Malgré la récession et la hausse des taux, les Bourses pourraient connaître une fin d’année heureuse

Le rally sur les actions depuis octobre rappelle celui de l’été dernier, avant que les banques centrales ne viennent doucher les espoirs de pause dans le resserrement des politiques monétaires. Mais aujourd’hui, le contexte est différent. Le scénario de récession est désormais hautement probable, du moins en zone euro, et le sentiment est que le « le gros est fait » dans le cycle de hausse des taux. De plus, les résultats des entreprises au troisième trimestre se sont avérés plus solides que prévu, malgré les déceptions de certaines valeurs emblématiques de la Big Tech. Explications.
L'indice parisien CAC 40 a grimpé de près de 20 % par rapport à ses plus bas de septembre.
L'indice parisien CAC 40 a grimpé de près de 20 % par rapport à ses plus bas de septembre. (Crédits : BRENDAN MCDERMID)

« Il se passe quelque chose » : la formule d'un responsable d'une grande société de gestion parisienne, résume assez bien le nouveau sentiment de marché depuis le rebond des Bourses initié en octobre dernier. De fait, même même si les Bourses européennes ont terminé lundi dans le rouge à la suite de la recrudescence des cas de Covid en Chine..., la météo apparaît plus clémente sur les actions et certains se laissent même à espérer un nouveau rallye de fin d'année.

« Le marché tente de sortir de sa tendance baissière mais rien n'est encore joué », prévient Bertrand Lamielle, directeur général de Portzamparc Gestion qui note quelques signaux positifs dans les résultats du troisième trimestre des entreprises, notamment dans le secteur industriel.

Ce changement de tendance est pourtant spectaculaire : depuis son point de fin septembre, l'indice parisien CAC 40 a repris près de 18%, une performance largement tirée il est vrai par les poids lourds de la cote, TotalEnergies, le secteur du luxe, et dans une moindre mesure, le secteur financier. Au total, l'indice moins de 8% depuis le début de l'année. En Allemagne, le rebond est encore plus marqué, près de 24%, bien au-delà du seuil de progression des 20 % jugé parfois comme un marqueur d'une tendance haussière. De son côté, la hausse de l'indice des 50 premières capitalisations de la zone euro atteint 20 % depuis le 29 septembre.

« Bad news is good news »

La majorité des gérants restent cependant prudents. Chacun se souvient du rally de juillet-août, avant le brutal rappel à l'ordre de la Federal Reserve lors du symposium de Jackson Hole début septembre qui avait fait alors plonger les marchés. L'espoir déçu d'un assouplissement monétaire a coûté très cher. Et c'est ce scénario bis que redoutent toujours les investisseurs. Toutefois, le contexte apparaît cette fois-ci plus favorable.

Selon le nouvel adage boursier qui affirme que les « mauvaises nouvelles sont des bonnes nouvelles » ("bad news is good news"), la probabilité désormais de plus en plus forte d'une récession, même technique, en zone euro, conforte à nouveau les espoirs d'une inflexion de la politique monétaire européenne, même si, comme l'a rappelé dans un entretien accordé à Market News ce lundi, Philip Plane, économiste en chef de la Banque centrale européenne, le cycle de hausse va « probablement se prolonger au-delà de 2022 ».

Les marchés anticipent une nouvelle hausse des taux directeurs de 50 points de base en décembre, après deux hausses consécutives de 75 points de base, le rythme de hausse le plus rapide de l'histoire de l'institution monétaire. Cette anticipation est de fait validée par Philip Plane pour qui les facteurs justifiants une très forte hausse « ne sont plus là ».

Mais ce qui importe sur les marchés, ce n'est pas tant le niveau absolu des taux que le rythme auquel ils baissent ou ils montent. Nous en sommes pas encore au « taux terminal », taux théorique à partir duquel les taux pourraient commencer à baisser (le fameux pivot), mais chacun s'attend désormais à des hausses plus limitées.

Baisse dans le rythme de hausse

Mais c'est bien le ralentissement de l'inflation (en octobre) aux Etats-Unis qui a marqué le rebond le plus marqué depuis janvier à Wall Street, puis dans son sillage, en Europe. L'inflation, mais aussi l'activité aux Etats-Unis, donnent des signes de faiblesses et le consensus penche plutôt en faveur d'une récession, même légère, aux Etats-Unis. « Nous voyons régulièrement les marchés actions américains rebondir en octobre au moment même de la publication d'indices d'activité plus faibles », remarque Alexandre Baradez, responsable de l'analyse marchés chez IG France

« Jerome Powell (président de la Fed, NDLR) ne veut pas de stop and go. Il veut monter les taux pour calmer l'inflation, puis les détendre une fois qu'il est certain que les prix ne monteront plus », tempère de son côté Alexandre Hezez, directeur de la gestion financière chez Richelieu. De fait, les marchés sont toujours sur un taux terminal de 4,75%, voire 5%, contre une fourchette des taux directeurs de 3,75 à 4% aujourd'hui. Ceci dit, pour les investisseurs, « le plus gros est fait et c'est cela qui compte », dixit un gérant.

Ce qui peut étonner également, c'est la relative résilience des résultats des entreprises, « plutôt bons », selon Frédéric Rollin, conseiller chez Pictet AM, même si les pleins effets de la crise, notamment énergétique, se feront davantage sentir au quatrième trimestre. « Les entreprises ne s'arrêtent pas. Elles continuent malgré un climat anxiogène et certaines, notamment industrielles, se paient le luxe de relever leurs prévisions de marge », souligne Bertrand Lamielle, qui n'exclut pas du tout une « belle fin d'année ».

La belle endormie

Certes, les valeurs pétrolières, de luxe et financières feront toujours la course en tête. Mais Pictet AM passe à l'achat sur certaines valeurs de croissance, comme dans le secteur de la santé. Pour autant, le marché reste nerveux, avec des rachats de shorts (couverture) qui peuvent accélérer les hausses ou comme accélérer les baisses si les gérants décident de se couvrir quand les indices sont jugés trop hauts.

Aujourd'hui, c'est la Chine qui inquiète. Beaucoup espèrent des assouplissements de sa politique sanitaire. Mais, il ne faut pas s'attendre, selon Christopher Dembik, économiste en chef, à une sortie de la politique sanitaire, ni à une relance de la croissance chinoise au rythme d'avant la crise Covid.

« La Chine a été un élément majeur de la reprise économique en 2009 et 2010, ce n'est plus le cas aujourd'hui », note l'économiste. « Et c'est plutôt une bonne nouvelle pour les économies occidentales », ajoute-t-il. Le cours du baril du pétrole Brent oscille autour de 83 dollars, pas si loin de son niveau avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie.

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