteurs de l'avis ont également indiqué que le scénario macroéconomique du gouvernement était établi sur « une base raisonnable pour établir une trajectoire pluriannuelle de finances publiques » tout en précisant que « ces projections ne prennent pas en compte d'éléments de nature cyclique ». Le ministère de l'Économie a prévu un rythme de croissance de 1,4% tous les ans jusqu'en 2022.

Dans ce contexte, l'organisme juge que la trajectoire des finances publiques serait moins ambitieuse que celles annoncée par le gouvernement lors du programme de stabilité transmis aux autorités européennes en 2018. « Le nouveau programme de stabilité conduit, par rapport au précédent, à une réduction sensiblement moindre des déficits effectifs et structurels à l'horizon 2022 et en conséquence de la dette », indique la juridiction. Le programme de stabilité du gouvernement anticipe un déficit des administrations publiques en 2022 accru de 1,5 point par rapport au programme de stabilité d'avril 2018.

« Le solde public effectif serait désormais de -1,2 point de PIB en 2022 contre + 0,3 point dans le programme de stabilité d'avril 2018. »

Une croissance au ralenti selon l'OCDE

En dépit des prévisions de croissance jugées "réalistes" par les magistrats, plusieurs institutions internationales ont révisé leurs prévisions d'activité à la baisse pour l'économie française. Malgré un certain nombre de réformes saluées par l'OCDE, le secrétaire général de l'institution internationale, Angel Gurría, a recommandé à la France « de redynamiser la croissance et en faire profiter plus de monde ».

« Nous prévoyons 1,3% en 2019. Le taux de chômage à 8,8% est encore très élevé et 17% des jeunes sont ni en emploi, ni en formation. C'est un taux très élevé. La mobilité sociale est trop faible. Trop de personnes se sentent exclues de la croissance ».

Lors d'une conférence de presse donnée à Bercy ce mardi 9 avril en présence de Bruno Le Maire, M. Gurria a ajouté que « prendre en compte l'impact redistributif est très important. Il faut que ces réformes soutiennent le revenu et le bien être des plus vulnérables. Il faut mesurer l'impact des réformes sur les plus vulnérables ».

En marge de la présentation de l'étude de l'OCDE sur la France, le chef de la division au département des Affaires économiques de l'organisation, Pierre Beynet, a rappelé quelques risques qui pèsent sur l'économie tricolore lors d'une réunion dans les locaux de France Stratégie.

« Depuis la crise, le revenu disponible corrigé par les structures des ménages a stagné. Ce qui peut expliquer le mécontentement a rappelé l'économiste en pointant également les risques liés au secteur financier avec la dette des sociétés non financières. Le crédit aux ménages et aux entreprises est extrêmement élevée. »

Lire aussi : Envol de la dette privée : Bercy somme les banques de faire des réserves

Mesures "Gilets jaunes" : le Haut Conseil ne s'est pas prononcé

L'arsenal de mesures présenté le 10 décembre dernier par le président Emmanuel Macron en réponse à la crise des "Gilets jaunes" n'a pas été pris en compte dans l'évaluation du Haut Conseil. Le président de la Cour des comptes Didier Migaud explique cela par l'absence de saisine du gouvernement, « malgré leur impact significatif sur les finances publiques ».

Pour comprendre cette situation, le mandat du Haut Conseil inscrit dans une loi de 2012 prévoit que « au cours de l'examen par le Parlement d'un projet de loi de finances ou de loi de financement de la sécurité sociale », le Haut Conseil ne soit « saisi » que lorsque « le gouvernement entend réviser les prévisions macroéconomiques sur lesquelles reposait initialement son projet ». Or, l'exécutif n'avait pas révisé ses prévisions macroéconomiques lors de l'examen de la loi de finances pour 2019. Tous les dispositifs contracycliques présentés par le chef de l'État pourraient néanmoins venir soutenir l'activité au cours du premier semestre.

Selon les dernière note de l'Insee, les dépenses de consommation devraient repartir au cours des deux premiers trimestres (0,5% et 0,4%) après avoir connu l'atonie (0% au T4 2018).

Lire aussi : La croissance française résiste mieux que prévu

Grégoire Normand
Commentaires 6
à écrit le 11/04/2019 à 11:09
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si la france respectait ses promesses ca se saurait pourquoi croyez vous qu'il n'y aura ni budget europeen, ni eurobonds? hollande s'est assis sur les rapports alarmants de son ami migaud, il savait pourquoi

le 11/04/2019 à 13:52
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@Churchill Rappels utiles pour les pertes de mémoire. Il faut évidement tenir compte de la progression du PIB pour des comparaisons : PIB 2012 : 2087 Md 2012-T2 : 520,9 Md 2017-T2 : 570,6 Md DEFICIT PUBLIC en baisse 2012 : 4,8% du PIB. 2015...

le 11/04/2019 à 19:42
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@Alain d "DEFICIT BUDGETAIRE en baisse 2012 : 87,2 Md 2018 : 76,1 Md" Soit -11 milliards (0,5% du PIB) en 6 ans et au prix d'un matraquage fiscal de +14 milliards sur le seul impôt sur le revenu... quel exploit.

à écrit le 11/04/2019 à 6:39
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De toutes façons la France est sur une pente grecque, il faudra attendre la faillite (c'est à dire qu'on n'arrive plus à emprunter sauf à taux faramineux pour financer les déficits) pour qu'on se décide enfin à faire le ménage dans la dépense publiqu...

à écrit le 10/04/2019 à 20:33
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"c'est à la fin de la foire qu'on compte les bouses" et dixit Churchill "Je ne crois aux statistiques que lorsque je les ai moi-même falsifiées" dernière citation qui va parfaitement à lemaire/macron, deux spécialistes de l'affabulation/mensonges.

à écrit le 10/04/2019 à 18:41
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"Mesures "Gilets jaunes" : le Haut Conseil ne s'est pas prononcé" ......... "dispositifs contracycliques" heu ah oui tient ça alors ? Blablabla, mais Sauf nouvelle annonce de baisse sur la croissance mondiale, je parie sur une croissance français...

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