La Révolution en couleurs

Les collectionneurs sont de drôles de gens. Souvent ils se passionnent pour l'art en le découvrant. Et dans le même élan s'attachent plus particulièrement à un artiste. Pas toujours le meilleur, d'ailleurs. Prenez le Grec Georges Costakis (1912-1990)... Russe d'origine grecque, il s'est constitué une de plus belles collections d'Avant-garde russe, dont une partie est aujourd'hui exposée au musée Maillol à Paris. Au milieu de tous ces artistes, il en est un qu'il affectionne particulièrement, Yvan Klioune. Pas un des plus connus dans ce mouvement qui donna à l'art de nouvelles formes et de nouvelles couleurs. Bon d'accord, il est en bonne compagnie avec Malevitch, Rodtchenko, Popova ou Tatline. Georges Costakis savait choisir aussi le meilleur. Au départ celui-ci n'était qu'un chauffeur d'ambassade. C'est en accompagnant des acheteurs qu'il forme son regard. Et commence juste après la Seconde Guerre mondiale une collection d'icônes et de petits maîtres hollandais. La première toile d'avant-garde russe qu'il découvre est celle d'Olga Rozanova. Le mouvement n'est plus en odeur de socialisme. On vend sous la chapka. Ce qui n'arrête pas Georges Costakis. Il fait même connaissance sous Staline de Tatline et Popova. Un exploit. Costakis va même jusqu'à acheter plus de 1.000 peintures, dessins, aquarelles et autres objets. Mais l'homme est sous surveillance. Le KGB lui mène la vie dure. Pour avoir la paix, il donne à la Tretyakov Gallery de Moscou la moitié de sa collection. Et après avoir quitté l'URSS l'autre moitié à l'état grec.200 ?uvresC'est donc une infime partie de sa collection qui est proposée dans cette exposition riche de quelque 200 pièces. Infime, mais de grande qualité. On découvre Malevitch à ses débuts, avec des portraits figuratifs ou chargés de symboles, comme « la Femme en couche ». Rodchenko et ses variations en noir et blanc. Et dans la fulgurance des idées naît le constructivisme. L'artiste impose une symphonie de formes qui rythment la composition. Toujours géométrique. L'homme dans sa figuration a disparu de la toile.Klioune exalte l'espace blanc tandis que Malevitch impose le suprématisme avec son rectangle blanc et noir. C'est-à-dire l'absolu de la peinture. L'art est au service de la révolution. L'esprit et la forme ne font plus qu'un. De son côté, Rodtchenko invente avant Pollock le dripping, Lissitzky enclenche une mécanique du mouvement tandis que Popova travaille sur la lettre. une pièce exceptionnelleL'Avant-garde russe s'applique à tout, et en particulier aux arts décoratifs. Cette fureur de l'art va se cogner au mur des idéologies dès les années 30. Avec ses collages, Ender signe le retour de la figuration. L'homme tel qu'il est rêvé par l'idéal socialiste. Dans ce parcours, il est, en dehors de la peinture, une pièce exceptionnelle, c'est la reconstitution d'une installation d'Ilya Kabakov d'une cuisine communautaire. Un peu comme une chapelle où les ex-votos sont remplacés par des cafetières et des casseroles, et les chants par des murmures plaintifs d'hommes et de femmes. nMusée Maillol, 61, rue de Grenelle, Paris VIIe. ? Tél. : 01.42.22.59.58. Jusqu'au 2 mars 2009. www.museemaillol.com
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