"Le second mandat du Président ne sera pas une promenade de santé", assure un poids lourd du gouvernement. Et pour cause, le premier défi consistera à aider les Français à faire face à la hausse des prix.
Alors que l'inflation s'installe à plus de 4,5 %, tous les produits sont concernés, au premier rang desquels l'alimentaire et les carburants. Et la plupart des dispositifs déployés par le gouvernement pour maintenir le pouvoir d'achat des Français arriveront à échéance au début de l'été. Ainsi, par exemple, la ristourne de 18 centimes d'euros - 15 centimes dans les Outre-mer - appliquée sur les carburants s'arrête le 31 juillet prochain.
"Expliquer aux Français qu'ils paieront le prix fort sur l'essence alors qu'ils s'apprêteront à partir en vacances sera délicat", s'inquiète un ministre.
Faudra-t-il prolonger la mesure ? Beaucoup trop coûteux, assurent les experts de Bercy. La facture va déjà s'élever à 3 milliards d'euros pour 4 mois. Sans compter que ce dispositif mis en place à la va vite cet hiver, n'est pas assez ciblé. Il profite aussi bien aux ménages modestes qu'aux plus riches.
Une nouvelle aide à venir pour les automobilistes
C'est pourquoi le ministère des Finances travaille d'ores et déjà sur une mesure d'accompagnement qui prenne le relais de cette ristourne dès cet été. Une aide plus ciblée sur les automobilistes, qui roulent beaucoup, et sous condition de ressources. Elle pourrait prendre la forme d'un chèque ou d'un crédit d'impôt.
"Nous sommes actuellement en train de croiser les fichiers fiscaux, mais aussi ceux des constructeurs, des cartes crises, des contrôleurs techniques, des assureurs", détaille un conseiller du ministère des Finances.
Prolongation du bouclier tarifaire sur le gaz jusqu'à la fin de l'année
Dans ses promesses de campagne, Emmanuel Macron s'est aussi engagé à poursuivre le blocage du prix du gaz jusqu'à la fin de l'année fin 2022. Mis en place à l'automne, ce bouclier "bloque" le tarif réglementé du gaz afin qu'il ne dépasse pas le prix d'octobre 2021.
Reste que les conseillers de Bercy, soucieux de limiter le dérapage des dépenses, souhaiteraient que les Français participent, au moins en partie, à la hausse du prix gaz, dont le prix a été multiplié par 10 en une année. Il s'agirait donc de faire passer, cet été, une hausse même faible. Une annonce forcément peu populaire, mais qui permettrait de limiter le coût pour les dépenses publiques. Quoi qu'il en soit, pour prolonger la mesure, il faudra obtenir un vote du Parlement.
Un nouveau "paquet pouvoir d'achat" dès cet été pour les ménages
Aussi, les équipes du candidat Macron planchent-elles déjà sur un "paquet pouvoir d'achat face à l'inflation". "Cet ensemble comprendra des mesures pour les ménages, mais aussi pour les entreprises", assure un proche du dossier.
Pour les particuliers, en plus des aides sur le carburant, Emmanuel Macron a ainsi promis d'indexer les retraites dès le mois de juillet sur l'inflation, soit une hausse d'au moins 4%.
Indexation des minima sociaux dès le mois de juillet
Lors du débat face à Marine Le Pen, le candidat a aussi fait une annonce passée un peu inaperçue : l'indexation des minima sociaux sur l'inflation. RSA, allocation pour adultes handicapés, prime d'activité, minimum vieillesse ... Au total, il s'agit d'une enveloppe de plus d'1 milliard d'euro pour les finances publiques.
Pour les particuliers, l'ensemble du "paquet inflation" se comptera en dizaines de milliards d'euros, estime un conseiller de Bercy.
Des aides pour les entreprises qui consomment beaucoup d'énergie
Mais, cet ensemble pouvoir d'achat comprendra aussi un soutien conséquent aux entreprises très dépendantes du gaz, du pétrole, ou encore de l'électricité. La France en compte plus de 300, dont la majorité sont dans l'industrie. Aciéries, sidérurgie, sites chimiques, sociétés de plasturgie, entreprises du bâtiment, de la construction, ... toutes attendent avec impatience un coup de pouce de l'Etat, car elles ne bénéficient pas du bouclier tarifaire, comme les particuliers. L'aide sera en partie financée par l'Europe. Mais, là aussi, ce soutien se chiffrera en dizaine de milliards d'euros.
L'objectif de ces aides est aussi de soutenir la compétitivité des entreprises françaises. - En Allemagne le gouvernement a mis plus de 60 milliards d'euros pour ses entreprises
La réforme des retraites qui fera des remous
Si ces dispositifs promettent d'être globalement bien accueillies par les Français, car ils visent à préserver leur pouvoir d'achat, en revanche la réforme des retraites promise par Emmanuel Macron ne bénéficiera pas de la même bienveillance. Même avec un âge légal de départ ramené à 64 ans, les oppositions vont être nombreuses et vives.
C'est sans attendre que le nouvel élu compte toutefois s'y atteler. Dès les 100 premiers jours de son second mandat. " C'est la mère des reformes", a-t-il l'habitude de répéter. Si Emmanuel Macron compte s'appuyer sur le Parlement - cette fois, pas d'ordonnance ou de 49.3- , il sait que la bataille va être difficile, car tous les syndicats sont contre le report de l'âge légal à 64 ans. Tout dépendra aussi de la majorité dont il disposera à l'Assemblée nationale...
"Et une réforme des retraites en France fait toujours des remous", rappelle, sans illusion, un ministre. Pourtant, pour les macronistes, cette réforme des retraites est la seule solution pour équilibrer les comptes du régime mais aussi éviter le déclassement et assurer la prospérité des Français. "C'est ce qui nous permettra de préserver notre modèle social, d'avoir accès aux meilleures innovations, de financer des progrès sociaux, comme une meilleure prise en charge du grand âge ou de la santé. Cette réforme est aussi le gage de notre indépendance", poursuit ce poids lourd du gouvernement.
Eviter la résurgence des gilets jaunes
Si Emmanuel Macron s'attend à des manifestations, en revanche, il lui faut absolument éviter que la contestation ne s'embrasse, et ne débouche sur un acte 2 des gilets jaunes. La ligne de crête est bien celle-ci.
Sa méthode ? Convoquer une grande conférence sociale dès son élection, "avec des forces syndicales et patronales responsables", a précisé Emmanuel Macron au micro de France Inter vendredi matin.
Pour faire passer la pilule, le président promet aussi une revalorisation des pensions pour une carrière complète portée à au moins 1.100 euros. Il espère aussi "amadouer" les syndicats, en améliorant la prise en charge de la pénibilité. L'idée est d'y ajoutant des critères plus individuels, mais aussi d'être plus attentif "à la fatigue dans le temps de vie" - selon ses termes au micro de France inter-.
Autre idée qu'avance Emmanuel Macron : mieux organiser les fins de carrière, pour organiser des départs à la retraite progressifs. De quoi faire plaisir à la CFDT qui milite depuis longtemps pour une banque du temps.
Cela suffira-t-il pour calmer l'opposition des centrales syndicales et éviter l'embrassement du pays ? Pas sûr.