Une quinzaine. C'est, selon nos informations, l'ordre de grandeur du nombre d'avions commerciaux livrés par Airbus en avril. Le groupe aéronautique a confirmé en annonçant 14 livraisons. Ce niveau extrêmement bas marque l'accélération de la chute continue des livraisons observée en février (55 avions) puis en mars (36 avions). Au regard de la crise sans précédent que traversent les compagnies aériennes, cette chute n'est pas surprenante. À l'arrêt ou presque depuis fin mars, sans grande visibilité pour la reprise et encore moins sur leur avenir, les transporteurs aériens ont davantage besoin de préserver leur trésorerie que d'acheter des avions neufs. Par ailleurs, les mesures de confinement et les fermetures des frontières empêchent les rares clients souhaitant prendre leurs appareils de se rendre dans les centres de livraison. Au premier trimestre déjà, soixante avions n'avaient pu être livrés pour cette raison.
Les avions sont stockés
Les appareils sont donc stockés. Airbus dispose de capacités de stockage sur ses sites, mais aussi sur d'autres aéroports européens. Quelle que soit leur avancée dans la chaîne de production, ces reports de livraisons sont toujours complexes à gérer. Ils le sont d'autant plus quand les spécificités demandées par les clients ont déjà été installées. Et celles-ci peuvent être intégrées très tôt en amont, comme dans le cas des gros-porteurs.
En cas de reports de livraison très longs, Airbus sera peut-être amené à recaser les avions en les écoulant auprès d'autres compagnies. Pour cela, il devra modifier la cabine. Airbus sait faire. Mais ce travail est compliqué. Surtout sur les gros-porteurs où les éléments de personnalisation de la cabine sont beaucoup plus importants que sur les avions monocouloirs.
Réduction de la production
Pour Airbus et ses fournisseurs, le choc est terrible. Alors que tous les acteurs se préparaient en début d'année à augmenter les cadences pour accompagner la croissance du transport aérien, ils doivent faire machine arrière en un temps record. Décidées il y a trois semaines, les cadences de production d'Airbus ont été réduites d'un tiers, passant de 60 à 40 appareils par mois pour les appareils de la famille A320, d'une dizaine à 6 par mois pour l'A350, et de 3 à 2 par mois pour l'A330. Pour autant, une nouvelle révision à la baisse n'est pas à exclure en juin à l'occasion de l'ajustement du plan de production. L'objectif d'Airbus est d'arriver à une production correspondant aux livraisons.
Airbus brûle du cash à une vitesse sans précédent
Cette chute brutale des livraisons prive l'avionneur de rentrées d'argent, alors que les coûts ne peuvent être ajustés aussi rapidement au regard de la taille de l'entreprise et de la complexité de son modèle industriel. Résultat, Airbus brûle du cash, "à une vitesse sans précédent" pouvant "menacer l'existence même de notre société", a indiqué fin avril le directeur général d'Airbus Guillaume Faury dans un courrier adressé aux salariés. Après les huit milliards d'euros consommés au premier trimestre (dont 3,6 milliards d'euros liés à l'amende dans le dossier de corruption), les analystes tablent sur environ 7,5 milliards d'euros au deuxième trimestre. Selon Dominik Asam, le directeur financier, il faudra attendre le dernier trimestre pour qu'Airbus cesse de brûler du cash. Pour autant, Guillaume Faury a récemment assuré sur RTL qu'Airbus "n'avait pas de problème de liquidités". Il y a un mois, le groupe a levé 10 milliards d'euros de liquidités, portant ainsi le montant des liquidités disponibles à 30 milliards d'euros.
La baisse drastique de la production va provoquer d'énormes sureffectifs parmi les 135.000 salariés que compte le groupe. Selon certains observateurs, les plans de départs pourraient être supérieurs aux 10.000 suppressions de postes du plan Power 8 en 2008-2009.
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