La réforme de la biologie médicale ne satisfait personne

La polémique enfle autour du projet de loi réformant la biologie médicale, largement inspiré par le rapport Ballereau, remis à la ministre de la Santé fin septembre. Un texte qui doit être examiné en Conseil des ministres à la mi-octobre. Laboratoires de biologie et investisseurs venus de l'extérieur ont beau louer l'esprit du texte, tous contestent sa principale idée : l'ouverture totale du capital des laboratoires d'analyse aux investisseurs professionnels tiers (des non-biologistes en exercice), qui ne peuvent jusqu'alors posséder plus de 25 % du capital d'un laboratoire de biologie.MELANGE DES GENRESMédecins et pharmaciens biologistes dénoncent un mélange des genres. " Nous ne sommes pas opposés au principe de ce rapport, qui plaide pour une meilleure qualité et une médicalisation de la profession, mais nous craignons un basculement vers un système commercial, qui irait à l'encontre de ces exigences ", précise le président du syndicat des biologistes, Jean Benoît. Le texte consacre pourtant une plus grande responsabilité des biologistes : de l'interprétation des résultats à la possibilité d'amender les prescriptions. Mais la profession estime insuffisantes les mesures censées préserver les spécificités du système français - clause minimale d'investissement de sept ans, impossibilité d'investir dans deux laboratoires sur un même territoire de santé... Surtout, " le rapport lève l'interdiction de possession d'un laboratoire par une clinique privée, d'où des conflits d'intérêts évidents ", souligne Robert Desmoulins, président de la section G de l'Ordre des pharmaciens (pharmaciens biologistes). " Les analystes peuvent tout à fait conserver le monopole des compétences techniques sans avoir celui de la propriété ", rétorque Filippo Monteleone, directeur général du groupe de cliniques privées Générale de Santé.Les investisseurs professionnels tiers, qui lorgnent ce nouveau marché, restent eux aussi sur leur faim. Ainsi Éric Souêtre, président de Labco, réseau européen privé de laboratoires et principale cible des attaques des biologistes, dénonce les mesures d'économies préconisées par le rapport - 100 millions d'euros net sur trois années consécutives -, qui entraîneront une " érosion de 4 % par an des revenus des acteurs du secteur ". De quoi, selon lui, limiter leurs moyens d'actions, alors que le texte vise à améliorer la qualité et l'efficience de la profession. Il qualifie également " d'entraves à la concurrence " les mesures d'encadrement prévues.LA FRANCE EPINGLEE PAR BRUXELLESLe principe d'ouverture du capital vise également à mettre la France en conformité avec les exigences de la Commission européenne. En octobre 2007, cette dernière avait été saisie d'une plainte pour violation du droit communautaire de la concurrence. " Le regroupement de laboratoires est une nécessité pour le secteur " , concède Jean Benoît, qui plaide pour des rapprochements entre laboratoires indépendants. Il déplore le passage prévu du texte par ordonnance, " évitant ainsi le débat démocratique " alors que ce dernier est rattaché au projet de loi hôpital, patients, santé et territoire qui sera débattu au Parlement début décembre.La biologie médicale en France4.237 laboratoires privés, dont 2.184 en SEL (société d'exercice libéral), 1.139 en nom propre, 517 en sociétés civiles professionnelles, 397 SA ou SARL.2.686 médecins biologistes.8.057 pharmaciens biologistes.35.000 salariés.Part de la biologie médicale dans les dépenses totales de santé : 2 % à 2,5 %.(Source : Intersyndicale des biologistes)
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