Carlos Tavares, un nouveau patron pour PSA intronisé cette semaine

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  978  mots
Carlos Tavares prendra les rênes opérationnels de PSA le 19 février
Carlos Tavares doit prendre les rênes opérationnelles de PSA dès le mercredi 19 février. Il sera intronisé comme président du directoire le 31 mars. L'accord entre la famille Peugeot, l'Etat français et le chinois Dongfeng sera ratifié mardi.

Ca n'a pas traîné. Devenu  membre du directoire de PSA au 1er janvier, Carlos Tavares doit prendre les rênes opérationnelles du constructeur tricolore mercredi 19  février,  jour de la conférence sur les résultats financiers 2013 du consortium automobile. Ce jour là, Philippe Varin, encore président du directoire de PSA pour quelques semaines, dévoilera l'accord avec le chinois Dongfeng et l'Etat français, tout en annonçant la nomination de Carlos Tavares comme patron de la division automobile. Et c'est le 31 mars prochain que l'ex-bras droit de Carlos Ghosn chez Renault doit carrément remplacer Philippe Varin comme président du directoire, selon le calendrier qui sera alors présenté. Une succession au pas de charge.

Une rude tâche attend l'ancien directeur général délégué de Renault, limogé l'été dernier suite à des déclarations jugées intempestives dans lesquelles Carlos Tavares manifestait son impatience à devenir un jour PDG. Il le sera... mais pas chez Renault! Un transfert rarissime entre les deux constructeurs français, rendu possible par l'urgence de la situation chez PSA.

Un fin connaisseur de l'automobile

Cet ingénieur portugais de 55 ans était arrivé chez Renault en 1981, avant de suivre son mentor Carlos Ghosn chez l'allié japonais Nissan en 2004. Malgré son tropisme Nissan, ce centralien ambitieux et sûr de lui a fini par revenir chez Renault en 2011, pour remplacer Patrick Pelata, sacrifié à cause de la pseudo affaire d'espionnage qui avait ridiculisé la firme au losange.

Polyglotte, réputé austère, intègre, gros travailleur, très exigeant, charmeur mais aussi cassant, parfois jugé très autoritaire et solitaire, Carlos Tavares apportera à PSA une profonde connaissance de l'automobile, dont les derniers présidents de PSA  - de Jacques Calvet, Jean-Martin Folz, Christian Streiff, à Philippe Varin - étaient dépourvus , une vraie vision intercontinentale et sa vaste culture d'entreprise à la fois française, japonaise et anglo-saxonne. Le tout sur fond d'une réelle passion. Car ce sportif dispute à ses heures de loisirs des épreuves sur circuit avec... sa propre voiture de course!

Voilà donc un nouveau patron alors que, chez PSA, tout semble enfin prêt pour un nouveau départ. L'Etat, la famille Peugeot et le groupe automobile chinois Dongfeng ont trouvé un accord sur les modalités de l'augmentation de capital qui fera enfin rentrer l'Etat français et Dongfeng dans le capital de PSA. L'augmentation de capital prévue s'élève à 3 milliards d'euros. Selon un proche du dossier, elle "comporte une partie réservée de un milliard d'euros à l'Etat français et au groupe public chinois Dongfeng (500 millions d'euros chacun), à laquelle s'ajoute une opération de marché de 2 milliards dont une quote-part sera attribuée à l'Etat (un peu moins de 300 millions), Dongfeng (300 millions) et à la famille Peugeot (moins de 100 millions)".

800 millions pour l'Etat et Dongfeng

En résumé, l'Etat et Dongfeng vont débourser près de 800 millions d'euros chacun, les Peugeot moins de 100 millions. Le solde (près de 1,4 milliard) sera levé sur le marché, le tout au prix de 7,50 euros l'action. PSA pourra même "lever jusqu'à 4 milliards puisque des BSA (bons de souscriptions d'actions), réservés aux actionnaires actuels, pourront permettre de lever un milliard d'euros supplémentaire", selon nos informations. Elles seront "exerçables sur deux ou trois ans", d'après un proche du dossier. Surtout, les Peugeot ne devraient pas les exercer. "Ils se sont engagés à ne pas le faire", assure-t-on à La Tribune.

Au final, l'Etat, Dongfeng et la famille Peugeot - aujourd'hui actionnaire à hauteur de 25,4% du capital et 38,1% des droits de vote - détiendront chacun 14% du capital de PSA avec le même nombre d'administrateurs. Le dossier doit être a priori examiné par la famille Peugeot ce lundi, puis par le conseil de surveillance de PSA mardi.

Louis Gallois soutenu par l'Etat

Reste à régler la question de la présidence du conseil de surveillance. Si Thierry Peugeot, représentant de la famille fondatrice, devrait céder sa place, reste à savoir qui le remplacera. L'Etat veut imposer Louis Gallois, l'ancien président d'EADS, aujourd'hui à la tête du commissariat général à l'investissement, et membre du conseil de PSA. Or, ce choix ne correspond par selon les Peugeot et Dongfeng au critère d'indépendance du président du conseil, un principe sur lequel ils se sont en effet accordés.

Louis Gallois est aujourd'hui administrateur de PSA "en lien avec l'Etat". Selon certaines sources, "les Peugeot soutiendraient Gérard Hauser, l'ancien PDG de Nexans, et Dongfeng Philippe Varin". Vu les difficultés sur ce point, la nomination du futur président du conseil de surveillance ne devrait pas être annoncée cette semaine.

Volet industriel important

Un volet industriel sera inclus dans l'accord pour approfondir la coopération existante entre PSA et Dongfeng en Chine. Les deux groupes sont liés depuis le début des années 90 en Chine, Dongfeng étant le partenaire du français dans sa co-entreprise locale DPCA. Mais ce partenariat va s'élargir.  Les deux groupes devraient ainsi explorer en commun d'autres marchés en Asie-Pacifique, où PSA est aujourd'hui très peu présent. Les deux groupes devraient notamment faire cause commune sur une plate-forme pour véhicules à bas coûts, qui manque tant à PSA. Dongfeng pourrait aussi coopérer avec PSA dans ses futures technologies à bas rejets de CO2,  comme l'"Hybridair".

Un deuxième accord devrait être également annoncé officiellement mercredi. PSA Peugeot Citroën est par ailleurs proche d'un accord en vue d'une alliance entre sa filiale bancaire et la banque espagnole Santander, qu'il espère annoncer aussi la semaine prochaine. PSA et la banque Santander créeront un réseau de co-entreprises à parité dans le financement automobile, qui pourrait à terme se substituer à la garantie publique dont bénéficie Banque PSA Finance (BPF) depuis fin 2012 et qui peut aller jusqu'à 7 milliards d'euros.