Il y a quelques mois encore, l'Association internationale du transport aérien (IATA) vantait les mérites du certificat Covid numérique de l'Union européenne (EU DCC), autrement dit le pass sanitaire européen, mais le discours est en train de changer. Si elle salue toujours « un grand succès... [qui] soutient une reprise fragile dans le secteur des voyages et du tourisme », elle s'inquiète désormais de la proposition de mise à jour des règles de libre circulation faite par la Commission européenne. Prise en réaction à l'irruption de la 5e vague en Europe, celle-ci pourrait selon l'IATA fragiliser encore un peu plus un trafic aérien à nouveau dans la tourmente.
En fin de semaine dernière, la Commission européenne a ainsi proposé aux Etats membres de limiter la durée de validité des pass sanitaires à 9 mois à partir de l'administration d'une seconde dose (schéma de primovaccination). Cette durée doit permettre l'administration de doses de rappel (booster) après une période de 6 mois et prend en compte une marge de 3 mois pour laisser le temps aux campagnes de vaccination de se mettre en place.
La limite temporelle disparaît une fois la 3e dose administrée, Bruxelles estimant ne pas avoir le recul nécessaire pour juger de la durée de la protection. Elle déclare tout de même par voix de communiqué que « les données qui commencent à apparaître laissent néanmoins penser que la protection offerte par les vaccins de rappel pourrait être plus longue que celle résultant du schéma de primovaccination. »
Douze mois plutôt que neuf pour ne pas pénaliser les voyages
C'est cette limitation temporelle qui crée aujourd'hui l'inquiétude dans les rangs des compagnies aériennes. Une inquiétude relayée par Rafael Schvartzman, vice-président régional de l'IATA pour l'Europe : « La proposition de gérer les limitations de la validité du DCC crée de nombreux problèmes potentiels. Les personnes qui ont reçu le vaccin avant le mois de mars, y compris de nombreux travailleurs de la santé, devront avoir accès à une dose de rappel avant le 11 janvier, faute de quoi elles risquent de ne pas pouvoir voyager. »
L'IATA demande ainsi un allongement de la durée de validité de l'actuel DCC à 12 mois après la deuxième dose. Selon l'Association, ces trois mois supplémentaires doivent permettre aux Etats membres de l'Union d'harmoniser leur approche sur le rythme vaccinal entre deuxième dose et dose de rappel et laisser le temps aux citoyens européens d'accéder à cette dernière.
Rafael Schvartzman appuie également son argumentation sur la réticence de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) face aux lancements des campagnes généralisées pour une troisième dose en Europe, alors que nombre de pays peinent encore à en administrer une première : « À l'échelle mondiale, le programme de vaccination a encore beaucoup de chemin à parcourir dans de nombreux pays en développement et l'accent devrait être mis sur l'équité en matière de vaccination. »
Des propos à l'antithèse des déclarations de la présidente de la Commission européenne Ursula van der Leyen, le 26 novembre : « Les rappels de vaccins offrent une protection encore meilleure. C'est pourquoi les Européens doivent saisir toutes les occasions de se protéger par la vaccination. »
Discrimination entre les vaccins
Le vice-président régional de l'IATA pour l'Europe s'est également emporté sur une autre mesure prônée par la Commission européenne, à savoir la différenciation entre les vaccins approuvés par l'Agence européenne des médicaments et ceux validés seulement par l'OMS : « Nous sommes conscients que les autorités doivent rester vigilantes, mais la discrimination entre les vaccins approuvés par l'OMS constitue un gaspillage de ressources et un obstacle inutile à la liberté de voyager. »
Bruxelles semble pourtant sur la voie de l'ouverture sur ce sujet. Dans sa mise à jour des règles de libre circulation, la Commission européenne demande aux Etats membres de considérer une ouverture systématique des frontières à tout voyageur vacciné avec un vaccin homologué par l'OMS. Jusqu'ici, seuls les vaccins validés par l'Agence européenne des médicaments permettaient un accès systématique à l'UE. L'exécutif européen veut néanmoins qu'il y ait l'exigence d'un test PCR négatif comme « garantie essentielle », ce qui provoque l'irritation de l'IATA.
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