L'Amérique latine emportée à son tour par la crise

Les leaders d'Amérique latine se réjouissaient sans doute un peu trop vite : dans un premier temps, leurs économies ont bien été relativement épargnées par la crise, et voilà qu'elles subissent aujourd'hui la chute des prix des matières premières. De 600 dollars en juillet dernier, le prix de la tonne de soja est descendu à 365 dollars. Pour le Brésil, deuxième exportateur mondial derrière les États-Unis, et l'Argentine, troisième, le coup est rude. Pour Buenos Aires par exemple, le recul des revenus provenant des exportations agricoles est estimé à 38 % pour cette année. Conséquence : la Banque mondiale a été contrainte de réviser ses prévisions de croissance à la baisse, pronostiquant 0,3 % fin février en 2009. La récession aux États-Unis ne fait qu'accélérer la chute des pays du Sud : les plus exposés à l'économie du voisin nord-américain seront les plus sévèrement affectés, a prévenu la Banque mondiale.Pourtant, tout avait bien commencé. De fait, face à la crise, certaines des anciennes faiblesses de la région s'étaient transformées en atouts. Ainsi, les banques locales, laminées par les krachs des dix dernières années, n'ont pas eu la possibilité de participer à l'engouement planétaire pour des produits à risques tels que les subprimes : aujourd'hui, elles se félicitent de ne pas être pénalisées par des produits « toxiques ».En outre, la reprise économique, particulièrement forte en Argentine ces dernières années, leur a offert l'occasion d'engranger de jolis profits sans prendre trop de risques. Conséquence : les banques ont les moyens, aujourd'hui, d'irriguer l'économie. Par ailleurs, la plupart des pays de la zone ont profité de l'envolée des cours des matières premières de ces dernières années pour rétablir leur équilibre budgétaire. Ainsi, l'Argentine affichait à la fin 2008 un excédent budgétaire primaire (hors intérêts de la dette) équivalent à 9,7 milliards de dollars, soit 3,15 % du PIB. Quant à l'excédent primaire brésilien, il s'inscrivait à 4,07 % du PIB en fin 2008, au-dessus de l'objectif de 3,8 % fixé par le gouvernement ! « ouragan économique »Même si ces pays doivent faire face à des remboursements importants de dette, ces surplus permettent d'élaborer des plans de relance économiques massifs. Exactement ce que font tous ces pays actuellement. Car, même s'ils sont mieux armés, la crise ne les a pas épargnés pour autant : les cours des indices boursiers ont reculé de 50 % environ depuis le début de la débâcle et les monnaies ont perdu jusqu'à 35 % de leur valeur face au dollar. Pis, face à une moindre demande mondiale, les excédents commerciaux diminuent. Le soja constituant 40 % de l'ensemble des exportations brésiliennes, Brasilia a vu sa balance devenir déficitaire depuis le début de cette année. De quoi inquiéter les gouvernements de la région, sans oublier la vague de protectionnisme, dangereuse pour ces pays tournés vers l'exportation. Pessimiste, le chef économiste de l'Amérique latine auprès de la Banque mondiale a annoncé, il y quelques jours, l'arrivée « d'un ouragan économique » sur le continent. Il y a donc bien urgence à relancer l'économie si la classe politique ne veut pas être confrontée à la grogne populaire liée à la montée du chômage. La Banque mondiale a d'ailleurs indiqué le chemin, s'engageant à prêter 13 milliards de dollars à la région en 2009.
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