La température monte dans les couloirs de Bercy alors qu'une canicule précoce et intense frappe une bonne partie de l'Hexagone. Le nouveau ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, nommé il y a à peine un mois est déjà sur le pont avec les équipes de la direction générale des finances publiques (DGFIP) pour préparer tous les textes budgétaires à venir. Entre le paquet pouvoir d'achat, le budget rectificatif et le projet de loi de finances 2023 (PLF), les équipes de Bercy risquent de passer des journées très chargées.
Au lendemain des élections législatives, le gouvernement, s'il est confirmé, devra rapidement présenter un texte législatif pour soutenir le porte-monnaie des Français. Après un premier cafouillage dans le calendrier, la porte-parole du gouvernement Olivia Grégoire a annoncé que cette enveloppe pourrait être dévoilée le 6 juillet prochain en conseil des ministres. Tous ces textes risquent de chambouler la trajectoire budgétaire et les objectifs du nouveau quinquennat Macron.
En effet, l'inflation confirmée cette semaine à 5,2% au mois de mai par l'Insee pèse fortement sur le niveau de vie des Français. Partout sur le territoire, les mouvements de grogne dans les entreprises et le secteur public se multiplient. Pour la première ministre Elisabeth Borne, la situation sociale pourrait tourner au vinaigre rapidement si l'indice des prix à la consommation ne ralentit pas à partir du second semestre.
Un déficit en baisse, plus élevé que prévu à la fin de l'année 2023
Le gouvernement et les candidats de la majorité présidentielle n'ont cessé de répéter pendant la présidentielle qu'ils voulaient faire preuve de « sérieux budgétaire ». En pleine campagne, le président Macron a affirmé qu'il voulait revenir sous la barre des 3% de déficit à partir de 2027, soit la dernière année du quinquennat. Cette promesse pourrait d'emblée s'avérer difficile à tenir. Après avoir mis en place le « quoi qu'il en coûte » et les mesures d'urgence, l'exécutif a dû présenter un plan de résilience au printemps qui s'ajoute aux différentes mesures mises en œuvre depuis l'automne 2021 (prime inflation, bouclier tarifaire).
Résultat, le déficit public devrait se contracter bien moins rapidement qu'escompté. Dans leurs dernières prévisions dévoilées la semaine dernière, les économistes de l'OFCE (l'Observatoire français des conjonctures économiques) ont calculé que le déficit public allait passer de 8,9% du PIB en 2020, à 6,5% en 2021 et -5,6% en 2022. « Les mesures budgétaires sont extrêmement importantes. Les administrations publiques ont dépensé environ 260 milliards d'euros pour amortir les effets de la crise sanitaire et ceux de la crise énergétique, a rappelé l'économiste Mathieu Plane, lors d'un récent point presse. Le déficit public pourrait baisser à 5,6%. Il resterait élevé. La dette se réduirait légèrement à 112% mais il n'y a pas de dérapage », a-t-il poursuivi. De son côté, le gouvernement tablait sur un déficit de 4,8% pour 2022 dans le projet de loi de finances 2022 présenté à l'automne dernier.
Un paquet pouvoir d'achat évalué à 9 milliards d'euros
Le paquet pouvoir d'achat actuellement en préparation a été évalué à 0,4 point de produit intérieur par l'OFCE, soit environ 9 milliards d'euros. Il comprend le chèque alimentaire maintes fois reporté, l'indexation des prestations sociales ou encore le dégel du point d'indice.
Le gouvernement a également annoncé le prolongement du bouclier tarifaire, la ristourne de 18 centimes d'euros sur le litre de carburant jusqu'à la fin de l'année dont le coût est estimé à 1,1 point de PIB en 2022, soit un peu plus de 23 milliards d'euros.
Une récession évitée pour l'instant...
Après un fort rebond en 2021 (+6,8%) de la croissance suite au plongeon de 2020 (-9%), l'économie française pourrait marquer le pas en 2022. Il y a quelques jours, la Banque de France a indiqué que l'activité avait évité la récession au cours du second trimestre après un début d'année en repli (-0,2%). Dans le contexte d'une inflation plus élevée que prévu, l'économie tricolore risque encore de traverser des zones de turbulence au cours des mois à venir.
En effet, le resserrement de la politique monétaire et la hausse des taux confirmées par la Banque centrale européenne (BCE) cette semaine risquent d'avoir des conséquences néfastes sur le plan budgétaire. Les scénarios de croissance esquissés par l'Insee à la fin du mois de juin pour le reste de l'année 2022 seront particulièrement scrutés au gouvernement pour ajuster le tir.