Faillite de SVB  : la Fed va-t-elle mettre un terme à la hausse des taux ?

La faillite de la banque SVB pourrait faire ralentir les hausses de taux appliquées par la Réserve fédérale américaine (Fed) pour contrer l'inflation. Il y a encore quelques jours, un relèvement plus fort que prévu était pourtant attendu. Plus d'un tiers des acteurs du marché s'attendent à une pause la semaine prochaine, une première fois depuis janvier 2022.
La Fed relève depuis un an son principal taux directeur, ce qui renchérit le coût du crédit pour faire ralentir la consommation, avec un effet limité jusqu'à présent.
La Fed relève depuis un an son principal taux directeur, ce qui renchérit le coût du crédit pour faire ralentir la consommation, avec un effet limité jusqu'à présent. (Crédits : Jonathan Ernst)

La faillite de la Silicon Valley Bank (SVB), et de deux plus petits établissements, Signature Bank et Silvergate Bank, change considérablement la donne sur le terrain de la finance mondiale. Les analystes de Wells Fargo anticipent désormais un maintien des taux de la Fed dans leur fourchette actuelle de 4,50 à 4,75%.

Lire aussiFaillite de SVB : Américains et Européens interviennent pour éviter la panique bancaire

Un revirement à 180 degrés

Ces anticipations marquent un rapide et spectaculaire revirement par rapport à la semaine dernière. Le président de la Fed, Jerome Powell, venait alors d'avertir que l'inflation restait bien trop forte, et que les taux pourraient grimper plus que prévu.

La grande majorité des acteurs du marché tablait alors sur un fort relèvement d'un demi-point de pourcentage (50 points de base). Un rebond par rapport au précédent, d'un quart de point seulement (25 points de base). Ils sont aujourd'hui plus d'un tiers à s'attendre à une pause la semaine prochaine, ce qui serait une première depuis janvier 2022. Les deux autres tiers anticipent une hausse de 25 points de base.

« La semaine a commencé avec Jerome Powell suggérant (...) une réponse politique encore plus agressive et s'est terminée par l'effondrement de deux banques américaines de taille moyenne », relève Neil Shearing, chef économiste pour Capital Economics, dans une note.

Et selon lui, « les retards avec lesquels la politique (de la banque centrale) est effective sont une raison d'adopter une approche plus progressive (...) à partir de maintenant ».

Une inflation toujours élevée

Car la priorité actuelle de la Fed est de lutter contre l'inflation, de 6,4% sur un an en janvier, selon l'indice CPI, qui fait référence. Les données de février seront publiées mardi matin. Pour cela, elle relève, depuis un an, son principal taux directeur, ce qui renchérit le coût du crédit pour faire ralentir la consommation. Avec un effet toutefois limité jusqu'à présent.

Mais les conséquences de ses actions mettent des mois à se faire pleinement sentir. Le chiffon rouge de la récession est ainsi agité régulièrement. La Fed est « prête à resserrer jusqu'à ce que quelque chose casse. L'effondrement de SVB et la saisie de Signature Bank sont des signes que cela commence à se produire », a commenté John Canavan, économiste pour Oxford Economics. « Ce ne sont donc finalement ni les chiffres de l'inflation, ni ceux de l'emploi, qui pourraient avoir le plus fort impact sur la politique de la Fed, mais ces faillites bancaires. »

Une forte hausse n'est pas écartée

Et pour la suite, la Fed ne pourra relever encore ses taux « que si les marchés financiers et le système bancaire montrent des signes de stabilisation », soulignent les analystes de Wells Fargo. Attention cependant. « Ceux qui pensent que la Fed pourrait mettre fin à son cycle de resserrement plus tôt en raison des tensions actuelles sur le secteur bancaire peuvent se tromper », avertit Gregory Daco, économiste pour EY Parthenon, dans une note.

En effet, si « les développements récents favoriseront probablement une hausse des taux » de 25 points de base la semaine prochaine, « nous ne devrions pas être trop prompts à écarter la possibilité d'une augmentation des taux de 50 points de base ».

La Fed va effectuer une « analyse profonde » des événements autour de SVB

La Fed a annoncé lundi qu'elle allait effectuer « une analyse approfondie, transparente et rapide » des événements autour de SVB, dont les résultats seront publiés le 1er mai. La déroute de l'établissement « met en évidence les insuffisances des réformes réglementaires qui ont été faites » après la crise financière de 2007-2009, estime Arthur Wilmarth de l'université George Washington.

Plusieurs éléments auraient dû alarmer les régulateurs, à commencer par le fait que la banque était très concentrée sur quelques clients à haut risque - des startups et les investisseurs en capital-risque -, comme d'autres firmes se sont par le passé fourvoyées en se concentrant sur l'immobilier commercial ou des prêts aux pays émergents, avance l'universitaire.

Autres avertissements autour de SVB, sa croissance très rapide entre 2020 et 2022, son exposition à des obligations à long terme au moment où les taux remontent rapidement et le fait que la vaste majorité de ses comptes affichaient un solde supérieur aux 250.000 dollars garantis par les autorités. « C'est une combinaison assurée pour l'échec si l'économie tourne mal », avance Arthur Wilmarth. « Les régulateurs ne pouvaient pas l'ignorer. »

Pour Henry Hu de l'université du Texas, la réponse apportée ce week-end par les autorités est aussi problématique. Si la banque centrale américaine (Fed) n'avait pas garanti que tous les dépôts de SVB et Signature Bank seraient remboursés, de nombreuses entreprises auraient retiré leur argent des banques régionales pour les placer dans des banques considérées comme « trop grosses pour faire faillite ».

Mais « si l'on pense que les régulateurs couvrent tous les dépôts non assurés, il en résulte un aléa moral. Certaines entreprises pourraient négliger de surveiller les banques avec lesquelles elles traitent, convaincues que leurs dépôts sont en sécurité quoi qu'il arrive ».

 (Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 5
à écrit le 15/03/2023 à 5:57
Signaler
A la suite de cette banque specialisee dans le fomaine speculatif, deux autres du meme acabit viennent de deposer le bilan. La situation est saine et sous controle, dixit lemaire, genie financier de la macroconnerie. La sartup nation prend l'eau, c'...

à écrit le 14/03/2023 à 19:12
Signaler
C'est tout même incroyable que l'administration Biden puisse protéger les dépôts de millionnaires au-delà du seuil règlementaire de 250 000 USD tandis que ceux-ci savaient clairement que les avantages financiers (cf. rémunération des dépôts et tau...

à écrit le 14/03/2023 à 15:42
Signaler
on ne voit pas bien en quoi le fait qu'une banque de second rang qui fait faillite, ca doit modifier la politique de taux... il fallait se poser azvvant de mettre du charbon dans la chaudiere; evidemment que quand on cree des canards boiteux avec de ...

à écrit le 14/03/2023 à 11:04
Signaler
Bonjour, Je me pencher sur cette histoire et j'ai toujours des difficultés à comprendre si les 25 Bn$ du BTFP sont financé par l'argent de la Fed - par l'intermédiaire d'une augmentation de bilan - où si c'est avec l'argent de l'ESF du Trésor Ame...

le 14/03/2023 à 20:28
Signaler
Je crois, d'après l'article, que c'est avec de l'argent....

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.