Climat : les banques françaises passeront des stress tests l'an prochain

Le gouverneur de la Banque de France a annoncé vendredi que l'institution mènerait dès l'an prochain une évaluation de la résistance des grandes banques et compagnies d'assurance françaises aux risques climatiques. Seuls les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont commencé à le faire dans le monde. Explication.
Delphine Cuny
(Crédits : Handout .)

Après les stress tests financiers, les tests de résistance climatiques. La Banque de France va procéder à une première évaluation de la capacité des grandes banques françaises et des assureurs à supporter les risques climatiques en 2020. Le gouverneur, François Villeroy de Galhau, l'a annoncé vendredi 29 novembre lors de la cinquième édition du Climate Finance Day, une conférence sur la finance et le climat, organisée au Palais Brongniart, à Paris.

« Nous avons décidé de procéder à des stress tests climatiques l'année prochaine. Nous publierons la méthodologie au premier trimestre et nous l'appliquerons à toutes les grandes banques et compagnies d'assurance françaises » a déclaré François Villeroy de Galhau. « Ce sera une étape très importante pour mieux évaluer le type de risques climatiques qui commencent déjà apparaître dans les bilans des banques et des assureurs » a-t-il souligné.


La Banque de France sera l'une des premières banques centrales dans le monde à se lancer dans cet exercice qui sera « un vrai défi technique ». Deux autres pionnières l'ont devancée : De Nederlandsche Bank aux Pays-Bas a mis en place ses premiers tests climatiques l'an dernier et la Bank of England les prépare pour 2021. La DNB avait imaginé quatre scénarios (choc réglementaire, choc technologique, les deux chocs combinés, choc de confiance) et conclut que « les résultats des tests de résistance suggèrent que les pertes subies par les institutions financières en cas de transition énergétique perturbatrice pourraient être considérables, mais également gérables. »

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stress tests climat DNB

[Impact sur les actifs des institutions financières néerlandaises dans les quatre scénarios de chocs liés au climat. Crédit : DNB]

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Les risques climatiques sont des risques financiers


Le gouverneur a rappelé que le Réseau des banques centrales et superviseurs pour le verdissement du système financier (Network for Greening the Financial System, NGFS) avait conclu dans un rapport en avril dernier que « très clairement, les risques climatiques font partie des risques financiers » et à ce titre relèvent du mandat des superviseurs qui veillent à la résistance du système financier.

Au début du mois, le gouverneur avait déjà évoqué cette perspective, lors des Journées de l'économie (Jeco) à Lyon.

« En tant que banque centrale et autorité de supervision, nous devons veiller à la stabilité financière, et pour cela mieux mesurer les risques à long terme associés au changement climatique : nous avons donc besoin à la fois d'une "photographie des risques", à savoir l'identification et la publication des expositions, et une "vidéo des risques" fournie par des tests de résistance prospectifs sur le risque carbone » avait déclaré François Villeroy de Galhau.

Dans une note publiée le 25 octobre, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR, adossée à la Banque de France) avait estimé que « le changement climatique est encore intégré de façon partielle et hétérogène dans le processus de gestion des risques des établissements financiers ». Elle avait déploré des informations « insuffisamment détaillées pour évaluer pleinement le risque physique » tout en constatant « des progrès plus notables dans l'analyse du risque de transition », cependant « ces méthodes ne permettent pas encore de quantifier l'impact de scénarios de transition énergétique sur les bilans bancaires ».

Les ONG Oxfam France et Les Amis de la Terre ont publié jeudi une étude qui a fait polémique sur « l'empreinte carbone colossale des banques françaises », incluant celle de tous leurs financements aux secteurs des énergies fossiles, au total plus de 2 milliards de tonnes de CO2 en 2018, soit 4,5 fois les émissions de gaz à effet de serre de la France entière. Une méthodologie contestée, notamment par Société Générale. Le cabinet spécialisé Carbon4 Finance a indiqué dans un billet de blog qu'il avait « développé une méthodologie pour prendre en compte ces émissions "financées" et identifier ainsi le risque de transition associé pour l'établissement bancaire », qui n'est pas concentrée sur les seules énergies fossiles, mais qui conclut à des « intensités carbone des banques françaises [...] du même ordre de grandeur » que celles du rapport des ONG, soit près de 500 tCO2/M€ de financements (500 gCO2/euro).

L'ACPR avait lancé en amont des travaux avec les acteurs de la place, les établissements bancaires d'une part et les assureurs d'autre part, afin d'élaborer des scénarios de crise. De son côté, l'Autorité bancaire européenne (EBA en anglais) doit présenter d'ici à juin 2021 des propositions visant à inclure les risques liés au changement climatique dans les tests de résistance, afin de s'assurer que les fonds propres détenus par les banques sont suffisants pour couvrir les risques associés.

Delphine Cuny

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Commentaires 3
à écrit le 04/12/2019 à 17:13
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Je me demande si l'on ne marche pas sur la tête, que l'on fasse un audit chez les constructeurs automobiles pour faire plaisir aux escrologistes, que l'on fasse un audit sur les centrales à charbon de l'Allemagne et de la Pologne, je veux bien, mais ...

à écrit le 01/12/2019 à 9:04
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Toutes ces décisions ne peuvent faire penser qu'à un grand bal des guignols. Les opérationnels techniciens ont laissés la place à des petits politiques qui jouent l'air du temps. Tout cela ne serait pas grave s'ils ne nuisaient au travail de ceux qui...

à écrit le 01/12/2019 à 9:02
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Et c'est pour quand un stress test des citoyens du monde ? Ah ben oui c'est vrai nous autres sommes paramétrés pour en baver...

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