Fiscalité : pourquoi la Suisse n'est plus aussi paradisiaque

Obligée de revoir sa réglementation en matière de fiscalité et d'en finir avec sa complaisance envers l'évasion fiscale, la Confédération helvétique perd progressivement ce qui faisait son mythe, mais reste compétitive.
Jean-Christophe Catalon
Le Conseil fédéral a mis au point une réforme de l'imposition pour tenter de conserver sa compétitivité fiscale.

Une fiscalité avantageuse pour les entreprises comme pour les particuliers et des banques savantes dans l'art de la discrétion, la Suisse a longtemps été un paradis pour un business qui n'a que faire de la morale. Mais voici que la Confédération helvétique commence à perdre ce qui faisait son mythe.

La succession de révélations sur l'évasion fiscale, les SwissLeaks, ont dévoilé le système frauduleux établi de l'autre côté du lac Léman. À la suite des LuxLeaks et Panama Papers, les acteurs internationaux n'ont eu d'autre choix que de réagir. Ainsi est né, à l'initiative de l'OCDE, la convention multilatérale sur l'échange automatique d'informations (AEOI en anglais) en matière fiscale, sur les comptes bancaires des non-résidents. Désormais, les administrations fiscales coopèrent pour traquer les fraudeurs. Impossible pour ces derniers de cacher de l'argent à l'étranger sans être rattrapés par le fisc. La Suisse fait partie des Etats signataires et a même débuté, le 1er janvier, la collecte des données financières qu'elle commencera à transmettre aux Etats concernés dès 2018. En toute logique, l'évasion fiscale devrait bientôt devenir de l'histoire ancienne.

La fin du statut fiscal particulier pour les entreprises

La Suisse est également en train de se séparer d'un autre appât à multinationales : sa fiscalité sur les entreprises. Contraint par les nouvelles règles internationales, elle doit mettre fin au statut fiscal particulier, une disposition réglementaire qui permet aux holdings, sociétés mixtes et auxiliaires d'être imposées au-dessous du barème de l'impôt sur les sociétés suisse.

Pour "conserver sa compétitivité fiscale", comme l'indique le département fédéral des Finances, et éviter de tenter les sociétés concernées à changer d'horizon, le Conseil fédéral veut appliquer de nouvelles mesures résumées sous l'acronyme RIE III, ou troisième réforme de l'imposition des entreprises. Divisées en deux axes, celle-ci consiste, en premier lieu, à favoriser fiscalement les dépenses en recherche et développement, explique la RTS, ce qui n'est pas sans rappeler le fameux crédit impôt recherche français. En second lieu, elle demande aux 26 cantons de baisser l'impôt sur les bénéfices, en compensation, la Confédération s'engage à augmenter la part du produit de l'impôt qui leur est versée.

Le texte soumis à référendum le 12 février

Les partis de droite, majoritaire au Conseil fédéral et au Parlement, défendent farouchement ce projet. D'après le quotidien genevois Le Temps, le ministre des Finances Ueli Maurer, n'a de cesse de répéter que sans ces nouvelles mesures, 24.000 entreprises pourraient délocaliser, faisant disparaître 150.000 emplois et induire un manque à gagner de 5 milliards de francs suisses (environ 4,7 milliards d'euros) pour les finances fédérales.

Ce qui n'est pas de l'avis de la gauche. Ses élus ont déposé en octobre les signatures nécessaires pour imposer la tenue d'un référendum sur la question. Celui-ci se tiendra le 12 février prochain. Pour les opposants, le texte vise surtout à favoriser les plus aisés et entraînerait des pertes fiscales d'au moins 2,7 milliards de francs suisses (environ 2,5 milliards d'euros). D'après un sondage réalisé en décembre, 50% des Suisse sont favorables à la réforme, mais avec 15% d'indécis le résultat est loin d'être garanti.

La Suisse reste compétitive

"Qu'il y ait une perte de compétitivité, c'est évident, mais de là à dire que le régime fiscal suisse devient aussi cher qu'en France, on en est loin", tempère Mabrouk Sassi, avocat à la Cour de Paris, spécialiste en contrôle fiscal. Si l'évasion fiscale n'est plus, la Suisse continue d'offrir de la stabilité et une main d'œuvres très qualifiée, le tout avec un taux d'imposition compétitif. La dégradation des avantages fiscaux n'est pas non plus assez brutale pour inciter les multinationales à déménager leur holding du jour au lendemain.

Comme le note Mabrouk Sassi, "les grands groupes n'ont pas délocalisé" à cause de la fiscalité et "l'économie se porte bien" malgré la fin de l'évasion fiscale, avec des estimations de croissance relevées pour 2016. Si la Confédération connaît un mouvement de délocalisation, celui-ci concerne avant tout l'industrie et ne résulte pas de la fiscalité mais du franc fort, selon le groupement d'entreprises economiesuisse dans les colonnes de Bilan. Alors que les holdings et les sociétés auxiliaires servent davantage à effectuer des tâches administratives.

Jean-Christophe Catalon
Commentaires 24
à écrit le 11/01/2017 à 12:30
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de toute façon "les français" n'aiment pas les suisses, et surtout ne les comprennent pas. Comme le souligne Pedro, le suisse est avant tout libéral alors que le français à une évidente tendance au collectivisme, surtout depuis qu'il est biberonné ...

à écrit le 11/01/2017 à 9:01
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SI c'est vrai on ne peut que dire qu'il était temps, cette neutralité économique de la Suisse l'a fait compromettre avec les pires régimes au monde dont celui des nazis, c'est bien beau de se dire que l'argent n'a pas d'odeur mais au final cela fini ...

le 11/01/2017 à 19:08
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Etes vous sur que la Suisse à plus collaboré avec les nazis que les français? INSTRUISEZ VOUS!

à écrit le 10/01/2017 à 23:19
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"Qu'il y ait une perte de compétitivité, c'est évident, mais de là à dire que le régime fiscal suisse devient aussi cher qu'en France, on en est loin". Euh alors pour les entreprises ok, par contre les particuliers ça dépend pour qui et dans quel can...

le 11/01/2017 à 9:03
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@ Clairvoyant La Suisse ne se résume pas à Genève. Ce que vous constatez à Genève n'est pas forcément valable pour d'autres cantons.

le 11/01/2017 à 9:54
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Vous avez tout a fait raison. Geneve n est pas la suisse ! L imposition suisse est tres differente de la france (en gros l etat federal taxe tres peu, le gors de l IR c est les villes et le canton). Les cantons romans sont bien plus gourmand que les ...

le 11/01/2017 à 12:51
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@Clairvoyant Ajoutons qu'en Suisse, ils ont également adopté un dispositif dont on a pu entendre parler récemment : l'imposition sur loyer fictif. Mais curieusement, dès qu'une officine mineure à vocation consultative évoque la piste, de nombreux...

à écrit le 10/01/2017 à 20:42
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La Suisse est compétitive pour la seule raison très simple, suivez mon regard, les Helvètes travaillent 45 heures ( et quand ils travaillent ils travaillent ;-) ) par semaine et 4 semaines de vacances par an tout simplement!!! Ce n'est pas sorcier ^...

le 10/01/2017 à 21:37
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N importe quoi ! Contrairement a la france la suisse n a pas un standard applique partout genre 35 h mais les suisses ayant un contrat de 45 h et 4 semaines de conges doivent etre ultra minoritaire. Et comme on a un taux de chomage tres faible, vo...

le 10/01/2017 à 22:35
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Vous n êtes pas Helvète de souche De un suisse. Vous êtes un Frouze démasqué qui critique a tout va les Suisses tout simplement. J affirme mordicus que les Suisses travaillent 45h et 4 semaines de vacances par an. Et quand ils travaillent très ef...

le 10/01/2017 à 23:25
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@Kiravi: les 4 semaines de vacances par an ok, par contre sur les 45h vous faites erreur. L'immense majorité des Suisses travaille 40-41h par semaine...à comparer au temps de travail REEL moyen en France: 39,3h par semaine. Pas de quoi fouetter un ch...

à écrit le 10/01/2017 à 20:19
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"Obligée de revoir sa réglementation". Par qui ? Par les USA qui cherche à éliminer toutes les paradis fiscaux qui ne contrôlent pas. Les iles caïmans, Hawaï, et l'état du Delaware se portent très bien.

à écrit le 10/01/2017 à 19:34
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Un des points fort de la Suisse est le pouvoir de se remettre en question et de changer et de s'adapter. C'est exactement ce qui manque en France. L'imposition en Suisse n'est pas faible, mais il y a quelque chose en retour et l'état ne finance pas ...

le 10/01/2017 à 23:28
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"Il y a quelque chose en retour"...voilà clairement les propos de quelqu'un qui n'a jamais vécu en Suisse, et qui fantasme autant l'improductivité des fonctionnaires français que la redistribution helvétique !

le 11/01/2017 à 8:01
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Le jour où on mettra fin à l'évasion fiscale et à l'optimisation fiscale, ce qui à mon avis pourrait arriver, là on verra la capacité d'adaptation de la Suisse.

à écrit le 10/01/2017 à 17:18
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Euh, comment dire??? La Suisse est encore et toujours le pays le plus compétitif du monde, selon le dernier classement du Word Economic Forum. Par ailleurs, la raison principale qui lui a fait perdre un peu de sa compétitivité, c'est le renchériss...

le 10/01/2017 à 17:56
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Facile d'être numéro 1 de la compétitivité avec de tels taux d'impôts! C'est dommage que cela se fasse au détriment des autres Etats européens... eh oui, il sera temps que les multinationales paient leurs impôts dans le pays où elles réalisent leurs ...

le 10/01/2017 à 19:52
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Un pays bien administré peut fonctionner avec de faible impôts CQFD. L'éducation publique est de qualité. L'assurance maladie est privée et le système de santé est très bon. Le contrat de travail est unique et le licenciement est "facile". Ce pa...

le 10/01/2017 à 23:42
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@pedro: hahahaha alors nous dire que "l'assurance maladie privée et le système de santé est très bon" FALLAIT VRAIMENT OSER !! Ca doit être pour ça qu'il y a une vingtaine de cabinets dentaires à Ferney-Voltaire (pour 6000 habitants)...le système sui...

le 11/01/2017 à 8:59
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"Il y a quelque chose en retour" cela veut dire qu'en Suisse, il y a l'électricité même lorsqu'il neige ou lorsqu'il y a une tempête, il y a des transports publiques qui fonctionnent et en nombre suffisant, il y a des routes propres et sans tro...

le 11/01/2017 à 9:17
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@ Clairvoyant Le système de santé suisse est certes onéreux et ne pourra pas persister sous sa forme actuelle. Il n'en reste pas moins qu'il est bon en comparaison à d'autres systèmes de santé comme le système britannique par exemple. Mais pour ma...

le 11/01/2017 à 9:38
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@clairvoyant. Vous êtes assez péremptoires. La Suisse n'est pas les Etats-Unis et je ne suis pas d'origine portugaise... Le système de santé français est nettement supérieur au suisse question déficit et désert médicaux. Les suisses pauvres ont de...

le 11/01/2017 à 12:21
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La politique fiscale fait partie des prérogatives des états. La seule contrainte devrait être que les entreprises locales et étrangéres aient le même taux d'imposition. C'est ce que la Suisse est en train de réaliser, avec des taux bas. Les mauvais é...

à écrit le 10/01/2017 à 17:00
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"Confédération hellénique"..... Il fallait oser!!! Vous vous relisez parfois???

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