L'édito de La Tribune : OPA BHP - Rio, mauvaise pioche

Par Robert Jules, journaliste de La Tribune

Ce devait être l'une des plus importantes OPA jamais réalisées, à 147 milliards de dollars lors de son lancement il y a un an. Mais Marius Kloppers, le jeune patron ambitieux du leader mondial de la mine, BHP Billiton, a dû jeter l'éponge dans son projet de rachat hostile de Rio Tinto, troisième groupe minier mondial derrière le brésilien Vale. Pourquoi cet échec?? L'OPA, qui s'effectuait intégralement par échange d'actions, n'avait jamais réellement convaincu les responsables de Rio, ni le marché. Et la naissance d'un tel mastodonte était vue d'un mauvais ?il par les clients, en particulier les sidérurgistes, qui redoutaient de se faire dicter les prix du fer et du charbon sans avoir droit au chapitre. La Commission européenne s'en était émue et posait des conditions restrictives sévères à son feu vert.

Mais c'est surtout l'explosion de la bulle des matières premières sous l'effet de la crise financière qui lui aura été fatale. Après avoir atteint des sommets historiques au début de cette année, les cours du cuivre, de l'aluminium, du fer, du charbon, du zinc, du nickel se sont effondrés ces dernières semaines. La propagation de la récession économique a stoppé net le supercycle des prix des matières premières qui avait démarré en 2002. L'appétit gargantuesque de la Chine et autres pays émergents pour les produits de base avait fait s'envoler la demande, à laquelle l'offre minière peinait à répondre, conséquence du sous-investissement chronique dans le secteur durant des années. Dans ces conditions, la meilleure stratégie pour un groupe minier consistait à racheter ses concurrents pour augmenter ses réserves plutôt que de prospecter de nouveaux sites.

L'OPA de BHP Billiton était justifiée, nonobstant le prix proposé, et s'inscrivait logiquement dans un mouvement dynamique de consolidation mondiale. D'autant qu'elle avait une spécificité attrayante?: les deux groupes opéraient principalement en Australie, à proximité de leur meilleur client, la Chine. Sur le papier, c'était le « deal » de ce début de siècle. Le renoncement de BHP Billiton confirme que ceux qui pensaient qu'en cas de difficultés, le salut de l'économie mondiale passerait par les pays émergents en sont pour leurs frais.

 

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