Guerre en Ukraine : la cheffe de la diplomatie allemande déçue du faible impact des sanctions

Par latribune.fr  |   |  804  mots
Berlin se dit déçu du faible impact des sanctions contre la Russie. (Crédits : IRAKLI GEDENIDZE)
Dans le livre « Ernstfall. Regieren in Zeiten des Krieges », la cheffe de la diplomatie allemande Annalena Baerbock a exprimé sa déception quant à l'impact des sanctions visant la Russie. Si l'économie russe a été fragilisée, elle ne s'est cependant pas effondrée.

L'économie russe tient debout, au grand regret de Berlin. Annalena Baerbock, ministre fédérale allemande des Affaires étrangères, a fait part de sa contrariété face à l'impact moindre qu'escompté des multiples sanctions économiques occidentales contre la Russie, après l'invasion de l'Ukraine. Les propos de la cheffe de la diplomatie allemande sont contenus dans « Ernstfall. Regieren in Zeiten des Krieges » (« Situation d'urgence. Gouverner en temps de guerre »ndlr), un livre publié récemment aux éditions C.H. Beck en Allemagne. L'ouvrage porte notamment sur la gestion de la guerre en Ukraine par le gouvernement allemand.

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« En principe, des sanctions économiques devraient avoir des conséquences économiques, mais ce n'est pas le cas » concernant la Russie, a déclaré Annalena Baerbock au journaliste Stephan Lamby dans une interview réalisée au début du mois de juillet.

« L'expérience que nous avons faite est qu'il n'est pas possible de mettre fin à cette guerre via des décisions et des mesures rationnelles (...), car les logiques des démocraties précisément ne fonctionnent pas dans les autocraties », a ajouté la ministre.

Les sanctions des pays occidentaux

Les propos de la ministre sont de nature à alimenter le débat, y compris en Allemagne, sur la pertinence des sanctions économiques et financières contre Moscou, adoptées dès le début de la guerre. L'Union Européenne a notamment interdit le transport maritime du pétrole brut russe (au 5 décembre 2022) et de produits pétroliers (au 5 février 2023) vers des pays tiers.

En mai, la Commission européenne a annoncé un onzième train de mesures restrictives envers la Russie destinées à éviter le contournement des sanctions européennes, a annoncé son porte-parole.

« L'objectif est d'éviter que des biens interdits d'exportation vers la Russie ne trouvent un chemin pour approvisionner le complexe militaire russe », a expliqué Eric Mamer.

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De leur côté, les Etats-Unis ont placé en juillet plus de 120 entreprises russes et kirghizes sur leur liste noire, sanctionnant ainsi leur contribution à la machine de guerre russe en Ukraine. Les sanctions visent notamment à restreindre l'accès de la Russie à du matériel sous embargo, dont des composants électroniques qui peuvent être réutilisés par le complexe militaro-industriel, a indiqué le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, dans un communiqué.

« Ces sanctions empêcheront la Russie d'accéder à des matériaux essentiels, inhiberont ses capacités futures de production et d'exportation d'énergie, limiteront son utilisation du système financier international et réprimeront ceux qui se rendent complices du contournement des sanctions », a-t-il affirmé.

L'économie russe tient bon malgré les difficultés

L'objectif est de réduire la capacité de la Russie à mener le conflit, mais pour l'instant, le succès est mitigé. Certes, l'économie russe est fragilisée, mais elle ne s'est pas effondrée. Selon un rapport du Fonds monétaire international (FMI), publié en début d'année, même si la Russie est certes tombée en récession l'année dernière, la baisse de PIB est relativement modeste (-2,2%), loin des prévisions du FMI réalisées au printemps 2022 qui anticipaient une chute de 8,5 % du PIB russe en 2022.

« L'économie est revenue sur la trajectoire de la croissance » et, dès l'an prochain, « la Russie s'engagera sur la voie d'un développement progressif à long terme »,avait déclaré le Premier ministre russe Mikhaïl Michoustine au mois de mars.

Début mars 2022, la Russie profite des prix records du gaz européen, les deux références mondiales du brut évoluant largement au-dessus des 100 dollars le baril, propulsés par les risques géopolitiques. Or, l'essentiel du pétrole se négociant en dollars sur le marché mondial, la Russie a récupéré d'importantes sommes en billets verts provenant de la vente de son or noir, qu'elle a converti ensuite en roubles, ce qui a soutenu sa monnaie. D'après le Centre for Research on Energy and Clean Air (CREA), un institut de recherche basé en Finlande, Moscou a engrangé une somme de plus de 400 milliards d'euros depuis le début de la guerre en Ukraine grâce à ses exportations de pétrole, de gaz et de charbon.

Mais face au tarissement des recettes d'hydrocarbures (la variété de référence du pétrole russe s'échange désormais au-dessus du plafond des 60 dollars le baril) et à la fuite de capitaux hors de Russie, le rouble se retrouve au plus bas face au dollar depuis mars 2022. Lundi 15 août, la devise est tombée à 102,23 roubles pour un dollar, et presque 111,70 roubles pour un euro.

(Avec AFP)