PODCAST Coup de pompe sur la revente à perte des carburants

HISTOIRES ECONOMIQUES. La proposition d'Elisabeth Borne de vente du carburant à perte a été rejetée par la grande distribution. Écoutez chaque mardi 6h48 la chronique "Histoires Economiques" de Philippe Mabille dans le 5/7 de France Inter.
Philippe Mabille
(Crédits : GONZALO FUENTES)


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On peut dire que cette mesure fait l'unanimité contre elle. Les patrons de Carrefour, Leclerc, Intermarché et Système U ont opposé un non catégorique hier à cette possibilité de vendre du carburant en dessous du prix coûtant. Celui de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a été encore plus tranchant : déjà plafonné à 1 euro 99, il ne descendra pas plus bas et appelle le gouvernement à "un peu de bon sens".

Ces réactions ne sont pas vraiment une surprise

On est tenté de se demander quelle mouche a piqué la Première ministre de remettre en cause une loi vieille de 60 ans, née de la volonté de protéger le petit commerce de proximité contre le dumping des grandes surfaces naissantes.

La réponse est bien évidemment plus politique qu'économique. L'exécutif tente de trouver une solution pour empêcher les prix à la pompe de repasser au-dessus des 2 euros le litre dans un contexte de hausse des cours du pétrole. Sans rétablir bien sûr la ristourne sur les carburants qui a coûté l'an dernier 8 milliards d'euros au budget. 
Face à l'opposition qui réclame une baisse des taxes sur l'essence et le diesel, il s'agit de refiler le mistigri au secteur privé sur le thème « à votre tour de faire un effort ».

Pour l'instant, c'est un flop, on voit que les distributeurs n'ont pas envie de le faire, cet effort

Mais Élisabeth Borne ne renonce pas. La mesure sera soumise au parlement à la fin du mois, dans un texte qui permettra aussi de rouvrir dès cet automne les négociations commerciales. L'autorisation de vendre à perte serait applicable du 1er décembre au 1er juin, pour six mois. Pour sauver la face, le gouvernement dit qu'il ne s'agit que d'un droit et non d'une obligation. Le pari, c'est que certaines enseignes finissent par se saisir de cette possibilité pour multiplier les opérations promotionnelles. Les quelques centimes gagnés au litre sur un plein seraient récupérés par une hausse de leurs volumes de ventes en magasin.

Olivier Véran a fait preuve d'optimisme en parlant de 50 centimes. En réalité, ce sera sans doute moins de 10 centimes le litre, au risque d'engendrer une grande frustration chez les automobilistes quand ils feront leurs comptes. D'autant que certains supermarchés seront sans doute tentés de compenser en rayon la marge qu'ils perdront à la pompe.

Dernier point, autoriser la vente à perte des carburants fossiles au moment où l'on veut encourager l'achat de voitures électriques manque pour le moins de cohérence. Preuve s'il en est besoin que dans le match « fin du monde, fin du mois », c'est pour l'instant toujours la fin du mois qui gagne. Au risque de brouiller le message des annonces de la planification écologique prévues lundi.


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Philippe Mabille
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