PSA pourra-t-il défendre son indépendance ?

Par Alain-Gabriel Verdevoye  |   |  776  mots
Le stand Peugeot au dernier salon de Genève
PSA va sceller officiellement mercredi 26 mars son alliance avec le chinois Dongfeng, qui lui permet de procéder à une augmentation de capital. Grâce à l'Etat français, le groupe auto tricolore sauvegarde pour l'instant son indépendance. Mais il risque d'avoir besoin ultérieurement de nouveaux capitaux...

C'est mercredi 26 mars que PSA doit officiellement sceller son alliance avec le chinois Dongfeng Motors. La cérémonie se déroulera à l'Hôtel d'Evreux, place Vendôme à Paris, en présence du ministre de  l'Economie et des finances Pierre Moscovici et du président du groupe public chinois Xu Ping. Sur le papier, tout va bien. Le nouvel accord, annoncé à la mi-février, permet au constructeur automobile tricolore de procéder à une prochaine augmentation de capital de trois milliards  d'euros, avec l'entrée de l'Etat et du groupe chinois Dongfeng au sein de PSA à hauteur de 14%.

Louis Gallois prochain patron du conseil de surveillance

La famille fondatrice Peugeot - aujourd'hui actionnaire à hauteur de 25,4% du capital et 38,1% des droits de vote - devrait redescendre elle-même à 14%. L'Etat et Dongfeng vont débourser près de 800 millions d'euros chacun, les Peugeot moins de 100 millions. Le solde (près de 1,4 milliard) sera levé sur le marché, le tout au prix de 7,50 euros l'action. PSA Peugeot Citroën a confirmé la semaine dernière le choix de Louis Gallois comme futur président de son conseil de surveillance, en remplacement de Therry Peugeot. Tout un symbole. L'assemblée générale des actionnaires, qui doit ratifier ce choix, a été avancée au 25 avril prochain.

Le conseil de surveillance sera désormais composé de six membres représentant les actionnaires clés, six membres indépendants et deux membres représentant respectivement les salariés et les actionnaires salariés. Le constructeur chinois sera représenté par son propre président, Xu Ping, et par son directeur général adjoint Liu Weidong.


Seulement voilà: PSA est-il sauvé pour autant? Pas sûr. N'oublions pas que  la précédente augmentation de capital de 999 millions d'euros il y a juste deux ans  - avec l'entrée de GM qui s'est retiré depuis - n'a été qu'une éphémère bouffée d'oxygène. Car PSA a encore affiché l'an dernier un résultat opérationnel négatif de 1,35 milliards d'euros et un déficit net de 2,32 milliards.

Philippe Varin, son président du directoire pour quelques jours encore à peine, s'était engagé en février dernier à ce que l'entreprise génère un "cash flow (flux de trésorerie) positif en 2016 au plus tard". Une façon de dire que ce n'est pas pour tout de suite. Comme les marchés automobiles européens ne vont pas redémarrer de sitôt - PSA table sur une "croissance zéro plus quelque chose cette année"-,  le groupe, quelles que soient ses réductions de coûts prévues,  n'a pas beaucoup de leviers à court terme pour restaurer sa rentabilité.

Trois milliards, ce n'est pas grand chose

Trois milliards d'euros d'argent frais en soi, ce n'est du coup pas grand chose,  en gros l'équivalent d'une année d'investissements pour le constructeur les années normales... français. "Le nouveau patron de PSA, Carlos Tavares, sait qu'il a juste deux ans pour rendre en fait PSA plus présentable, quand se posera le problème d'une... augmentation de capital supplémentaire", nous expliquait dernièrement un proche du dossier, qui ajoutait: "la question d'une augmentation de capital supplémentaire risque de se poser début 2016"...

Si PSA vendait sa filiale équipementière Faurecia, il pourrait certes bénéficier d'un répit supplémentaire. Le fabricant de composants automobiles représente en effet potentiellement "1,8 milliard d'euros de cash au cours actuel de l'action pour PSA. A un moment ou un autre, PSA aura besoin d'argent", nous affirmait en janvier dernier Yann Delabrière, PDG de Faurecia. Mais, officiellement, PSA n'est pas vendeur.

Dongfeng sans problèmes financiers

Question:  lorsque PSA aura - vraisemblablement - un nouveau besoin d'argent frais, qui, à ce moment-là, remettra au pot? L'Etat français pourra-t-il suivre au prorata de sa participation? Et la famille Peugeot? Le seul qui n'aurait en principe aucune problème financier pour suivre serait... le groupe national Dongfeng, fort du soutien stratégique des pouvoirs publics de Pékin.

Certes,  même si la situation de PSA, dont Carlos Tavares doit prendre la présidence opérationnelle à la fin du mois, se redresse,  il n'est pas sûr que de nouveaux investisseurs se précipitent dans une entreprise qui sera toujours structurellement fragile. Avec qui plus est de fortes exigences en matière d'investissements.

PSA dû réduire ses dépenses à 2,4 milliards l'an dernier, un niveau faible face à un groupe Volkswagen qui a prévu d'investir 100 milliards d'euros entre 2013 et 2018...  La question de l'indépendance de PSA, laquelle n'est pas menacée aujourd'hui, risque donc de se reposer à court terme.