
Le scénario noir craint par tous les constructeurs automobiles serait-il sur le point de s'accomplir ? Depuis l'éclatement de l'affaire Volkswagen en septembre dernier, le monde entier n'avait qu'une seule question en tête : le groupe allemand est-il le seul à mentir sur ses émissions de particules fines ? A l'époque, les constructeurs se confondaient en communiqués et effets d'annonces pour circonscrire l'incendie à la seule maison Volkswagen.
Les Français avaient d'ailleurs été parmi les premiers à dégainer, davantage concernés que d'autres en raison de leur appétence pour les motorisations diesel. En moins de 48h, ils lançaient un communiqué à travers le Comité français des constructeurs automobiles pour déclarer n'être engagés dans aucune tricherie, et être prêts à jouer la transparence en soumettant leurs modèles à des tests aléatoires en conditions réelles. L'enjeu était de ne pas jeter un nouvel opprobre sur le diesel, déjà malmené par les autorités et l'opinion publique.
Peugeot-Citroën entraîné dans le sillage de Renault
Aujourd'hui, l'annonce de perquisitions chez Renault par la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a fini par soulever cette crainte d'une tricherie généralisée des constructeurs. Quelques minutes à peine après l'annonce par l'AFP de ces perquisitions, le titre a flanché de près de 20% à la Bourse de Paris. Le titre de son compatriote Peugeot-Citroën l'a suivi en accusant une perte de 10%.
En quelques heures à peine, les services de presse des deux constructeurs ont publié des communiqués de presse pour tenter de rassurer. Non sans succès d'ailleurs puisque Renault est parvenu à ramener la perte de son titre de près de 22% au pire de sa chute à 10% après la diffusion du communiqué.
Pas de perquisitions chez Peugeot-Citroën
Renault a néanmoins reconnu avoir fait l'objet de perquisitions tout en démentant avoir mis en place un système de triche sur les émissions de gaz polluants. Les deux constructeurs se sont également appuyés sur les premiers résultats de la commission mise en place par le ministère de l'Ecologie au lendemain de l'affaire Volkswagen, pour établir un nouveau contrôle sur les motorisations des différents constructeurs. Renault rappelle que cette commission (qui n'a testé que 11 véhicules sur les 100 promis) n'aurait rien à redire sur les quatre issus de ses rangs. De son côté, PSA confirme non seulement la conformité de ses véhicules en vertu de ces premiers contrôles, mais il ajoute ne pas faire l'objet de perquisitions d'aucune sorte de la DGCCRF.
Pourquoi alors cette dernière s'intéresse-t-elle à l'un et pas à l'autre ? Car Renault peut prétendre que la DGCCRF a agi pour "un complément d'investigation sur pièce et sur site", en réalité, il y a peu de chances que celle-ci collabore "en parallèle" du travail de la commission nommée par Ségolène Royal.
La stratégie de reconquête de Renault menacée
Devant ces situations, Renault ne peut pas perdre une minute et doit trouver les arguments les plus solides pour rassurer les consommateurs, mais également les investisseurs, car, pour l'heure, la DGCCRF ne semble pas vouloir communiquer sur l'objet de ses investigations. Le constructeur a tout à perdre d'une persistance de soupçons sur la fiabilité de ses données d'émissions.
Une rupture de la confiance entre la marque et les consommateurs menace effectivement l'ambitieuse offensive commerciale du groupe emmenée par Carlos Ghosn. En moins d'un an et demi, Renault a renouvelé quasiment tout son catalogue avec cinq nouveautés : Twingo, Espace, Talisman, Mégane, Kadjar, sans parler de celles à venir (Scénic, Koleos...). L'enjeu pour la marque est immense puisqu'il est question de reconquérir des segments désertés par le constructeur où se concentrent les plus grosses marges comme sur les SUV, les monospaces et les grandes routières.
Un risque sur l'économie française
Car si Volkswagen semble avoir finalement (et pour le moment) bien encaissé la défiance des consommateurs sur ses ventes, il n'est pas certain que l'image de marque de Renault ait les reins aussi solides.
Mais le scénario catastrophe ultime pour l'économie française serait que Peugeot-Citroën soit à son tour touché par la suspicion de tricherie...
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