Organiser la vie quotidienne en prenant en compte le risque d'une deuxième vague épidémique qui serait due à un relâchement de la vigilance sanitaire, accompagner la reprise de l'activité économique et sociale du pays, prendre en compte les publics les plus fragiles, appuyer les opérations de tests et de prévention des chaînes de contamination à mettre en œuvre et superviser, dans le cadre des instructions ministérielles, la continuité et la montée en puissance de l'activité des services de l'Etat.
Cette liste de tâches a été envoyée le 6 mai aux préfets avec, en copie, les directeurs généraux des agences régionales de santé. Dans cette circulaire, dont La Tribune s'est procurée en exclusivité un double, le Premier ministre leur demande de respecter un processus "progressif, territorialisé et réversible" dans le cadre de la stratégie de déconfinement. "Il vous appartiendra de le mettre en œuvre en application de ces trois principes", écrit Edouard Philippe.
Le Premier ministre rappelle en premier lieu la nécessité d'assurer l'application des mesures de déconfinement en phase avec la réalité territoriale. Les hauts-fonctionnaires doivent ainsi organiser d'ici au 11 mai la permanence des contrôles de la voie publique et fournir l'information sur l'actualisation des règles ainsi que sur le "caractère crucial" de leur mise en œuvre.
Ecole, travail, commerce, transport, vie sociale, tout est passé au crible
Pour ce qui est du "milieu scolaire", lorsqu'un maire prendra une décision de fermeture dont le préfet ne partage pas le bien-fondé, celui-ci doit privilégier le dialogue et la conviction. Dans le même esprit et en lien avec les autorités académiques, il doit évaluer les impossibilités d'accueillir dans les locaux un nombre même très réduit d'élèves.
En ce qui concerne "la continuité de l'activité professionnelle", le haut-fonctionnaire est appelé à mobiliser les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation et de l'emploi (DIRECCTE). De même qu'il devra présider un comité de suivi des services des directions départementales (Finances publiques, DIRECCTE, Pôle Emploi voire URSSAF et Banque de France).
S'agissant de "l'ouverture des commerces", tous les commerces pourront rouvrir à l'exception des restaurants et des débits de boissons. Pour les marchés alimentaires ou non, "la règle sera désormais l'autorisation, l'interdiction l'exception". Quant aux centres commerciaux, il reviendra aux préfets d'interdire par arrêté l'accès de ceux dont la surface commerciale dépasse les 40.000 mètres carrés. Enfin, quelle que soit la nature du commerce, le port du masque sera, lui, "recommandé".
En matière de "sécurisation des transports en commun", les autorités organisatrices de mobilité (AOM) devront organiser un minimum de 50% de l'offre et encourager les modes alternatifs. Le haut-fonctionnaire devra mener une concertation locale pour favoriser le télétravail "à son niveau maximum" et lisser les horaires de travail. Chaque AOM devra en outre arrêter un plan de transport à remettre au préfet. Le "concours" de ce dernier sera également recherché pour organiser l'accès aux transports.
En termes de "reprise de la vie sociale", il ne sera plus nécessaire de se munir d'une attestation, sauf pour un déplacement à l'extérieur du département et d'une distance supérieur à 100 km à vol d'oiseau du domicile. Pour ces trajets, un dispositif de déclaration, permettant d'obtenir leur "caractère impérieux", se substituera au dispositif actuel.
Dans ce domaine, à l'inverse des plages, lacs et plans d'eaux fermés jusqu'au 1er juin, les parcs et jardins pourront être ouverts, sauf dans les départements "rouges". Médiathèques, bibliothèques et petits musées et monuments pourront, eux aussi, rouvrir, à l'image des lieux de culte et des cimetières. En revanche, demeureront fermés cinémas, espaces sportifs, piscines, salles de spectacles. "De façon générale et pour tous les cas de figure non évoqués précédemment" et "jusqu'à nouvel ordre", les rassemblements doivent être limités à 10 personnes maximum.
Constituer un comité local de levée du confinement (COLLEC)
Dans les Outre-Mer, la stratégie de déconfinement sera, elle, adaptée "en concertation étroite" avec les élus locaux. La capacité de dépistage, par exemple, doit passer de 1.000 à 5.000 tests par jour d'ici au 11 mai. A Mayotte, l'interdiction des vols commerciaux est maintenue jusqu'à la fin du mois avant une réévaluation le 1er juin.
Plus généralement, les hauts-fonctionnaires doivent s'appuyer sur les élus locaux et "en particulier" sur les maires et "leur expérience de ces questions". Ou encore constituer un comité local de levée du confinement (COLLEC) qui réunira, selon les sujets, services de l'Etat, représentants des collectivités, acteurs économiques et sociaux. Objectif: partager les informations d'intérêt commun, permettre la présentation et la concertation sur les mesures locales envisagées, et recueillir les demandes et sollicitations.
Ce COLLEC, auquel il est possible d'associer les parlementaires, doit être réuni "dès à présent" pour engager les travaux préparatoires. En interne, un collaborateur du corps préfectoral doit être désigné pour piloter la tenue de ce comité et le suivi de son activité. Le secrétaire général pour les affaires régionales (SGAR, n°2 d'une préfecture, Ndlr) constitue, lui, une cellule dédiée au déconfinement chargée de soutenir les initiatives et d'intervenir en appui des préfets de département.
"Dans les prochains jours", le Premier ministre adressera par ailleurs "aux ministères concernés" une nouvelle instruction relative aux contrôles aux frontières. Les préfets recevront enfin des "ministres compétents" deux instructions complémentaires: la première sur la mise en œuvre de la politique de dépistage, d'investigation des cas contacts et d'isolement et la seconde sur la distribution de masques en direction des agents de l'Etat et des personnes en situation de précarité.