Universités : les gagnants et les perdants du conflit

Alors qu'universités et étudiants s'attellent à rattraper cours et examens après quatre mois d'un conflit inédit depuis 1976, l'heure est venue de faire les comptes. Qui sont les gagnants, les perdants ? À ce jour, le bilan, mitigé, est à l'image du caractère hétérogène du mouvement et de son étiolement progressif.Entendue jeudi au Sénat sur la situation dans les universités, la ministre de l'Enseignement supérieur a tenu à relativiser. « Pratiquement, la moitié de nos 83 universités n'a connu aucune perturbation », a indiqué Valérie Pécresse, estimant que les 18 établissements devenus autonomes le 1er janvier 2008 sont « très largement représentés parmi ces établissements ». « Seize universités ont connu des perturbations longues et touchant l'ensemble de leurs composantes », 19 universités ont été partiellement affectées et 10 « faiblement touchées », a-t-elle détaillé, assurant ne pas chercher à « sous-estimer la gravité du conflit ».année « bradée »Entre la surmédiatisation des blocages et des reports d'examens et la menace entretenue d'une année « bradée » pour les étudiants, ces derniers sont vite apparus comme les grands perdants du conflit. De fait, dans les universités les plus contestataires ? Paris IV-Sorbonne et Toulouse II-Le Mirail (UTM) ? le second semestre apparaît sinistré et les nouvelles modalités d'examens, quoique visées par le ministère et les rectorats, sont parfois très souples, même si les « semestres blancs » sont exclus. L'UTM a voté un report des examens en septembre et octobre, avec des épreuves pouvant, dans certains cas, consister en la remise d'un dossier. « Il est vrai que les étudiants les plus fragiles, notamment en premier cycle, sont les grands perdants », convient Danielle Charles-Le Bihan, vice-présidente de Rennes II. Certains, aussi, ont eu l'impression d'être « lâchés » par les enseignants-chercheurs, qui avaient lancé le mouvement et leur ont finalement fait passer les examens, constate un président d'université.amersDes enseignant-chercheurs qui restent amers. Ils ont obtenu des gestes, notamment sur leur statut et les suppressions de postes (gelées en 2010 et 2011), mais le dossier de la réforme de la formation des maîtres n'est toujours pas réglé (cf. « La Tribune » du 5 juin). « Les universitaires s'interrogent sur les intentions du gouvernement et attendent encore des gages », estime Danielle Charles-Le Bihan. « Le mouvement n'est pas terminé. Passée la parenthèse des examens, nous allons continuer à nous battre et demander aux universités de ne pas appliquer la réforme de la formation des enseignants », prévient Jean-Louis Fournel, président de Sauvons l'université. Pour lui, « il n'y a pas de gagnant, il y a surtout un grand perdant : l'université française et ses relations avec le gouvernement. Un fossé s'est creusé qui n'est pas prêt d'être comblé de sitôt. »Si Valérie Pécresse « assume complètement » sa gestion de la crise, rappelant que le gouvernement a choisi la voie « difficile et longue de la négociation plutôt que celle du retrait », les universitaires continuent à dénoncer une fausse concertation intervenant trop souvent a posteriori et traitée à coup de commissions, de groupes de travail et de conseils sans réels pouvoirs.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.