Ce sont encore des petits pas mais les négociations avancent. Les ministres des finances du G7, réunis à Stresa en Italie, ont indiqué « des progrès » sur l'utilisation des intérêts des actifs russes gelés pour financer une nouvelle aide militaire à l'Ukraine. Cette réunion intervient au moment où sur le terrain, l'Ukraine a assuré vendredi avoir stoppé l'assaut russe sur la région de Kharkiv, en cours depuis deux semaines et avoir commencé une contre-attaque dans ce secteur du nord-est.
« Il faut que nous parvenions samedi à une déclaration de principe qui marque l'accord global des pays du G7 d'utiliser les revenus des actifs russes pour financer l'Ukraine », a estimé vendredi le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire.
Convergences
L'idée est surtout de parvenir à un accord politique de principe plutôt qu'à parvenir à un accord sur la mécanique à mettre en place - un casse-tête juridique- pour flécher l'aide à l'Ukraine à partir des revenus générés par les quelques 300 milliards d'euros d'actifs gelés de la banque centrale russe.
Le gel de ces actifs a été l'une des toutes premières sanctions imposées à la Russie après son invasion de l'Ukraine. En plus des actifs de la banque centrale, de nombreux russes, des oligarques aux politiques proches du Kremlin, en passant par les responsables militaires et des services de sécurité, ont également vu leurs actifs dans les pays G7 gelés, parfois même saisis, pour plusieurs milliards d'euros.
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait proposé en février dernier d'utiliser ces revenus des actifs russes pour acheter des équipements militaires pour l'Ukraine. Les pays de l'Union européenne ont ensuite adopté début mai un accord sur cette question. Le revenu des intérêts pourrait atteindre 2,5 à 3 milliards d'euros par an. Les Etats-Unis veulent toutefois aller plus loin et ont mis la pression sur les pays du G7 pour se rallier à un méga-prêt d'environ 50 milliards de dollars garantis par les futurs intérêts générés par les actifs russes immobilisés.
Mise en œuvre encore lointaine
L'accord trouvé est un accord « politique », a déclaré le ministre italien Giancarlo Giorgetti, reconnaissant toutefois que subsistaient « des problématiques importantes de caractère technique et juridique» à résoudre d'ici le sommet des dirigeants des pays du G7 prévu mi-juin. De fait, le G7 marche sur un sujet très complexe du point de vue juridique, les réserves de la banque centrale russe étant en principe inaliénables. Le G7 redoutent aussi les mesures russe de rétorsion, le Kremlin ayant déjà démontré sa capacité à saisir des actifs occidentaux pour les redistribuer ensuite à des proches.
« Dans la mesure où la Russie considérerait l'utilisation des bénéfices des actifs immobilisés en Europe comme du « vol », il est très probable qu'elle se retournera contre des groupes occidentaux encore présents sur son territoire national », explique à l'AFP l'avocate Jean-Paule Castagno, avocate spécialisée en droit international du cabinet Orrick.
Le président russe Vladimir Poutine est d'ailleurs déjà passé à l'acte en signant jeudi un décret autorisant la confiscation en Russie d'actifs appartenant aux Etats-Unis ou aux personnes leur étant « associées ».
Options avant la mi-juin
« Nous progressons dans nos discussions sur les moyens potentiels d'anticiper les bénéfices extraordinaires provenant des actifs souverains russes immobilisés au profit de l'Ukraine, conformément au droit international et à nos systèmes juridiques respectifs», ont indiqué les ministres, selon un projet de communiqué final obtenu par l'AFP.
L'objectif est de « présenter à nos dirigeants, avant le sommet (des chefs d'Etat et gouvernements du G7) dans les Pouilles en juin, des options permettant d'apporter un soutien financier supplémentaire à l'Ukraine », selon les ministres. Les grands argentiers des sept pays les plus riches du monde ont réaffirmé que les actifs souverains de la Russie resteront immobilisés jusqu'à ce que la Russie paie pour les dommages qu'elle a causés à l'Ukraine.