Immobilier ancien : pas de baisse des prix en vue en 2023, selon les notaires

Après une année 2021 synonyme de tous les records en terme de ventes, le marché de l'immobilier ancien rime en 2022 avec une baisse des mètres carrés disponibles, selon le Conseil supérieur du notariat (CSN). Si la vente des passoires thermiques est en hausse « significative », deux scénarios se profilent pour 2023. Explications.
César Armand

Le marché de l'immobilier ancien se rééquilibre. Après une folle année 2021 marquée par la vente de plus de 1,2 million d'appartements et de maisons au sortir de la crise sanitaire, il n'y a eu « que » 1,133 million de transactions entre le 30 septembre 2021 et le 30 septembre 2022, selon le Conseil supérieur des notaires.

« Une phase de décélération », a relevé, ce 15 décembre, le notaire Frédéric Violeau, chargé des statistiques immobilières nationales au Conseil supérieur du notariat.

Cette baisse de 6,1% des volumes s'explique par une réduction de 6,7% en province et de 2,7% en Île-de-France.

Les prix des appartements anciens sont restés « soutenus » et ceux des maisons anciennes « dynamiques », avec +4% et de +8,2%. Comme en 2021, l'inflation s'est faite davantage sentir en région : +7,1% et +8,6% contre +0,2% et +5,7% dans la région capitale. Dans le même temps, le ratio entre l'agglomération la plus chère - Paris - et celle la moins chère - Saint-Etienne - reste stable : 2,9, contre 2,8 il y a quinze ans.

Le nombre de mètres carrés disponibles en baisse

Là où le bât blesse, c'est sur le nombre de mètres carrés disponibles depuis l'an dernier. La hausse des prix conjuguée à celle des taux d'intérêt fait que les Français ont perdu, en moyenne, 4 m², passant de 84 à 80 m². Partant d'une base de crédit de 800 euros par mois pendant 20 ans en 2022, le Conseil supérieur du notariat (CSN) estime par exemple qu'il est possible de s'acheter un appartement de 43 m². C'est 1 m² de moins qu'en 2021.

Pour les maisons anciennes, se fondant, cette fois, sur une base de crédit de 1.300 euros par mois, le CSN considère qu'il est possible d'acquérir un bien de 113 m² en 20 ans. C'est 8,1 m² de moins que l'année dernière. « Autrement dit, une pièce », pointe le notaire parisien Thierry Delesalle.

Dans le flot des données communiqués, l'absence d'exode urbain, constatée en 2021, se confirme par ailleurs sur le marché des maisons anciennes en province en 2022. Dans les départements jouxtant les frontières franciliennes, la part des acquéreurs parisiens baisse : -2% dans l'Oise, -2% dans l'Yonne, -3% en Eure-et-Loir, -3% dans l'Eure (après +8% entre 2020 et 2021) et -5% dans l'Orne (+9% d'acheteurs au total l'an dernier).

Une hausse « significative » de la vente des passoires thermiques

Sans surprise, en revanche, la vente de passoires thermiques, ces logements qui laissent passer le froid en hiver et la chaleur en été, s'accroît. Les logements G et F, qui seront interdits à la location en 2023, 2025 et 2028, représentent ainsi 17% des transactions. Leur part a même augmenté « significativement » entre le 3ème trimestre 2021 et le 1er semestre 2022 : les classés G sont passés de 3% à 7%, soit +4 points de parts de marché. Idem avec les logements étiquetés F dont la part est passée de 8 à 10% entre le 3è et le 4è trimestre 2021.

« Une hausse notable motivée par l'entrée en vigueur imminente des dispositions de la loi Climat & Résilience », remarque le caennais Frédéric Violeau, chargé des statistiques immobilières nationales au Conseil supérieur du notariat.

Toujours côté vendeurs, son confrère Thierry Delesalle, auteur de la théorie des « 7D » pour « désendettement », « décès », « divorce », « déménagement », « démographie », « défiscalisation » et « donation », les données qui déclenchent une transaction, évoque, plus généralement, un « équilibre plutôt classique » entre ces paramètres.

« Tous les excès sont presque terminés. Il y a plus d'homogénéité »

Côté acquéreurs, si la « pierre verte » et la « pierre confort » (visant à s'agrandir, Ndlr) existent encore, c'est beaucoup moins le cas aujourd'hui. A contrario, la « pierre investisseur » est revenue nettement à Paris - avec le retour des étrangers -, quand la « pierre retraite » redevient un déclencheur. La « pierre loisir » est, en revanche, « un peu en berne ».

« Tous les excès sont presque terminés. Il y a plus d'homogénéité », résume le notaire parisien.

Quid de 2023 ? Pas de théorie des « 7D » ou de « pierre » ici, mais une « couleur des feux » à surveiller. Selon maître Delesalle, la facilité des crédits, déjà à l'orange, risque de virer au rouge, « des profils ric rac étant bloqués ». Pour les taux d'intérêt, qui remontent, cela devrait rester orange. Idem pour le pouvoir d'achat qui s'affaisse en parallèle d'une cherté du m² et de la crise énergétique. Cette dernière risque toutefois d'augmenter les contraintes énergétiques liées à l'habitat et de virer au rouge.

Deux scénarios pour 2023

Seul feu qui pourrait passer au vert : la confiance des ménages. Entre la retraite et l'inflation, « le réflexe français consiste à acheter de la pierre, de la pierre refuge ou de la pierre coffre-fort » (pas de rendement à court-terme, Ndlr), poursuit Thierry Delesalle.

Aussi voit-il deux scénarios : un premier où les volumes vont « peut-être » diminuer, et même « plus fortement », avec de l'attentisme et des prix « de plus en plus négociés » ; un second synonyme de la fin de la guerre en Ukraine avec moins d'inflation et une baisse des taux d'intérêt où le marché pourrait continuer à être « vigoureux ». Comme le dit son confrère Frédéric Violeau, attention toutefois à « l'art divinatoire »...

Lire aussiLes transactions s'envolent, les stocks s'épuisent : l'immobilier ancien en surchauffe

Immobilier sur le littoral : entre déni climatique et normalisation

Malgré le recul du trait de côte, le littoral est toujours « très dynamique ». « Il n'y a aucune traduction des prescriptions qui arrivent depuis la loi Climat, ni de prise de conscience autour des projections, mais c'est quelque chose qu'il va falloir surveiller. A terme, ça deviendra un élément de négociation », estime le caennais Frédéric Violeau.

Le rétro-littoral, c'est-à-dire l'arrière-pays, revient, lui, à une situation « normale ». « La frénésie observée à la sortie du Covid-19 se calme un petit peu. Nous ne sommes plus dans une situation où les gens achetaient dans des villages où ils n'étaient jamais allés », affirme le notaire. « Il ne faut pas s'inquiéter mais s'en rassurer : ça permet aux autochtones de retrouver des capacités à acquérir », conclut-il.

César Armand

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Commentaires 4
à écrit le 16/12/2022 à 13:18
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ouf!Que nous voilà rassurés….et les affaires en cours sécurisées.Collector a déguster dans 6 mois.Thank’s.

à écrit le 16/12/2022 à 13:07
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Pour une vente, il faut un acheteur et un vendeur. Même s'il peut y avoir une baisse de prix, comme il n'y a plus d'acheteur, les ventes ne vont pas se faire. Pourquoi acheter ? taxes et impôts énormes, avenir incertain, prêt difficile et de plus en...

à écrit le 16/12/2022 à 12:09
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Inflation record, augmentation des taux immobilier de 2%, crise de l'énergie... Vous croyez vraiment en ce que vous écrivez. rendez vous à la fin 2023, je parie sur 10% de baisse de prix dans l'ancien.

à écrit le 16/12/2022 à 10:46
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je vois mal comment les prix ne peuvent pas baisser. Les taux montent et donc le cout du credit. Pire, il va devenir impossible de faire des credits sur 25 ans car les mensualites ne couvriront meme plus les interets. Bref la solvabilisation des ache...

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