Chez Leroy Merlin, célèbre enseigne de bricolage, le mouvement de grève qui dure depuis le 17 novembre, ne vaut-il pas avertissement pour les autres entreprises ? Ce mardi 30 novembre, après 15 jours de conflit, se tient la première discussion entre la direction et l'intersyndicale. Il aura fallu le blocage d'entrepôts et les débrayages dans plusieurs magasins pour que l'échange se fasse. A l'origine de la colère, les salariés invoquent les conditions de travail pendant la pandémie. Mais depuis dix jours, c'est bien sur les rémunérations que portent les revendications des grévistes. L'intersyndicale - FO, CGT, CFTC, et CFDT- demande des hausses de salaires mais aussi des primes.
Des négociations salariales tendues dans les entreprises
Pour François Hommeril, à la tête du syndicat CFE-CGC des cadres, rien d'étonnant : "dans les sociétés, surtout comme Leroy Merlin qui ont bien fonctionné pendant la crise, le climat est actuellement très crispé. Le rendez-vous des salaires se tient dans un contexte où les profits des entreprises - en moyenne- n'ont jamais été aussi élevés". Aussi, selon lui, "les gens en ont bavé, ça fait des années que les salaires augmentent peu et ils veulent aujourd'hui, bénéficier de ces bons résultats... le risque d'explosion est réel".
Même constat inquiet du côté de Force ouvrière, où le secrétaire général Yves Veyrier prévient : "Oui, les négociations sont tendues. Dans la grande distribution, chez Lidl ou Auchan, si ça ne se débloque pas, par exemple, il faut s'attendre à des grèves en décembre, car le gros sujet de la hausse des prix impacte surtout les bas salaires ou les salaires intermédiaires".
L' inflation s'installe en France
Obtenir un peu de pouvoir d'achat en plus, pour parvenir à boucler les fins de mois, ce mot d'ordre peut faire tache d'huile alors que l'inflation s'installe en France. En novembre, l'indice a progressé jusqu'à 2,8% sur un an, a indiqué, ce mardi, l'Insee. Une hausse essentiellement tirée par une accélération des prix de l'énergie, des produits manufacturés, et dans une moindre mesure, ceux des services, sous l'effet de la reprise.
Pour y faire face, les Français ont commencé par ajuster leur consommation. Alors même que celle-ci reste soutenue, l'Insee note toutefois un recul de 0,4% sur un mois en raison notamment de la baisse de 1,8% de la consommation des biens fabriqués. Par exemple, ils achètent moins d'habillement et de textile. En revanche, il leur est plus difficile, alors que l'hiver arrive, de réduire la consommation d'énergie qui a repris en octobre, avec une hausse de 1%.
D'autres mouvements sociaux à attendre cette fin d'année
Reste que se serrer la ceinture ne suffira pas, assurent les syndicats. D'où ces mouvements qui fleurissent ici et là, un peu partout dans l'Hexagone, dans les secteurs privé et public. Ainsi, à l'entrée du Havre, ce mardi 30 novembre, la circulation était ralentie du fait d'un mouvement de grève des travailleurs portuaires. À Biot, dans le sud, le personnel de l'Institut médico-éducatif « Les Hirondelles » qui accueille des jeunes handicapés débraie pour demander une hausse des salaires. Egalement exclus du Ségur de la santé et mécontents de leur statut, les ambulanciers manifestent à Paris, ce mardi, devant le ministère de la Santé. Même ras-le-bol à Roanne, au laboratoire Bouvier où à l'appel de la CFDT, les salariés réclament eux aussi une revalorisation salariale. Dans le Rhône, la CGT, appelle les salariés des cars VFD à faire grève ce mardi 30 novembre. En cause, des conditions de travail difficiles et des salaires jugés trop bas.
La liste est longue. Surtout, elle promet de ne pas s'arrêter... Ce mercredi, ce seront les agents commerciaux des gares de Transilien SNCF qui appellent en Île-de-France à cesser le travail. Ils entendent protester contre un plan d'évolution des gares et demandent des hausses de salaires et des embauches. A Marseille, les éboueurs relancent leur mouvement...
"Dans les entreprises, il y a plusieurs cas de figure, précise toutefois Yves Veyrier de FO. Certaines ont déjà promis des augmentations, qui s'apparentent plus à des rattrapages et prévoient en moyenne 2,5% de hausse."
Du côté du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, qui tenait une conférence de presse ce mardi, se montre plutôt confiant. A ses yeux, les discussions sont actives dans les entreprises et les branches professionnelles. Le patron des patrons explique toutefois être "incapable de dire à quel niveau se porteront ces hausses", mais il parie sur des augmentations de rémunération signifiantes, via notamment la montée en flèche des systèmes d'intéressement et de participation, mais aussi de primes défiscalisées.