L'OCDE demande à l'Allemagne de dépenser plus

L'organisation internationale estime que pour relever ses deux grands défis, la baisse de la productivité et le vieillissement de la population, l'Etat et les entreprises allemandes doivent investir beaucoup plus.
Le gouvernement allemand entendra-t-il l'appel de l'OCDE ?

Dans son enquête annuelle parue ce 5 avril, l'OCDE appelle l'Allemagne à investir plus pour garantir sa croissance à long terme. L'organisation relève ainsi deux défis majeurs pour la première économie européenne : l'affaiblissement de la productivité et le vieillissement de la population. Et pour cela, il conseille à l'Allemagne d'investir davantage d'argent public et privé.

La faiblesse de la croissance de la productivité

Le premier défi de l'Allemagne est donc la faible croissance de sa productivité. Un phénomène surtout perceptible dans le secteur des services et qui explique aussi la vigueur de la baisse du chômage outre-Rhin. L'OCDE rappelle qu'une « plus forte croissance de la productivité sera critique pour maintenir le niveau de vie à moyen et long terme, compte tenu du vieillissement de la population. » Ce problème de productivité n'est pas sans relation avec la réduction des coûts, une politique largement vantée par les institutions européennes et le gouvernement allemand, mais qui incite peu à l'investissement, notamment dans les services, secteur que l'OCDE juge par ailleurs « protégé » en Allemagne.

Rien d'étonnant alors à ce que « le gouvernement et les entreprises aient peu profité des taux d'intérêt bas pour renforcer leurs investissements en dépit de finances publiques saines et de forts profits privés », comme le note l'organisation qui pointe du doigt le danger sur la « compétitivité à long terme » du pays d'une telle politique. L'OCDE met notamment en avant la faiblesse particulière du « capital basé sur la connaissance » (« knowledge-based capital » ou KBC) qui est un facteur clé pour la productivité.

Problème de demande

Pour expliquer la faiblesse de l'investissement, l'OCDE met en avant le problème de demande. « La demande est un déterminant clé de l'investissement privé et la faiblesse de la demande dans les zones géographiquement proches comme la zone euro, pèse particulièrement sur l'investissement », explique le rapport. En cela, l'Allemagne, qui a défendu des politiques d'affaiblissement des demandes intérieures depuis 2010 est la victime de sa propre stratégie. Mais l'OCDE souligne d'autres éléments plus « structurels » comme la fermeture du secteur des services, notamment dans certains services aux entreprises.

Plus d'investissement public

L'OCDE enfin souligne que la « faiblesse de l'investissement public pose des risques pour une croissance inclusive à long terme. » L'investissement public est en fort déclin en Allemagne depuis 15 ans, notamment au niveau des municipalités. Les standards de l'infrastructure de transport ont nettement reculé et la prise en charge de la petite enfance reste faible. Or, ce dernier élément est un élément clé non seulement de justice sociale, mais aussi pour contrer les effets du vieillissement de la population en favorisant le travail à temps plein des femmes pour compenser les départs en retraites.

Plus de dépenses pour l'intégration nécessaires

Car ce vieillissement est clairement le deuxième défi majeur de l'Allemagne. « L'offre de travail devrait reculer plus rapidement que la population », met en garde l'OCDE. L'organisation propose de repousser encore l'âge de départ à la retraite, qui déjà, sera relevée jusqu'à 67 ans en 2030. L'immigration, notamment l'arrivée massive des réfugiés en 2015 (près d'1,1 million de personnes) constitue, de ce point de vue, une chance, mais le rapport souligne que l'intégration de ces nouveaux arrivants nécessitera des « efforts budgétaires supplémentaires et des dépenses qui pourrait excéder la marge de manœuvre budgétaire actuelle. »

Une leçon qui ne sera pas retenue...

C'est donc un appel à sortir de la logique actuelle de thésaurisation du gouvernement allemand que lance l'OCDE. L'obsession du ministre des Finances allemand pour l'équilibre budgétaire fédéral joue en réalité, selon l'organisation, contre son objectif de protéger le pays des effets du vieillissement de la population. Compte tenu de la force morale de la logique du très populaire ministre des Finances, il est peu probable que les recommandations de l'OCDE soient suivies, ce qui représente un problème pour l'ensemble de la zone euro. Sans dynamique d'investissement en Allemagne, la zone euro risque de rester dans une période de croissance faible. D'abord pour des raisons de transmission directe de la demande allemande, mais aussi parce que l'Allemagne demeurera ainsi dans une logique de compétitivité prix pour compenser le manque de progression de sa productivité, ce qui affaiblira durablement sa demande.

Commentaires 4
à écrit le 06/04/2016 à 9:00
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C'est le même principe que la Chine, après la compétition il faut penser au bien être des compétiteurs!

à écrit le 06/04/2016 à 8:42
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Exact !! En étudiant les stats de l'OCDE, j'ai été surpris de la faiblesse du taux d'investissement des snf allemandes, sans parler de l'investissement public.... Tout cela beaucoup plus bas que Fr, avoisinant le minable taux UK. Alors les "économist...

à écrit le 06/04/2016 à 8:35
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les entreprises allemandes ont bcp investi ... dans les pays de l'est pour le reste, les allemands sont assez pingres, sauf question voitures (allemandes).... ca vient des privations d'apres guerre faut lire Heinrich Böll ' Haus ohne Hüter' pour co...

à écrit le 05/04/2016 à 18:23
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Je ne suis pas convaincu. L'Allemagne est en croissance et à l'équilibre budgétaire. On est tous d'accord que si elle dépensait plus d'argent, sa croissance et celle de ses voisins serait supérieure. Sauf qu'en faisant ça, elle s'endetterait et elle ...

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