Le roi pick-up fait le show à Détroit, mais l'enjeu est ailleurs

Le salon automobile de Détroit qui se tient du 12 au 25 janvier est l'occasion pour les constructeurs automobiles américains de s'afficher de nouveaux avec de grosses cylindrées. Une façon de "montrer leurs muscles", après des années de crise.
Nabil Bourassi
Ford F150 Raptor, lancé en 2014, reçoit de nouveaux équipements à l'occasion du salon de Détroit.

Le salon automobile de Détroit doit marquer le retour à une vieille tradition automobile américaine: "truck", ou pick-up... Les mots ne manquent pas pour évoquer ce segment de voitures très emblématiques de la société américaine et qui n'existe quasi-exclusivement... qu'aux Etats-Unis!

"On assiste à un retour aux fondamentaux de l'industrie automobile américaine avec des grosses cylindrées, des moteurs puissants. Cela montre que les constructeurs ont repris confiance et sont décomplexés. Ils montrent leurs muscles, leur fierté", explique à La Tribune Guillaume Crunelle, associé responsable de l'industrie automobile chez Deloitte.

Pourtant, personne n'aurait parié sur ce segment lorsqu'en 2008 survint la crise des subprimes combinée à des prix du pétrole très élevés. De son côté, le gouvernement américain encourageait les constructeurs à proposer des motorisations plus sobres. On estimait alors que les grosses cylindrées vivaient leurs derniers jours.

>>> Voir aussi: DIAPORAMA Detroit, le "truck show"

Le pick-up s'affiche en grand à Détroit

Et pourtant, ils sont de retours au salon de Détroit: Chevrolet Colorado, GMC Canyon sans oublier le Ford 150 Raptor lancé en 2014 et qui ajoute une foule de nouveaux équipements. Les marques étrangères ne sont pas en reste avec Nissan qui tente de revenir avec le Titan, et Toyota avec le Tacoma. En 2014, les ventes de pick-up sont repartis à la hausse (+6,6%), un chiffre en ligne avec le marché américain (+6,9%), d'après les données d'Autodata. Cette performance s'inscrit néanmoins très au-dessus de celle des berlines classiques qui n'a progressé que de 1,8% en 2014.

En réalité, ce chiffre dissimule la dynamique du sous-segment des cross-over qui, dans le langage américain, désigne les 4X4 compacts. Ceux-ci affichent une progression de 13,3% de leurs ventes, une performance non-négligeable compte tenu des 3,8 millions de voitures vendues sur ce segment, contre 2,3 millions de pick-up, et 1,5 million de SUV (une catégorie comprise entre le pick-up et le cross-over).

Le paradoxe du pick up

Ainsi, le pick-up existe, mais en volume le cross-over lui est préféré par le consommateur. Un paradoxe du marché américain puisque les pick-up occupent les trois premières places des voitures les plus vendues, même si la Ford F, la plus vendues toutes catégories confondues, a accusé une baisse de ses ventes de 1,3% en 2014.

Pour les analystes, le marché américain a évolué avec la crise, mais sans abandonner ses fondamentaux. Pour Xavier Mosquet, analyste automobile et directeur associé au Boston Consulting Group, la crise a refaçonné le segment des grosses voitures.

"Le marché des gros véhicules a baissé au profit de segments plus petits comme les crossovers de taille moyenne. Ce n'est pas uniquement conjoncturel, le consommateur n'est plus attiré par le pick-up plaisir. Le pick-up a désormais une finalité très professionnelle", explique à La Tribune cet expert connu aux Etats-Unis pour avoir conseillé Barack Obama au plus fort de la crise automobile.

La chute du cours du pétrole pourrait toutefois redonner du souffle à ce segment. En l'absence de taxe sur les prix à la pompe, le litre d'essence est directement corrélé à l'évolution du cours du baril. "On a vu le gallon d'essence passer de 4 dollars à la pompe, à 1,5 dollar", constate Xavier Mosquet qui ne s'attend pas à ce que la baisse des cours du pétrole inverse durablement la tendance sur ce segment des très grosses cylindrées.

Un étendard pour l'image de marque

Pour Guillaume Crunelle le truck américain est davantage un étendard pour l'image d'une marque que destiné à une finalité commerciale. "C'est surtout un effet d'affichage, les catalogues des constructeurs américains resteront dominés par des modèles plus compacts et moins consommateurs de carburant", estime l'analyste de chez Deloitte.

L'enjeu d'entretenir une image de grosses cylindrées n'est pas à négliger. Les constructeurs américains doivent affronter des constructeurs japonais à l'offensive qui disposent d'une expertise certaine et éprouvée sur des crossovers compacts dotés de moteurs sobres, et qu'ils vendent déjà partout dans le monde... Ironie de l'histoire, ces mêmes constructeurs japonais essaient de se construire une image sur les pick-up... pour les mêmes raisons !

Nabil Bourassi

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Commentaires 4
à écrit le 19/01/2015 à 14:38
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C'est aux USA....... Voila tout est dit......

à écrit le 19/01/2015 à 12:16
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Je passe la moitié de l'année aux US et il n'y a pas que les pick-up aux US...le rédacteur oublie que dans les berlines moyennes à coffre comme la Chrysler 200, elle fait un tabac, et et j'ai eu l'occasion d'en louer une. Mercedes avec la Classe C (m...

le 19/01/2015 à 14:10
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"Les US tôt ou tard se défendent toujours contre les produits étrangers en donnant toujours une réponse adéquate" Oui en faisant du protectionnisme ou en distribuant des aides massives. Et tout cela à l'encontre des règles qu'ils imposent au reste d...

le 23/01/2015 à 10:25
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Vous n'avez rien compris à l'article...

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