Italie : cinq chiffres à savoir sur une économie sous tension

Par Grégoire Normand  |   |  909  mots
Le tourisme représente une opportunité économique considérable pour l'Italie. (Crédits : Reuters)
Le président italien Sergio Matarella, a chargé lundi 28 mai l'économiste Carlo Cottarelli de former un gouvernement technique jusqu'à la tenue de nouvelles élections. Malgré cette solution provisoire qui a rassuré les marchés, l'économie italienne demeure très fragile.

Les tensions sont palpables en Italie. Giuseppe Conte, proposé par le Mouvement 5 étoiles (M5S) et la Ligue (Extrême droite) pour prendre le poste de président du Conseil, a renoncé. Le président Italien Sergio Mattarella devait rapidement nommer un chef de gouvernement afin d'assurer les affaires courantes. Il a rencontré Carlo Cottarelli, un économiste de 64 ans, ancien haut responsable du Fonds monétaire international (FMI) surnommé "M.Ciseaux" pour son rôle dans la réduction des dépenses publiques en 2013-2014 sous les gouvernements de centre gauche.

Actuel directeur de l'Observatoire des comptes publics, il devrait être chargé de former ce gouvernement technique. En attendant, la troisième économie de la zone euro est sous haute tension. Retour en cinq chiffres sur les faiblesses de l'économie italienne.

■  132% du PIB

C'est le montant de la dette publique en Italie qui correspond au ratio le plus élevé de l'Union européenne, après celui de la Grèce. Si le déficit public a clairement reculé depuis 2014 passant de -3% du PIB à -1,9% en 2017, la situation des finances publiques est loin d'être favorable. À la fin du mois de mars dernier, la dette de l'Italie pesait plus de 2.300 milliards d'euros. Le ratio est passé de 54% du PIB en 1980 à 132% en décembre dernier selon des chiffres de la banque d'Italie rapportés par l'AFP.

S'il est encore difficile de développer des perspectives fiables au regard du contexte actuel, la Commission européenne estime que la dette devrait atteindre 130,7% du PIB en 2018 et 129,7% en 2019 d'après des chiffres publiés au début du mois de mai. En valeur absolue, elle devrait atteindre 2.347 milliards d'euros.

La semaine dernière, le président de la confédération générale de l'industrie italienne a réclamé un plan de réduction de la dette au Mouvement 5 étoiles et à la Ligue. Mais malgré ces inquiétudes, la détention de la dette publique italienne "est devenue très domestique : en 2006, 51% de la dette publique de l'Italie était détenue par les non-résidents, aujourd'hui c'est 34%, et de plus, les individus détiennent une partie importante de la dette" souligne l'économiste de Natixis Patrick Artus.

Selon ce dernier, "pour qu'il y ait une crise de la dette publique en Italie, il faudrait que les Italiens eux-mêmes paniquent et vendent la dette publique italienne qu'ils détiennent, ce qui est très improbable."

■ 1,4%

C'est le taux de croissance du Produit intérieur brut italien prévu pour 2018. Alors que la croissance s'est accélérée en 2017 à 1,5% après 0,9% en 2016, l'activité devrait ralentir au cours des prochains moins. Surtout, le gouvernement sortant prévoyait une croissance de 1,5% pour l'année en cours. Cette révision à la baisse du PIB italien ne devrait pas faciliter la tâche du futur gouvernement pour la mise en application des réformes. La hausse du pétrole et le ralentissement du commerce mondial devraient entraver les performances commerciales extérieures de la péninsule.

Lire aussi : Italie : la croissance révisée à la baisse pour 2018

■ 11%

C'est le taux de chômage de l'Italie, au sens du bureau international du travail. C'est le quatrième taux le plus important du Vieux continent après la Grèce, l'Espagne, et Chypre selon Eurostat. Concernant les perspectives, Istat envisage une amélioration du marché du travail avec une augmentation des créations d'emploi de 0,8% pour 2018. Ce qui permettrait à l'Italie de connaître une évolution favorable du chômage à 10,8% pour 2018 et 10,6% en 2019 selon les dernières projections de la Commission européenne.

Malgré cette légère amélioration, les régions du Sud de l'Italie restent particulièrement frappées par un chômage de masse avec des taux avoisinant les 30%.  Enfin, même si le chômage des jeunes a reculé, il reste à des niveaux considérables (34,9%). La réforme du Job Acts mise en place sous Matteo Renzi n'a pas produit les effets escomptés. Les créations d'emplois promises par une plus grande flexibilité du marché du travail n'ont pas permis de réduire fortement le chômage ni de réduire la précarité toujours bien présente en Italie.

■ 30%

Selon des estimations de l'Istat de décembre dernier, la part de la population exposée à des risques de pauvreté ou d'exclusion sociale s'est élevée à 30% en 2016 contre 28,7% en 2015. C'est un record depuis au moins 2004. La zone géographique la plus touchée est le Mezzogiorno au sud de l'Italie avec de taux parfois supérieurs à 45%. À titre de comparaison, le taux moyen de risque de pauvreté ou d'exclusion sociale dans l'Union européenne s'élève à 23,5%.

■ -0,3%

Le recul de la productivité est préoccupant pour l'économie italienne. Entre 2000 et 2016, la productivité a baissé de 0,3% en rythme annuel dans l'ensemble de l'économie selon des données publiées par l'Insee dans une étude de comparaison internationale. Cette baisse est particulièrement marquée dans les services aux entreprises (-2,4%) et/ou les "autres services aux ménages". Ces diminutions répétées pèsent régulièrement sur l'économie italienne. Selon une note de blog de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) publiées en novembre dernier, "le cycle de productivité italien demeure très dégradé, malgré la révision à la baisse de la tendance de productivité (-1,0 % pour la période 2015-2019)".

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