Qatar Airways reste dans Oneworld mais le malaise demeure

Après avoir menacé en novembre de quitter la troisième alliance mondiale pour créer sa propre alliance avec les compagnies dans lesquelles Qatar Airways est actionnaire, la compagnie du Golfe reste dans Oneworld. Mais le départ précipité de son PDG, vendredi lors de la cérémonie des 20 ans de l'alliance, montre que les querelles internes ne sont pas réglées.
Akbar Al Baker
Akbar Al Baker (Crédits : Reuters)

Ce vendredi 1er février à Londres, lors  la cérémonie organisée par l'alliance aérienne Oneworld pour fêter ses 20 ans, Akbar Al Baker, le PDG de Qatar Airways, était l'attraction de cette manifestation. Il y avait pourtant du beau monde puisque les PDG des 13 compagnies aériennes qui composent cette alliance aérienne étaient tous-là : Doug Parker, le boss d'American, Willie Walsh, le grand manitou de IAG, la maison-mère de British Airways et d'Iberia, Alan Joyce, l'indétrônable patron de la compagnie australienne Qantas, pour ne citer que les plus connus dans le secteur.

American et Qantas hostiles à Qatar Airways

Et pourtant, tous les yeux des journalistes étaient rivés sur Akbar Al Baker. Tous attendaient une suite à sa virulente charge lancée en novembre dernier à l'encontre de l'alliance Oneworld en général et de deux ses membres fondateurs en particulier, American et Qantas. Ces derniers ont en effet refusé de nouer des accords avec la compagnie du Golfe et considèrent Qatar Airways davantage comme une menace que comme un partenaire. Sur fond de polémiques sur la distorsion de concurrence des compagnies du Golfe - accusées par un grand nombre de compagnies de fausser le marché avec les aides publiques dont elles bénéficient de la part de leur émirat actionnaire -, le développement de Qatar Airways dérange au sein de l'alliance.

Face à cette situation, Akbar Al Baker avait menacé de quitter Oneworld pour créer sa propre alliance avec les compagnies dans lesquelles Qatar Airways est entrée au capital. Elles sont nombreuses puisque l'on recense IAG (Qatar Airways possède 20% de son capital) -qui, outre British Airways et Iberia, compte aussi Aer Lingus, Vueling et Level-, Cathay Pacific (10%), le sud-américain Latam (10%), Air Italy (49%) et China Southern (5%).

Lire ici : Le PDG de Qatar Airways menace de quitter Oneworld pour créer sa propre alliance

"Nous sommes une équipe"

La suite était donc très attendue. Cet anniversaire était l'occasion de savoir si la situation s'était dégrippée.

Akbar Al Baker, que la rumeur donnait absent, était bien là. Assis entre les directeurs généraux de Cathay Pacific et de Malaysia Airlines, le patron de Qatar Airways a écouté sagement les discours se succéder. Quand le patron d'American a évoqué la fierté d'appartenir à une "grande famille", il n'a pas esquissé le moindre signe.

Evidemment, quand la séance des questions-réponses est arrivée, la première question des journalistes fut pour lui. Il y répondit sans micro.

"Je suis ici aujourd'hui. Vous pouvez voir qu'ensemble, nous sommes une équipe. Je serai là aussi longtemps que nous pourrons parler ensemble pour résoudre les difficultés et les différences que nous avons", a-t-il déclaré.

Il précisait même que Qatar Airways n'était qu'un actionnaire parmi d'autres au sein des compagnies dans lesquelles la compagnie du Golfe est entrée au capital et que, par conséquent, il ne pouvait décider pour elles.

Bref, le bouillonnant directeur général de Qatar Airways était tout en retenue. Il faisait comprendre qu'il demeurait dans Oneworld et qu'il n'avait aucune influence sur les compagnies dans lesquelles il avait investi. Aucun problème donc.

Et pourtant, cinq minutes plus tard, Akbar Al Baker s'est levé brusquement et a quitté la salle, sans dire un mot, laissant les autres PDG continuer la séance de questions-réponses. C'était pour le moins surprenant. Aux journalistes qui l'ont suivi pour l'interroger, il n'a pas souhaité faire de commentaire.

Etait-il pressé, comme un regard sur sa montre pendant la conférence pouvait le laisser penser? Peut-être. Mais ce qui serait passé inaperçu pour n'importe quel autre PDG d'un membre de l'alliance, ne pouvait l'être pour celui de Qatar Airways. Pas en ce jour de retrouvailles après ses déclarations de novembre où il savait pertinemment que tous ses propos et gestes seraient forcément épiés et interprétés.

En agissant ainsi, ce dernier a confirmé le malaise qui règne au sein de l'alliance Oneworld. Certes, contrairement à Star Alliance (United, Lufthansa...) ou Skyteam (Air France-KLM, Delta...), les deux autres alliances mondiales, Oneworld est habituée aux querelles internes, aux conséquences parfois importantes. En 2013, par exemple, la compagnie australienne Qantas avait rompu son long partenariat bilatéral avec British Airways pour signer une alliance stratégique avec la compagnie de Dubaï, Emirates, non membre de Oneworld.

La moitié des membres de l'alliance concernée par ce conflit

Ce différend semble tout sauf anodin au regard du poids des acteurs en jeu. Au total, la moitié des membres sont de près ou de loin concernés par ce bras de fer. D'un côté, Qatar Airways et les compagnies dans lesquelles la compagnie du Golfe est présente au capital. De l'autre, Qantas et American, la plus grosse compagnie de l'alliance, présente sur le plus gros marché mondial. Enfin, cette opposition a pour origine le point sensible des aides d'Etat, difficile à traiter au niveau mondial dans la mesure où le transport aérien ne fait pas partie de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Pour autant, Qatar Airways ne peut pas faire grand-chose à part râler. Comme toute compagnie du Golfe, les avantages de sa présence dans une alliance restent limités, puisque la plupart des destinations qu'elle dessert le sont également par les autres membres de l'alliance. Si Qatar Airways quittait Oneworld, les autres membres le vivraient très bien. La compagnie qatarie pourrait-elle entraîner les transporteurs dans lesquels elle est actionnaire pour créer une autre alliance? Cela semble compliqué, vu ce qu'apporte l'alliance à ces compagnies. Notamment British Airways et Iberia, dont l'un des éléments de puissance réside dans le partenariat transatlantique avec American.

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