Brésil : déjà climatosceptique, Bolsonaro est aussi coronavirus-sceptique

Au moment où les dirigeants de la planète livrent une "guerre" contre le coronavirus, Jair Bolsonaro fait entendre une voix totalement discordante, provoquant malaise et inquiétude au Brésil, y compris dans son camp.
Pendant une conférence de presse, Jair Bolsonaro a retiré et remis une douzaine de fois son masque, pour le laisser finalement pendre à une oreille.
Pendant une conférence de presse, Jair Bolsonaro a retiré et remis une douzaine de fois son masque, pour le laisser finalement pendre à une oreille. (Crédits : Reuters)

Depuis le début de la pandémie, le président d'extrême droite Jair Bolsonaro a pour unique ligne de conduite la dénonciation de l'"hystérie" autour du Covid-19, tout en multipliant les provocations.

Portant un masque de protection, il est apparu mercredi en conférence de presse avec un aréopage de ministres, pour évoquer pour la première fois "une question grave". Mais qui ne doit pas entraîner "la panique".

De cette intervention sans annonce nouvelle, les commentateurs ont conclu jeudi à un exercice totalement raté de communication politique et retenu le "spectacle pathétique" d'un Jair Bolsonaro retirant et remettant une douzaine de fois son masque, pour le laisser finalement pendre à une oreille.

Mardi, il avait critiqué la mobilisation de gouverneurs et de maires contre l'arrivée d'une crise sanitaire potentiellement dramatique pour des dizaines de millions de Brésiliens vivant entassés dans de vastes métropoles et favelas.

Il avait évoqué, encore, "une certaine hystérie" lorsque le gouverneur de Rio de Janeiro, Wilson Witzel, un de ses probables rivaux à la présidentielle de 2022, et le maire de Sao Paulo (sud-est), Bruno Covas, ont annoncé l'état d'urgence, alors que le coronavirus faisait son premier mort au Brésil.

"Ces mesures vont porter préjudice à notre économie [...] qui allait bien", a lancé le président.

Lire aussi : Brésil: le premier bilan économique de Bolsonaro entaché par un PIB décevant

Frontières ouvertes

La compétence du ministre de la Santé Henrique Mandetta, qui a dès le début pris la mesure de la crise, lui vaut l'inimitié présidentielle, selon les commentateurs.

"C'est gravissime qu'au moment de la pire crise sanitaire du Brésil [moderne], le président Bolsonaro essaie de savonner la planche de son ministre de la Santé", estime Gaspard Estrada, spécialiste de l'Amérique latine à l'Institut d'études politiques de Paris.

"On demande qu'il y ait un capitaine à la barre en de tels temps de crise", ajoute-t-il, "or Bolsonaro n'est pas fait pour être un capitaine à la barre".

Sous la pression des présidents de la Chambre des députés, du Sénat, de la Cour suprême et de milieux d'affaires très inquiets, Jair Bolsonaro a fini par réunir mercredi un comité de crise interministériel, après avoir demandé au Parlement l'état de calamité publique qui libérera des fonds.

Contrairement à son modèle, le président américain Donald Trump qui évoque désormais "un temps de guerre" après avoir minimisé la menace, "on ne voit pas Bolsonaro faire un virage à 180 degrés", estime M. Estrada.

Le Brésil, contrairement à l'Argentine ou au Chili, maintient ses frontières ouvertes.

Les mesures de soutien économique (147 milliards de réais, 26 milliards d'euros) ont été jugées largement insuffisantes pour un pays menacé d'une nouvelle récession.

"L'équipe économique prend des mesures dans tous les secteurs", mais "le président va dans la direction opposée", juge Margarida Gutierrez, professeur d'économie à l'Université fédérale de Rio.

La crise du coronavirus a fait chuter la Bourse de Sao Paulo de 44% depuis fin janvier et sombrer le réal.

"Irresponsabilité politique"

Ciro Gomes, ex-candidat de centre gauche à la présidentielle, a férocement dénoncé sur Twitter cette "crapule irresponsable qui nous gouverne". "Dans deux semaines va commencer un pic de contaminations au Brésil! Mets-toi au boulot, pauvre type!", a-t-il lancé.

Les provocations du président sont très mal passées. Dimanche, il avait serré les mains de sympathisants alors qu'il aurait dû être confiné après un voyage aux États-Unis avec sa délégation dont 17 membres sont contaminés.

Selon la presse, il aurait été en contact avec 272 partisans. "Une démonstration d'irresponsabilité politique et personnelle", pour le journal O Globo.

La posture de M. Bolsonaro risque d'être coûteuse politiquement. "Sa situation politique va se fragiliser", prédit Gaspard Estrada, "sa base électorale tend à se rétrécir".

L'inquiétude a gagné jusqu'à son propre camp, où Janaina Paschoal, députée de l'État de Sao Paulo, a souhaité qu'il quitte sa charge pour "crime contre la santé publique". Une demande de destitution a été déposée par le parti d'opposition Rede.

Commentaires 6
à écrit le 20/03/2020 à 11:35
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Sinistre personnage ayant la science infuse...il finira par dégager comme tous les populistes au pouvoir...

à écrit le 20/03/2020 à 9:42
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"Sa situation politique va se fragiliser", On connaît le refrain médiatique.

à écrit le 19/03/2020 à 18:00
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Vous voyez la paille que votre voisin a dans l’œil mais vous n'avez pas vu la poutre qui est dans le votre. Le Brésil a 10 pays frontaliers, c'est pas simple Si vous étiez mieux informés, il faut savoir que les députés, les sénateurs, le tribunal s...

le 19/03/2020 à 18:43
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a vos yeux, la conduite de J Bolsonaro est donc irréprochable !!! La situation liée à cette pandémie est anecdotique, les morts qui s'entassent dans les salles mortuaires sont quantités négligeables, l'aggravation de la contagion à travers le monde ...

le 19/03/2020 à 20:39
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Vous n'avez honte de rien vous. Votre admiration envers Bolsonaro occulte complétement votre sens critique. Quand on est aux responsabilités, on est responsable, trop facile d'accuser les autres. D'autant plus que ce sont des sujets où il est facile ...

le 20/03/2020 à 10:03
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"Vous voyez la paille que votre voisin a dans l’œil mais vous n'avez pas vu la poutre qui est dans le votre. Le Brésil a 10 pays frontaliers, c'est pas simple" D'accord avec vous jusque là, dommage que votre messe viennent ensuite discréditer l'...

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