Le spectre d'une seconde vague épidémique s'amplifie. Depuis le week-end dernier, les rassemblements de plus de 10 personnes à Paris sont interdits si les gestes barrières ne peuvent pas être assurés. Les zones de port du masque obligatoire ont été étendues et le nombre de personnes testées positives augmente régulièrement sur le territoire français. Au ministère du Travail, les craintes se multiplient également. Les syndicats et les représentants du patronat doivent être reçus rue de Grenelle ce mardi 18 août en présence des ministres Elizabeth Borne et Olivier Véran. Face à une possible nouvelle vague, les entreprises pourraient rendre obligatoire le port du masque dans les prochains jours. Sur le plan économique, la résurgence de cette maladie infectieuse serait catastrophique selon les scénarios établis par plusieurs organismes. Lors d'un point presse à la fin du mois de juin, l'économiste de l'Insee Julien Pouget rappelait que "à très court terme, c'est l'évolution de la situation sanitaire qui conditionne la vitesse de reprise de l'économie. C'est la crise sanitaire qui a précipité l'économie dans la crise. C'est le reflux de l'épidémie qui permet de repartir".
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Le scénario noir de l'OCDE pour la France
Au mois de juin, les économistes de l'organisation internationale ont planché sur plusieurs scénarios. Pour la France, le tableau dressé par les experts est très sombre. Parmi les pays développés, l'économie tricolore serait la plus frappée après l'Espagne avec un perte de produit intérieur brut colossale. La chute du PIB est évaluée à -14,1% contre -11,4% dans le scénario d'une vague unique sans nouvelle mesure de confinement, soit une perte supplémentaire de 2,7% du PIB. La mise en oeuvre de nouvelles mesures de confinement sur l'ensemble du territoire plomberait clairement le rebond économique avec un rattrapage repoussé à plusieurs années et des pertes substantielles de revenus pour les ménages et les entreprises. De leur côté, les économistes de la Banque de France estiment que le PIB pourrait chuter à -16% en 2020 selon leur scénario le plus sévère. A l'échelle de l'Europe, l'Espagne, la France et l'Italie font partie des trois pays les plus touchés par la récession économique d'après la plupart des organismes de statistiques. Une nouvelle flambée de la propagation du virus aurait des répercussions dramatiques à l'automne.
Une chute vertigineuse de la demande intérieure
La mise sous cloche de l'économie hexagonale pendant huit semaines a provoqué une brutale et soudaine chute de la demande intérieure. Beaucoup de secteurs ont été mis à l'arrêt du jour au lendemain sans vraiment de perspectives claires sur la durée et les conditions de déconfinement. Dans ce contexte d'incertitude, la demande domestique, moteur traditionnel de l'économie, pourrait lourdement pâtir d'une seconde vague. Dans le scénario d'un double choc, elle pourrait reculer de -14,4% contre -11,5% dans un scénario à choc unique. La plupart des facteurs contribuant à la demande (investissements privés et publics, consommation des ménages) seraient affectés.
Un chômage au sommet
Même s'il est encore tôt pour mesure l'ampleur des dégâts sur le marché du travail, les premiers indicateurs concernant le premier semestre sont spectaculaires. Ainsi, plus de 600.000 postes auraient été détruits malgré la mise en œuvre des mesures de chômage partiel et des prêts garantis par l'Etat. Sur l'année, les économistes de l'OCDE tablent sur une augmentation du taux de chômage à 11% avec une vague unique et 11,3% dans le pire des scénarios.
Une hausse plus importante du chômage pourrait entraîner une spirale récessive redoutable. En effet, l'augmentation du chômage devrait réduire les revenus de milliers de familles affectant en parallèle la consommation, les revenus et l'investissement des entreprises. Surtout, les personnes en situation d'instabilité professionnelle ont été les plus touchées par ce repli violent de l'activité. Les salariés en CDD, en contrat de travail temporaire ou les saisonniers figurent parmi les premières victimes de la crise. A cela s'ajoutent les licenciements des grands groupes (Renaults, Airbus, Air France) annoncés depuis plusieurs mois.
Un plan de relance fin août
Le gouvernement continue de peaufiner son plan de relance pour la fin de l'été. Dans une récente interview accordée au quotidien Sud-Ouest, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a esquissé quelques détails de la stratégie de l'exécutif. Il affirme que ce plan bénéficiera "à tous les Français et en particulier à ceux qui cherchent un emploi. La transition écologique en sera le fer de lance. Ce qui suppose des investissements dans la rénovation thermique des bâtiments, dans la décarbonation de l'industrie, dans les nouvelles technologies". Le locataire de Bercy devrait également privilégier une politique économique de l'offre favorable d'abord aux entreprises. En effet, il a promis qu'il n'augmenterait pas les impôts et travaille sur une baisse des cotisations pour les salaires inférieurs à 1,6 SMIC. Cette politique de réduction des coûts pourrait s'avérer inefficace si la propagation du virus s'amplifie à l'automne avec à nouveau un risque de paralysie des entreprises.
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