Un économiste à la recherche du succès a deux stratégies possibles. La première, la plus répandue, est de pronostiquer tout et son contraire. Quoi qu'il advienne, l'auteur des prévisions peut alors plastronner : « Je vous l'avais bien dit ! » Il trouvera sans mal de quoi se justifier, puisqu'il a émis et publié toutes les opinions possibles. Au contraire, l'autre stratégie est de répéter toujours la même chose, jusqu'à ce que la réalité se conforme aux prévisions, en vertu d'une loi inexorable comme le cours du temps : une pendule arrêtée donne l'heure exacte deux fois par jour. Plus risquée, cette option est aussi plus rémunératrice, parce qu'elle suppose de résister à la dictature de l'opinion majoritaire pour avoir, le moment venu, raison seul contre tous. C'est la stratégie de l'économiste américain Nouriel Roubini (voir page 2), qui avait parfaitement anticipé la crise, puisqu'il l'annonçait depuis de nombreuses années, y compris quand cela n'avait pas lieu d'être. Le crédit dont il bénéficie aujourd'hui récompense son opiniâtreté méritante. A-t-il pour autant raison aujourd'hui, lorsqu'il pronostique une reprise anémique, au contraire des experts de marchés, qui voient un vrai redémarrage ? Une pendule arrêtée peut-elle donner l'heure trois fois par jour ? Il y a au moins une bonne raison pour prêter attention aux analyses de Roubini : le consensus se trompe toujours, sur tous les sujets. Toute idée entendue plus d'une fois dans un dîner mondain est immanquablement fausse ? les plaisirs de la vie sociale devraient être interdits aux économistes par leur ordre professionnel, sinon par la loi. Il y a un an, le consensus pariait sur la fin de la crise financière. Juste avant l'effondrement. Il y a trois mois, il redoutait la fin du monde. Juste avant le rebond. S'il annonce aujourd'hui sur une reprise durable, il y a toutes les raisons de s'inquié[email protected] françois lenglet

latribune.fr

18 Juin 2009, 1:40

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