
Le gouvernement n'a pas manqué de se satisfaire des derniers chiffres du chômage. « Cela fait 40 ans que le niveau du chômage n'avait pas été si bas. Objectif plein-emploi ! », a salué Emmanuel Macron sur Twitter.
«Nous allons continuer à nous battre pour le plein emploi par la formation, l'apprentissage, le soutien à l'économie et un accompagnement renforcé des plus fragiles dans le cadre du projet France Travail », a abondé le ministre du Travail, Olivier Dussopt.
L'institut de statistiques (Insee) a annoncé ce mercredi 17 mai que le taux de chômage au sens du bureau international du travail (BIT) s'était stabilisé à 7,1% de la population active au premier trimestre. Le chômage est ainsi plus bas de 0,3 point par rapport au premier trimestre 2022 et de 3,4 points par rapport au sommet de 2015. Il s'agit d'un taux inédit depuis 1982 d'après les statisticiens.
En valeur absolue, le nombre de chômeurs en France s'établit à 2,2 millions de personnes, soit une très légère baisse sur le trimestre (-7.000). « En France, l'apprentissage peut expliquer cette baisse, mais aussi les services. La pandémie et la crise énergétique ont plombé l'industrie. Le tertiaire a tiré la croissance », explique l'économiste d'ING, Charlotte de Montpellier interrogée par La Tribune.
Alors que l'économie tricolore tourne au ralenti, la proportion de chômeurs continue de reculer. « C'est une surprise post-pandémie qui se prolonge », ajoute l'économiste. «Le contexte est surprenant. La reprise économique après la crise sanitaire s'est montrée riche en emplois », poursuit-elle. Autrement dit, la croissance actuelle crée plus d'emplois qu'elle ne produit de richesses. Ce qui pousse à faire baisser la productivité en Europe, c'est-à-dire la valeur ajoutée par salarié.
Le chômage des jeunes en baisse, celui des seniors rebondit
Dans le détail, le chômage des jeunes a certes reculé passant de 16,8% à 16,6% entre le dernier trimestre 2022 et le premier trimestre 2023. Mais il reste quasiment stable sur un an et demeure bien au-dessus de la moyenne. Au total, près de 550.000 jeunes âgés de 16 à 24 ans sont considérés comme chômeur au sens du bureau international du travail.
De son côté, le taux d'emploi a bondi de plus de 5 points chez les jeunes, depuis 2019, en grande partie en raison des embauches à l'apprentissage dopées par les aides du gouvernement.
À l'inverse, le chômage des plus âgés a rebondi, passant de 5% à 5,2% entre fin 2022 et début 2023. Ce qui est une mauvaise nouvelle alors que le gouvernement veut améliorer la participation des seniors au marché du travail après la promulgation de la réforme des retraites.
En Allemagne, le chômage est au plus bas mais.....
Outre Rhin, le chômage est au plus bas à 2,8% en mars selon les derniers chiffres d'Eurostat. Il a diminué par rapport à janvier et février (2,9%) mais aussi sur un an (3%). Là encore, cette diminution peut paraître surprenante au regard de l'essoufflement de la croissance allemande. « L'Allemagne se porte moins bien. L'économie est dans une situation beaucoup plus défavorable », souligne Charlotte de Montpellier. Compte tenu de la dépendance de l'économie allemande à l'énergie russe, le tissu productif a subi de plein fouet l'envolée des prix après l'éclatement de la guerre en Ukraine en février 2022. Résultat, l'industrie, moteur de l'économie continue de souffrir. Conséquence, les créations d'emplois pourraient marquer le pas.
L'Espagne, l'Italie et le Portugal profitent du retour des touristes
Dans le sud de l'Europe, les indicateurs sont au beau fixe. « En zone euro, les pays axés sur le tourisme comme l'Espagne, l'Italie ou le Portugal ont bénéficié de fortes créations d'emplois », a résumé Charlotte de Montpellier. La pandémie avait provoqué au printemps 2020 un effondrement de l'activité touristique avec la fermeture des frontières et la mise à l'arrêt des vols et des trajets en train. Trois ans après, le tourisme a redonné du souffle dans certaines régions. En Espagne, le chômage a baissé de 13,2% à 12,8% sur un an. L'Italie enregistre également une baisse passant de 8,3% à 7,9% entre mars 2022 et mars 2023.
Vers une hausse du chômage ?
Comment va évoluer le taux de chômage dans les mois à venir ? Dans ses dernières prévisions macroéconomiques dévoilées lundi dernier, la Commission européenne a révisé favorablement ses chiffres sur le chômage par rapport à l'automne dernier. Bruxelles table désormais sur un chômage à 6,8% en 2023 (comme en 2022) et 6,7% en 2023 contre un chômage supérieur à 7% sur les deux années lors de ses précédentes prévisions en zone euro. L'économie européenne entre . « Mais la bonne santé du marché du travail va permettre de maintenir le pouvoir d'achat », ajoute-t-elle.
En France, la Banque de France et l'OFCE tablent sur une hausse du chômage dans les prochains mois. « On s'attend à une baisse de l'emploi. Elle reste assez mesurée en 2023 (20.000) et plus importante en 2024 (80.000) », a déclaré l'économiste de l'OFCE Mathieu Plane lors d'un récent point presse. A ce stade, il reste difficile de prévoir un retournement du cycle du marché du travail tant les indicateurs sont brouillés depuis la pandémie. Mais des nuages noirs assombrissent les perspectives de l'emploi.
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