"Salle de shoot" : des économies pour la Sécu ?

Alors que Paris inaugure la première salle de consommation de drogue à moindre risque de France, retour sur les expériences menées à l'étranger.
Jean-Christophe Catalon
À Vancouver, le bénéficie sociétal d'une salle de shoot s'élève à plusieurs millions de dollars.

La France tente un nouveau dispositif dans la prévention des drogues. Ce mardi, une "salle de shoot" est inaugurée à l'hôpital Lariboisière dans le 10e arrondissement de Paris. Le dispositif doit permettre aux consommateurs de drogue d'effectuer leur prise dans de meilleures conditions sanitaires, afin de limiter la contraction et la transmission de maladies. Il fait suite à un arrêté de la ministre de la Santé, Marisol Touraine de mars dernier, autorisant l'expérimentation de ces centres de consommation à moindre risque.

Trente ans après l'ouverture de la première salle à Berne (Suisse), l'Hexagone entre dans le club restreint des pays ayant recours à ce genre de dispositif. Aujourd'hui, il existe plus de 80 salles de ce genre réparties entre l'Allemagne, l'Espagne, la Grèce, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-bas et la Suisse, ainsi que l'Australie et le Canada.

Des vies sauvées et des économies

  • Baisse du nombre de décès et des transmissions de maladies infectieuses

L'expérimentation française a été lancée afin d'observer si les salles de shoot répondent effectivement à leurs objectifs sanitaires, notamment "éviter les infections, les surdoses mortelles et les autres complications sanitaires des usagers", d'après le ministère de la Santé. À l'étranger, elles ont déjà fait leurs preuves. Le Consortium international sur les politiques des drogues (IDPC) a fait le bilan en 2012 des résultats obtenus par les pays ayant mis en place ce dispositif. Conclusion :

"Suite à l'introduction des SCMR [Salles de consommation à moindre risque, NDLR], le nombre de décès liés à la consommation de drogues a diminué. Plusieurs études ont démontré l'impact positif des SCMR sur la réduction du taux d'infection au VIH et à l'hépatite C chez les jeunes usagers de drogues."

La salle de shoot (MSIC) de Sydney (Australie) a fait l'objet d'une grande enquête entre 2007 et 2011 par le cabinet KPMG. "De l'ouverture du service le 6 mai 2001 au 30 avril 2010, 3.426 overdoses ont été gérées avec succès par les équipes du MSIC. Il n'y a eu aucune overdose mortelle" sur cette période, souligne le cabinet.

Si la consommation de drogues illicites reste un problème majeur en France, le nombre de morts est bien moins important que dans d'autres pays occidentaux.

Graphique drogue

  • Des économies substantielles sur les dépenses de santé

Contrairement aux bilans sanitaires, l'impact économique de ces dispositifs n'est pas systématiquement mesuré. Pourtant, ils peuvent avoir des effets non négligeables sur les dépenses des systèmes de santé locaux et de police.

Fondée en 2003, l'ONG Insite gère le premier centre d'injection supervisé (SIF) de l'Amérique du Nord. Installée à Vancouver, la salle de shoot empêche 35 nouveaux cas de VIH et évite 3 morts en moyenne par an. Résultat, elle génère un bénéfice sociétal de 6 millions de dollars par an - coût du dispositif inclus - selon un article publié en 2010 dans l'International Journal of Drug Policy. Le calcul concerne notamment les économies sur les coûts de prise en charge des nouveaux malades.

L'opinion publique parfois difficile à convaincre

L'arrivée de consommateurs de drogues dans son quartier est rarement perçue comme une bonne nouvelle par les riverains. Certains craignent notamment une hausse du trafic de stupéfiants près de chez eux. En 2012, la vice-présidente de la fédération mondiale contre les drogues, Joséphine Baxter, avait déclaré que les salles de shoot créaient un "effet pot de miel" pour les dealers. Une expression largement reprise par les opposants au dispositif.

Reste que "si l'opinion publique est souvent contre l'introduction de tels établissements, l'acceptation publique est considérablement élevée dans les endroits où les SCMR ont été mises en place", observe l'IDPC. En Suisse, les autorités ont lancé un référendum en 1997 sur la fermeture des salles de shoot. Plus de 70% ont voté contre.

À Paris, l'expérimentation va durer six ans et une autre salle doit ouvrir à Strasbourg d'ici la fin du mois.

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(*) Le graphique a été réalisé par notre partenaire Statista.

Jean-Christophe Catalon
Commentaires 4
à écrit le 12/10/2016 à 21:01
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LES SALLES DE SHOOT NE SONT QUE DES SALLES DE SOINS UN PEUT COMME DES HOPITAUX POUR AIDE LES DROGUES A SE PRENDRE EN MAIN AVEC DES PROFESSIONNELS DE SANTE? ? NOUS DEVON ALLEZ VERS UNE VENTE D ETAT REGLEMENTE? AFIN DE NE PLUS PERMETRE UN MARCHE PARALE...

à écrit le 12/10/2016 à 3:59
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L'article s'appuie sur un graphique qui affirme: 4 morts par million d'habitants/an par drogue en France ~90 pour le Royaume-Uni ~100 pour la Suède... Non on ne meurt pas 20 ou 25 fois plus qu'en France dans ces pays à cause de la drogue, sinon o...

à écrit le 11/10/2016 à 20:49
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Donc quand on shoote les drogués, la Sécu fait des économies ?

à écrit le 11/10/2016 à 16:39
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C'est une idée progressiste certes mais pas assez et comme le sujet est sensible cela peut vite se transformer en drame. Voyez comme par exemples certaines personnes ont très mauvaise mentalité, vous n'avez pas besoin de faire beaucoup d'efforts ...

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